La cause
Depuis une cinquantaine d’années, plusieurs hypothèses ont été formulées pour expliquer les symptômes présentés par les enfants hyperactifs. Certaines ont encore leurs adeptes aujourd’hui, même si des études sérieuses ont clairement démontré leur inexactitude. Je ferai le point sur ces hypothèses un peu plus loin.
Durant la dernière décennie, de nombreux chercheurs ont étudié le fonctionnement du cerveau des hyperactifs. Je vais tenter de résumer le plus simplement possible les résultats de ces recherches qui jettent un éclairage nouveau sur le phénomène.Voyons d’abord comment fonctionne le cerveau et les cellules nerveuses. Le cerveau est composé de millions de cellules réparties en différentes zones, chacune ayant une fonction à remplir. Par exemple, une zone du lobe occipital assure la vision, une zone du lobe frontal s’occupe de la motricité, etc. La partie antérieure du lobe frontal est responsable du comportement et, en particulier, du contrôle de certains comportements.
Pour ce qui est des cellules, notons que la transmission des informations d’une cellule nerveuse à une autre se fait au moyen de substances chimiques appelées «neurotransmetteurs». Ces substances sont sécrétées par la cellule qui émet l’information et captées par la cellule qui reçoit l’information.
Il semble que les hyperactifs soient victimes d’un dysfonctionnement de ces neuro transmetteur, plus particulièrement de l’un d’eux, la dopamine. En effet, la sécrétion de la dopamine serait déficiente, ce qui entraînerait un ralentissement dans la transmission des informations d’une cellule à l’autre. Ce ralentissement créerait une diminution de l’activité de la zone du cerveau touchée. Dans le cas qui nous occupe, c’est surtout une zone de coordination entre le lobe frontal et le système limbique qui serait affectée.
Concrètement, ce ralentissement cérébral est à l’origine des symptômes déjà décrits qui sont tous reliés au contrôle du comportement; contrôle de l’attention, contrôle de l’impulsivité, contrôle de l’activité motrice, contrôle de l’obéissance aux règles et contrôle du rendement au travail.
Il reste maintenant à connaître la cause de ce ralentissement cérébral sélectif. Les chercheurs ont longtemps pensé qu’il était une conséquence d’une lésion acquise, tel un manque d’oxygène au cerveau au moment de la naissance. Des études plus récentes ont toutefois démontré que moins de 5 % des hyperactifs le sont par suite de lésions acquises. Dans la plupart de ces cas, il s’agit de problèmes survenus au moment de la naissance ou peu après, plus souvent chez les prématurés. Il semble aussi que l’intoxication au plomb puisse provoquer chez les jeunes enfants les symptômes classiques de l’hyperactivité. C’est encore, heureusement, un phénomène rare.
Les études ont clairement établi que, dans plus de 95 % des cas, l’hyperactivité est héréditaire . La transmission se fait par les gènes et les parents n’en sont évidemment pas responsables. Ainsi, les descendants d’une personne hyperactive sont plus exposés que d’autres à ce problème. Les études statistiques ont montré que 35 % des pères et 17 % des mères des hyperactifs sont hyperactifs eux aussi. En ce qui concerne la fratrie, les risques sont de 40 % pour les frères et de 10 % pour les sœurs. Il y aussi un risque augmenté de retrouver des hyperactifs parmi les oncles, les tantes et les cousins.
Il a aussi été observé que les femmes qui fument et celles qui consomment beaucoup d’alcool durant leur grossesse présentent un risque accru d’avoir un enfant hyperactif. Cependant, il n’a pas été démontré avec certitude que l’hyperactivité des enfants soit directement reliée à la consommation d’alcool et de tabac de la mère, mais cette hypothèse devrait inciter les futures mères à la prudence, d’autant plus qu’il a été récemment constaté que la cause la plus fréquente de retard mental chez les enfants aux États-Unis est l’abus d’alcool durant la grossesse.
Finalement, il est depuis longtemps admis que certains médicaments sont susceptibles de provoquer chez les enfants la plupart des symptômes de l’hyperactivité. Ce sont principalement les barbituriques, le plus connu étant le phénobarbital, encore souvent utilisé pour traiter l’épilepsie chez les jeunes enfants (moins de cinq ans). Dans ces cas cependant, l’arrêt du traitement s’accompagnera inévitablement de la disparition des symptômes. Au moins 20 % des jeunes enfants traités au phénobarbital réagissent de cette façon, et aucun lien n’a été établi entre une telle réaction et un risque plus élevé d’hyperactivité éventuelle chez ces enfants.
En résumé, on peut désormais affirmer que la cause de l’hyperactivité est organique . Il s’agit d’une déficience sur le plan des neurotransmetteurs (en particulier la dopamine) qui provoque un ralentissement du fonctionnement d’une zone du cerveau, responsable du contrôle de certains comportements. Cette déficience est souvent héréditaire et présente dès la naissance, même si ses effets ne se font habituellement sentir que vers quatre ou cinq ans.l En raison de ces faits, il est maintenant convenu dans les milieux médicaux de considérer ces enfants comme des handicapés. Des demandes sont d’ailleurs actuellement faites par de nombreux spécialistes de l’hyperactivité au gouvernement des États-Unis pour que les hyperactifs soient reconnus comme des handicapés, ce qui leur permettrait de bénéficier de certains programmes et services réservés à ces derniers.
Passons maintenant aux différentes théories qui ont été mises de l’avant pour expliquer l’hyperactivité. Un résumé des plus connues ainsi que des résultats des récentes recherches auxquelles elles ont donné lieu devrait permettre de mieux cerner la situation.