Asthme : La désensibilisation vaut-elle le coup ?
La désensibilisation consiste à injecter au patient allergique des doses croissantes de l’allergène qui est responsable de ses troubles pour le protéger. En présence de son allergène, le patient désensibilisé ne diverti plus faire de crise d’asthme. Il y aura en plus une mémoire de cette désen sibilisation, ce qui expliquera la persistance de ses effets. Les indications de cette technique sont une affaire de spécialistes et sont discutées. En effet, la désensibilisation pose certaines questions, en raison de ses contraintes et de ses dangers.
Pourquoi se désensibiliser contre un asthme qui ne s’exprime qu’au rythme de quelques crises par an ? Contre quoi se désensibiliser lorsque l’on est sensible à plusieurs allergènes, sans que l’un d’entre eux puisse lire formellement impliqué comme responsable de l’asthme ?
Ces questions méritent d’être posées car la désensibilisation va durer plusieurs années, au rythme d’injections hebdomadaires, sous stricte surveillance médicale, dans des conditions qui lui assurent une sécurité maximale. l’efficacité de ce traitement a été montrée pour les allergènes tels que les acariens, les pollens de graminées et d’arbres, ainsi que les venins d’hyménoptères (abeille, guêpe, frelon), le chat, le chien. Pour le reste des .allergènes, cette technique est en cours d’évaluation.
Comment cette technique “marche-t-elle” ?
L’administration des allergènes provoque une production d’lgC4, qui sont des anticorps, de la même famille que les IgE, mais ayant des propriétés différentes. La raison de la production d’lgG4 par rapport aux IgE est certainement liée à la dose de l’allergène qui est faible, et même liés faible au début.
Ces lgC4 ont des propriétés intéressantes. En effet, elles sont capables de bloquer la libération par les cellules responsables des réactions allergiques, des substances qui sont à l’origine de ces réactions. On les appelle donc les anticorps bloquants. Non seulement ces lgG4 apparaissent au début de la désensibilisation, mais leur production persiste après et tout au long de la désensibilisation. Il est donc tentant de rattacher l’effet de la désensibilisation à la production de ces lgG4.
L’association d’un allergène avec une lgG4 correspondante a montré son intérêt dans le traitement du rhume des foins. Si ces résultats sont expérimentaux, ils laissent entendre que la désensibilisation est promise à un bel avenir, en parallèle à notre meilleure connaissance des réactions allergiques. La voie orale en est un exemple.
Actuellement, la désensibilisation doit obéir à des règles strictes, sachant qu’il existe 2,5 % d’accidents sérieux, de type choc anaphylactique. Cela explique que cette technique soit peu utilisée dans certains pays. Ces pays n’ont pas formé de spécialistes en allergologie, ce qui ne permet pas d’assurer cette désensibilisation avec le maximum d’efficacité et de sécurité.
En France, une désensibilisation doit se faire sous surveillance médi¬cale, en état de parfait équilibre clinique. Avant chaque injection, seront évalués l’état des poumons, la réaction à une injection précédente et le débit expiratoire de pointe. On vérifiera qu’il n’y a pas eu de ft-bloquant introduits, que le flacon a été contrôlé, et que le carnet ne signale aucun incident. Après chaque injection, la surveillance sera d’au moins trente minutes et plus, s’il y a eu une réaction locale au point d’injection. Il faut que le patient n’ait pas fait de crise et qu’il n’ait pas eu d’infection récente.
Une étude récente confirme que la désensibilisation contre les venins d’hyménoptères est efficace dans la prévention des réactions générales des patients après piqûre. En ce sens, rien de bien nouveau, surtout que ces auteurs confirment des résultats qu’ils avaient acquis dès 1974. En revanche, le fait intéressant de cette étude est que, pour ces auteurs, la désensibilisation contre les venins d’hyménoptères n’est pas nécessaire chez les enfants qui y sont allergiques. Cette étude, bien faite, a une conclusion provocante. En fait, la comparaison -des deux groupes d’enfants, désensibilisé et non désensibilisé, montre que le taux de réactions aux piqûres de guêpes menaçant la vie est nul, que ces réactions sont générales mais non extrêmes. Comme il n’y a pas de risque de mort, ces auteurs concluent à l’inutilité de cette désensibilisation. Ces résultats sont donnés chez l’enfant dont le risque de développement de réaction mortelle est quasi nul. Ceci n’étant pas vrai pour l’adulte, il ne faut pas transposer directement chez l’adulte les résultats de cette étude. Nous ne voulons pas trancher sur un sujet qui fait l’objet d’un débat entre spécialistes. Ce n’est pas le propos de ce livre. Néanmoins, nous voulons montrer qu’il existe des approches différentes, et que rien n’est définitif sur ce sujet. Il faut en fait, tout en intégrant ce type de résultat, tenir compte du patient, de son histoire, de ses craintes, de son environnement, du risque de piqûre, etc.
La désensibilisation par voie orale semble être très prometteuse par son capacité et la diminution des contraintes qu’elle induit. Cette technique va bouleverser notre approche dans ce domaine. Enfin, il a été récemment suggéré qu’une désensibilisation préviendrait une sensibilisation à d’autres allergènes.