Variation selon les situations
Les symptômes présentés par les enfants hyperactifs sont extrêmement variables selon les situations; chez certains enfants, ils peuvent même être absents dans les circonstances les plus favorables et être très marqués dans d’autres. Certains autres enfants présenteront toujours des symptômes dont le degré variera également. Ce phénomène peut amener le médecin à une erreur de diagnostic s’il s’attend à ce que les symptômes soient toujours présents et à un même degré.
– La première situation pour laquelle on note une différence est lorsque l’enfant se trouve en tête-à-tête avec un adulte. A ce moment, il est moins agité, moins impulsif et plus attentif. Cela cause parfois des problèmes aux directeurs d’école ou aux psychologues qui ne les rencontrent que dans ce genre de circonstances et qui peuvent être portés à trouver exagérées les remarques des enseignants. Quand ces intervenants observent l’enfant dans sa classe, ils ont souvent une vision très différente.
– Les enfants manifestent beaucoup moins de symptômes lorsqu’ils sont face à une tâche nouvelle et intéressante que lorsque la tâche est particulièrement ennuyeuse. Par exemple,ces enfants adorent les jeux vidéo dans lesquels ils réussissent généralement davantage que dans leurs travaux scolaires. Si les écoles pouvaient transmettre les matières au moyen d’un jeu Nintendo, tous les enfants apprendraient plus vite, surtout les enfants hyperactifs.
– On a constaté aussi que la nouveauté d’une tâche ou d’une situation pouvait faire diminuer considérablement les symptômes de ces enfants» Ce fait se vérifie, par exemple, en début d’année scolaire lorsqu’un nouvel enseignant s’aperçoit que l’enfant qu’on lui avait décrit comme inattentif et hyperactif l’est moins que ce que laissait prévoir la description. Plusieurs enseignants ayant vécu cette situation ont été tentés de porter un jugement défavorable sur leurs prédécesseurs. Puis, en l’espace de trois à quatre semaines, l’enfant redevient lui-même et l’enseignant commence à croire ce qu’on lui avait décrit. Cela explique aussi que lorsqu’en quatrième année les enfants com¬mencent leur cours d’anglais, pour un certain temps l’hyperactivité sera moins symptomatique pendant ces cours, qui représentent une nouveauté, que lors des autres cours. Ce phénomène se vérifie surtout si l’enseignant est différent, ce qui accentue encore la nouveauté.
– Une constatation qui a causé bien des problèmes aux chercheurs est la suivante: ces enfants présentent souvent beaucoup moins de symptômes avec leur père qu’avec leur mère. Long-temps, et bien à tort, on en a déduit que les mères jouaient un rôle dans la genèse de ces symptômes. Il est bien connu maintenant que les mères n’ont rien à se reprocher; plusieurs autres explications plus logiques se sont dégagées des diverses recherches.
– Les raisons de cette différence ne sont pas encore complètement élucidées, mais nous commençons à avoir quelques éléments d’explication. En effet, même en tenant compte des variations selon les familles, on a remarqué que les pères sont généralement engagés avec leurs enfants dans des tâches nouvelles et attrayantes pour eux (bricolage, sport, etc.), alors que les mères partagent des tâches ennuyeuses (tra¬vaux scolaires, hygiène, travaux domestiques, etc.). De plus, les pères sont en général moins souvent présents à la maison, ce qui rend leur présence plus nouvelle et inhabituelle. Finalement, dans la majorité des cas, les pères sont peu patients avec leurs enfants, répètent moins les consignes et punissent plus que les mères qui sont plus patientes et plus portées à remettre les punitions non essentielles. Comme nous le verrons plus loin, la première méthode est la plus efficace quand on a affaire à un enfant hyperactif.
– Enfin, on a constaté que les enfants hyperactifs manifestent souvent beaucoup moins de symptômes le matin que l’après-midi. La raison précise de ce phénomène n’est pas connue, mais on croit que la fatigue qui s’accumule durant la journée contribuerait à diminuer leur capacité d’attention, augmentant ainsi les autres symptômes. Il faudra en tenir compte quand viendra le temps de parler du traitement. Pour favoriser ces enfants, il faut absolument consacrer l’avant-midi aux tâches les plus importantes, en particulier aux examens.
J’en profite pour mettre en garde tous les pédiatres, psychiatres, psychologues, orthopédagogues, psycho-éducateurs, directeurs d’école, etc., qui rencontrent ces enfants seul à seul. Si cette rencontre a lieu le matin, si l’enfant se rend pour la première fois à votre bureau, si votre propos est attirant pour l’enfant et qu’il quitte pour cela une classe qu’il considère comme ennuyeuse, et si en plus vous êtes un homme, il est possible que le comportement de l’enfant diffère sensiblement de ce que vous a décrit son enseignant. De grâce, n’en tirez pas de conclusions hâtives; à la limite, seule une visite dans sa classe pourra vous révéler le comportement réel de l’enfant.