L’agitation
On a étudié certains enfants hyperactifs pendant deux semaines, jour et nuit, pour tenter de comprendre pourquoi ils sont si agités. On a remarqué que même si cette agitation varie énormément d’un hyperactif à l’autre, ils sont plus actifs que les autres enfants dans toutes leurs activités, et même, dans la plupart des cas, durant le sommeil. Mais ce qui les distingue surtout, c’est cette incapacité qu’ils ont à contrôler leur degré d’activité. Ils bougent beaucoup, font des mouvements inutiles, non liés à la tâche en cours. Même lorsqu’ils en sont conscients, ils restent incapables de réprimer ce besoin de bouger constamment.
Voilà quelques années, je recevais à mon bureau un adolescent de seize ans qui m’était envoyé par l’école pour des problèmes de comportement. Nous conversions depuis une heure et son comportement dans le bureau me semblait tout à fait normal lorsqu’il me dit: «Peux-tu m’expliquer une chose: ça fait une heure que je te regarde. Comment fais-tu pour rester si longtemps sans bouger?»
Personnellement, je ne me suis jamais cru immobile, mais pour lui, il était incompréhensible qu’une personne puisse avoir le contrôle de son niveau d’activité. Je me suis par la suite rendu compte en l’observant attentivement qu’il bougeait sans arrêt, même si ses mouvements n’étaient pas très perceptibles.
Un autre exemple: un groupe d’élèves du primaire rentre d’une récréation pendant laquelle ils ont joué ensemble au ballon chasseur, un jeu où le degré d’activité de chacun est très élevé. Il faudra à la plupart des enfants quelques minutes pour amener leur niveau d’activité physique à celui nécessaire pour la tâche scolaire demandée. Par contre, les enfants hyperactifs mettront beaucoup plus de temps pour réduire leur niveau d’activité, ne réussiront pas à le diminuer suffisamment et certains même n’y parviendront tout simplement pas, malgré les remontrances de l’enseignant.
Ce qui caractérise le mieux leur agitation est qu’elle est gratuite., Il s’agit de mouvements sans rapport avec le travail en cours.. Ils bougent, changent de position, jouent avec leur crayon, etc. Mais cette dépense énergétique n’est pas dirigée vers l’accomplissement d’une tâche. Imaginez un jeune enfant de deux ou trois ans qui ouvre l’armoire de la cuisine, en sort tout ce qu’elle contient et commence à défaire ce qui est défaisable, et ce en quelques minutes seulement. On peut le considérer comme un hyperactif, mais son énergie, il la dépense pour réussir dans sa tâche, celle-ci consistant à découvrir le monde et à savoir comment les choses sont faites. C’est l’agitation motrice normale du jeune enfant qui n’a rien à voir avec celle des enfants hyperactifs dont l’agitation n’a souvent pas de but précis et est due uniquement à un manque de contrôle.
Souvent les enfants hyperactifs, lorsque je les interroge sur ce sujet, parlent de leur niveau d’activité en disant qu’ils sont nerveux. Je préfère pourtant utiliser ce terme pour caractériser un enfant qui est anxieux, dont l’agitation est due à l’anxiété. Ce n’est certes pas le cas ici et c’est même souvent le contraire. Ces enfants, en règle générale, ne sont pas craintifs et sont la plupart du temps rapidement à l’aise avec les adultes. Ils sont rarement timides.
Il ne faut pas confondre non plus leur agitation avec celle qui affecte les enfants présentant un tic. Le tic prend la forme d’un mouvement répétitif et saccadé. Le mouvement est toujours identique et le même enfant présente rarement plus d’un tic à la fois.
Chez les adolescents et les adultes, l’hyperactivité est généralement beaucoup moins apparente, mais les gens habitués à vivre avec des hyperactifs la reconnaissent facilement. Elle est tout aussi inutile et non liée à la tâche en cours.