Traitement médicamenteux
Pendant longtemps, l’utilisation des stimulants cérébraux a été réservée aux enfants hyperactifs, chez qui l’effet sur l’agitation motrice est connu depuis longtemps. Lorsqu’il a été clair que ces médicaments agissaient aussi sur l’attention de l’enfant, des essais ont été faits auprès d’enfants en difficulté d’attention qui n’étaient pas hyperactifs. Même si l’effet n’est pas aussi spectaculaire que dans le traitement de l’hyperactivité, la médication s’est révélée utile dans le traitement des lunatiques.
On peut être surpris, connaissant la différence entre les deux formes de déficit de l’attention, que les mêmes médicaments soient prescrits. Les premiers essais cliniques datent de l’époque où les médecins croyaient que les deux types de déficit avaient la même cause. Maintenant que l’on connaît l’efficacité de la médication chez les lunatiques, il reste à démontrer la raison de cette efficacité; on découvrira probablement que ces stimulants agissent sur tous les neurotransmetteurs et dans toutes les zones du cerveau.
Bien que l’on ait recours à la même médication, il existe néanmoins quelques différences dans la façon de l’utiliser. La première différence réside dans la dose utilisée. On a remarqué que des doses plus faibles (de 5 à 10 mg de Ritalin matin et midi, par exemple) étaient généralement suffisantes. Selon le Dr Barkley, si une faible dose est complètement inefficace, il semble que l’augmentation de la dose soit inutile dans la plupart des cas, une dose plus forte ne se montrant pas plus efficace. Dans mon expérience, qui est quand même limitée, je n’ai jamais eu besoin d’utiliser de fortes doses de Ritalin chez les lunatiques.
Les enfants lunatiques ne présentant pas de troubles de comportement, l’effet des médicaments est moins apparent et il faut souvent quelque temps avant que l’on puisse constater la différence. Lorsque le traitement est interrompu, il faut aussi généralement un certain temps avant que les symptômes réapparaissent. Il devient donc plus difficile de s’assurer de l’effet réel des médicaments. Pour la même raison, un enseignant qui s’oppose d’emblée à toute utilisation des médicaments pourra aussi plus facilement nier leur efficacité.
Cette lenteur manifeste de l’apparition des effets des stimulants (et, le cas échéant, de leur disparition) s’explique par ce que j’appelle la théorie de la «pile». Je compare la capacité de concentration de l’enfant à la charge électrique qui s’accumule dans une pile. Durant l’été, par exemple, l’enfant recharge sa pile de concentration et quand il commence une année scolaire, il est à son meilleur. Souvent, il faut attendre quelques semaines, et parfois quelques mois, avant que sa pile soit vidée et qu’il manque de concentration au point que son travail en souffre. Si, à ce moment, l’enfant utilise une médication stimulante, il recharge lentement sa pile de concentration, celle-ci s’améliorant avec le temps. Après un certain temps, sa pile est rechargée, il se concentre mieux, et ses résultats s’améliorent. S’il cesse la médication, la pile met encore un certain temps avant de se décharger de nouveau.
En raison de cette théorie, mes prescriptions de stimulants aux lunatiques peuvent varier considérablement selon les enfants. Ceux dont les problèmes sont plus sérieux et dont le retard accumulé est plus grand en prennent tous les jours de la semaine; d’autres les utilisent pendant quelques semaines pour recharger leur «pile» et cessent ensuite pour les reprendre plus tard quand ils en sentent le besoin. J’insiste dans ces cas pour que l’enfant en prenne durant les périodes d’examens.
Il arrive aussi que chez certains, le manque de concentration ne cause d’ennuis que dans quelques matières. Dans ces cas, le médicament n’est pas administré pour recharger la «pile», mais pour favoriser leur concentration; on ne le donne alors que lorsque les enfants ont des cours dans cette matière. J’ai suivi ainsi un jeune garçon qui était au secondaire et qui ne prenait son Ritalin que lorsqu’il avait un cours de mathématiques. Pour les autres cours, il n’en avait pas besoin.
Il est exceptionnel qu’un lunatique prenne des médicaments la fin de semaine et lors des congés. Je ne le suggère que si l’enfant a du travail en retard et qu’il tienne à rattraper ce retard. Il arrive aussi que l’enfant ait beaucoup de difficulté à faire ses devoirs quotidiens le soir à la maison. Dans ces cas, après entente avec l’enseignant, qui refuse rarement, l’enfant prend son médicament et travaille un matin de fin de semaine plutôt que tous les soirs de la semaine. Je tiens toutefois à ce que l’enfant ne travaille qu’une seule journée de la fin de semaine. Il a tout autant besoin que les autres de se consacrer à autre chose qu’au travail scolaire.
Lorsque je prescris les stimulants aux hyperactifs, j’insiste pour qu’ils les prennent régulièrement à cause de leur effet non seulement sur la concentration, mais aussi sur leur impulsivité et leur hyperactivité. Puisque chez le lunatique cet effet sur le comportement est à peu près inexistant, il n’est pas nécessaire d’être aussi régulier. De plus, les doses étant généralement faibles, les effets secondaires m’inquiètent moins que chez les hyperactifs.
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