Les images aident-elles la mémoire
Le rôle des images dans la mémoire est une question très ancienne puisque, dans l’An- tiquité, on apprenait beaucoup en faisant des images mentales. Descartes quant à lui trouvait que cela n’était bon que pour les charlatans. Or, le développement des médias basés sur l’image, le cinéma, la télévision, la bande dessinée, et maintenant le multimédia, a amené les chercheurs à se pencher sérieusement sur la question.
Lorsque les images sont familières un chat, une tulipe, une horloge, il est plus efficace d’apprendre sous forme d’images que sous forme de mots. Cette efficacité se retrouve à tous les âges, puisque la mémorisation des images est supérieure à celle des mots, des tout-petits aux grands de vingt ans ; et même les personnes très âgées se rappellent mieux ce qui a été présenté sous forme d’images que de mots. Attention cependant à ne pas faire de confusion, car, pour la plupart, la mémoire des images est confondue avec la mémoire visuelle et beaucoup disent avoir une mémoire photographique car ils ont en tête une image de la page de leur livre, etc. En fait, l’image mentale n’est pas du tout une photographie de la page du livre, ou de l’objet que l’on regardait, mais une véritable image virtuelle : le cerveau fait depuis longtemps de la synthèse d’images, ce que les ordinateurs commencent à réaliser. Lorsque, par exemple, je vous demande de vous imaginer un petit cochon, c’est une image stylisée, artificielle, d’un beau petit cochon bien rose, qui vous vient à l’esprit ; allez donc à la campagne et essayez de trouver ce beau petit cochon rose et vous verrez que dans la nature, il a oublié de prendre sa douche. Ce fait est apparu dans différentes études ; par exemple, lorsque sur des diapositives soumises à des enfants, des objets ou des animaux sont représentés, soit avec leur couleur naturelle (un cochon rose) ou avec d’autres couleurs (un citron bleu), on s’aperçoit que les enfants se rappellent les objets, animaux ou plantes, avec leur couleur naturelle ; ils n’ont pas rappelé une image photographique de ce qu’ils ont réellement vu, mais une image type, répertoriée dans leur mémoire. En effet, de même que nous avons une mémoire lexicale pour la carrosserie des mots et une image sémantique pour leur sens, nous avons une mémoire imagée qui est une fantastique bibliothèque d’images (les chercheurs parlent « d’iconothèque »). Cependant, il est important de se rappeler que ces images sont des images fabriquées et non des photographies; Nous avons en tête l’image d’un bateau type, alors que nous avons mémorisé dans notre vie de nombreux bateaux différents. C’est à cause de ce même mécanisme de standardisation, qu’on ne peut se fier aux témoignages ocu¬laires, car les témoins se fabriquent, dans leur mémoire, des visages qui ne correspondent pas tout à fait à ce qu’ils ont réellement vu.