L'imagerie mentale
Pour accéder aux représentations inconscientes de soi et les modifier, l’imagerie mentale est utilisée depuis longtemps dans certaines formes de psychothérapie. La technique dite du «rêve éveillé dirigé », élaborée par Robert Desoille vers le milieu du xxesiècle, veut favoriser la montée des images intérieures et utiliser le pouvoir de liaison de l’imaginaire pour soigner principalement une souffrance morale, parfois un trouble physique. D’autres techniques d’imagerie mentale ont été conçues spécifiquement pour venir en aide aux gens atteints de maladies physiques. Celles-ci sont suggérées pour accompagner et soutenir les traitements médicaux souvent pénibles à tolérer. La méthode dite de «visualisation de la guérison», élaborée par l’oncologue Cari Simonton et ses collaborateurs, est probablement la plus connue43. Elle s’adresse principalement aux personnes atteintes de cancer et s’élabore en trois étapes. Dans un premier temps, on invite le patient à relaxer pour se mettre en état de recevoir des images intérieures qui représentent sa maladie. Lorsqu’il y a accès, on lui suggère de les dessiner et de les analyser. Puis on l’incite à les combattre en créant volontairement d’autres images qui visent la destruction du mal, l’extraction de la maladie du corps. Les auteurs de la méthode observent que les images élaborées à partir de sensations corporelles ont plus de chances d’être efficaces. On comprend pourquoi: ces images enracinées dans le corps sont l’œuvre du cerveau droit et ont, par conséquent, plus d’influence sur les mécanismes physiologiques. Le succès de la visualisation dépend donc de la capacité de la personne à entrer en état de fluidité et à laisser son imaginaire lui suggérer les images plutôt qu’à les construire en se basant sur sa volonté et sa raison conscientes.
Marie Lise Labonté (2006), bien qu’elle reconnaisse les bienfaits de l’approche du DrSimonton, critique le fait que celle-ci donne priorité à la volonté de combattre à tout prix la maladie, sans tenir compte de la relation qu’entretient le patient avec cette dernière, de ses sentiments vis-à-vis de lui-même en tant que personne souffrante. Cette objection mérite réflexion. Certes, la maladie n’est pas souhaitable et le but recherché par l’imagerie mentale est de la faire disparaître, mais on ne doit pas oublier qu’elle est apparue dans le corps propre, que des aspects de soi y ont participé inconsciemment, souvent des émotions et des images étouffées et haïes, et, que, en ce sens, elle témoigne d’une souffrance morale ignorée. Adopter une attitude de rejet envers cette partie souffrante revient à agresser et rejeter à nouveau une part de sa vérité profonde. Les images créées pour combattre la maladie risquent alors de s’ancrer dans la haine de soi plutôt que de s’enraciner dans l’amour et l’accueil de sa souffrance morale qui a pris la voie du corps pour s’exprimer. Cette haine pourrait conduire à une dégradation de l’état physiologique plutôt qu’à une guérison. Marie Lise Labonté suggère plutôt de se mettre à l’écoute des images négatives qui représentent la maladie. Parce qu’elles émanent de l’imaginaire, elles conduiront à une compréhension de l’émotion en souffrance. Une fois celle-ci pensée, elle s’intégrera à l’histoire et d’autres images plus positives pourront surgir, exprimant les processus de guérison à l’œuvre.
La méthode en ECHO, par certains de ses aspects, peut faire penser à une technique d’imagerie mentale. Pourtant, elle en diffère de bien des manières. D’abord, il ne s’agit pas d’une approche de psychothérapie. Il arrive qu’elle ait des effets thérapeutiques, mais ceux-ci ne sont pas recherchés en soi, le but de la méthode étant d’apprivoiser l’imaginaire et de l’assouplir pour favoriser la reprise des processus de guérison. Tout est conçu pour court- circuiter l’intervention de la volonté. À la différence des techniques d’imagerie, on n’y valorise pas la seule production d’images au détriment d’autres événements internes. Tous les objets qui se présentent à la conscience – sensations, perceptions, émotions, images ou pensées – sont sur le même pied d’égalité. L’invitation à transformer ou modifier consciemment ces objets n’a pas pour but de produire un effet sur la maladie, mais vise plutôt à augmenter la fluidité des échanges d’informations en mettant du corps dans la pensée et de la pensée dans le corps.