Habitudes alimentaires
Notre comportement alimentaire est actuellement caractérisé, à la fois par l’angoisse et l’ambiguïté.
Les civilisations qui nous ont précédé ne remettaient jamais en cause la légitimité de leurs modes alimentaires. Un adolescent guerrier purifié par le jeûne avant l’initiation, la tribu assemblée au cours d’un repas rituel, les Juifs rejetant à la mer les poissons sans écailles, ne doutaient pas. Ils consommaient ou s’interdisaient des aliments, perpétuant des rites familiaux et communiant à travers ces rites avec la civilisation de leur temps et de leur tribu. Or ce comportement alimentaire ritualisé et rassurant est en train de disparaître. L’abondance alimentaire, la dislocation des structures familiales et sociales, la journée continue, l’augmentation de fréquence des repas solitaires, tout contribue à déritualiser et désacraliser nos repas. Certes, les anciennes tendances demeurent, et l’on continue souvent à commémorer une fête ou tout simplement le repos hebdomadaire par la consommation en commun d’un plat cuisiné. Mais notre angoisse de rejeter, en même temps que les modes alimentaires traditionnels l’ensemble de notre civilisation, prend, aussi d’autres formes. Songeons aux citadins, se réunissant dans une cave- caverne, autour d’un feu de braise, sur lequel s’égoutte le sang d’un morceau de viande grossièrement taille…
Ce genre de mascarade reflète une nostalgie mais ne bâtit pas une civilisation. Notre angoisse s’exprime aussi par la volonté d’une alimentation rationnelle. L’entrcc de la majorité d’entre nous dans ce rêve d’alimentation rationnelle se fait par l’obsession pondérale. ( « est parce que, à la différence des sociétés de disette, nos canons de beauté sont plus maigres que la moyenne de l’espèce, que presque toutes nos compagnes et beaucoup d’entre nous atteignent à une curieuse ascèse par la recherche des « aliments qui ne font pas grossir ». Le développement des moyens de transmission des informations vers le plus grand nombre contribue à cette angoisse. Les régimes qui font maigrir, les biscottes diététiques, les huiles et margarines qui préviennent les maladies du cœur, c’est sous la forme de ces messages émotifs et menaçants que le public reçoit la diététique moderne. Cela est assez pour augmenter son angoisse mais insuffisant pour lui faire acquérir des habitudes alimentaires nouvelles et bénéfiques.
Il ambiguïté de notre comportement alimentaire tient à la coexistence de ces deux rêves (ou deux cauchemars) : celui de manger la nourriture naturelle du bon sauvage, celui de manger la nourriture bonne pour la santé de l’homme de demain.
Le manger naturel, c’est l’appellation contrôlée, mais aussi les boutiques spécialisées dans les aliments de l’Inde mystérieuse ou des céréales sans engrais ni tracteurs ; c’est ce pain mal bluté et indigeste, nourriture quotidienne des plus pauvres de nos grands-pères. Au passage à la limite, le sacrifice du sang au barbecue.
Le manger « bon pour la santé », ce sont ces aliments stérilisés, non louches par les mains, survitaminés, mais aussi dépourvus de graisse animale et de cholestérol, qui connaissent aux Etats-Unis un énorme développement, et dont la vague déferlante est arrivée en France et se propage en l ’urope.
L’évolution du comportement alimentaire se fera probablement d’une part vers ta glorification des aliments traditionnels porteurs des symboles ilu passe ; d’autre part, vers une diététique scientifique basée sur la génétique individuelle et l’extrapolation de quelques uns à tous. De toute façon l’expérience est passionnante car, pour la première fois dans l’histoire, une civilisation abandonne son mode alimentaire, et il n’est pas de civilisation lui puisse s’en passer.
Vidéo : Habitudes alimentaires
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