Thérmalisme du bénéfice , risque à l'utilité
Efficacité des cures thermales
L’évaluation des bénéfices commence par celle de l’efficacité de la thérapeutique dans les indications revendiquées.
Il est obligatoire d’utiliser la procédure de l’essai thérapeutique contrôlé. C’est, en effet, de la comparaison entre une série traitée et une série «contrôle» que pourra être déduite l’influence du traitement appliqué, à l’aide de calculs (statistiques). Par ailleurs, il faut s’efforcer d’assurer la comparabilité des deux séries tout au long de l’étude (allocation aléatoire du traitement, insu du thérapeute et de l’examinateur, voire du patient lorsqu’on dispose d’un placebo du traitement thermal).
L’emploi de la procédure de l’essai thérapeutique contrôlé est récent dans le thermalisme. Cependant un certain nombre d’essais fournissent aujourd’hui des données scientifiques fiables en relation avec de bons niveaux de preuves. Il s’agit d’études pragmatiques. Les difficultés méthodologiques rencontrées sont celles des thérapeutiques non médicamenteuses qu’aucun placebo ne peut simuler.
La présentation qui va suivre privilégiera la randomisation, bien que l’allocation aléatoire du traitement ne représente qu’un des critères de valeur d’un essai thérapeutique [31].
Rhumatologie
En rhumatologie, les études ont été effectuées par des équipes de chercheurs qui ont appliqué des méthodologies différentes.
Études randomisées
Les auteurs de l’institut d’hydrologie de l’Université de Nancy (F. Constant, F. Guillemin, J.-F. Collin, M. Boulangé) ont utilisé la méthode du recrutement sur place dans les stations, avec gratuité des soins, et du tirage au sort de la date de la cure pour la constitution des deux séries&à comparer : cure immédiate pour les sujets de la série traitée, cure différée de 3, 6, ou 9 mois, selon les études, pour les sujets de la série témoin, servant de contrôle à la première pour la période antérieure à la cure. Ils ont choisi la lombalgie chronique comme pathologie cible et pris comme critères de jugement des tests quantifiant la douleur, la raideur, la gêne fonctionnelle, la qualité de vie, et la consommation de médicaments antalgiques. L examinateur était unique et extérieur à la station. II intervenait en aveugle, ne sachant pas à quelle série appartenaient les patients. Les auteurs ont appliqué cette méthode aux stations de Bains-les- Bains (102 patients) [191, Saint-Nectaire (121 patients) [6] et Vittel (224 patients) [7]. Les résultats sont favorables à la cure de façon statistiquement très significative pour tous les critères à 3 semaines et pour certains d’entre eux à 3, 6, ou 9 mois dans les trois stations.
Des chercheurs de 1 hôpital Cochin [22] ont employé une méthode voisine pour évaluer l’efficacité de la cure rhumatologique à Vichy, en tirant au sort la date de la cure (cure immédiate versus cure différée). Le recrutement n’était pas fait sur place mais à distance de la station, dans la région parisienne, de façon que la population concernée soit la plus représentative possible de la population habituelle des curistes. La pathologie cible a été 1 aithrose de la hanche, du genou, ou du rachis lombaire.
Les examinateurs ont été les médecins recruteurs. Les critères de jugement ont été la douleur, le handicap fonctionnel (index de Lequesne pour la hanche et le genou, échelle de Main et Waddell pour le rachis lombaire), un index de qualité de vie (AIMS), et la consommation d’antalgiques et d’anti-inflammatoires non stéroïdiens prise comme critère principal. Ces critères ont été appliqués avant la cure ou à l’entrée dans la période contrôle, et 3 et 24 semaines après. Un total de 188 patients (rachis lombaire : 95, genou : 64, hanche : 29) ont été inclus dans l’étude (groupe thermal : 91, groupe contrôle : 97). Les variations des critères de jugement après 6 mois ont montré une amélioration en termes de douleur, de handicap fonctionnel et de qualité de vie, avec une réduction significative de la consommation de médicaments (antalgiques et AINS) dans le groupe thermal.
A Aix-les-Bains, les auteurs du Centre de recherches rhumatologiques ont appliqué la méthode du recrutement sur place [16]. Ils ont centré l’investigation sur une seule technique adaptée à une pathologie circonscrite : le berthollet dans l’arthrose de la main. Le berthollet, étuve locale distribuant un brouillard d’eau thermale à 42 °C, a été évalué contre une autre thérapeutique, une pommade à l’ibuprofène, validée dans cette indication. La répartition des séries a été faite par tirage au sort parmi les 116 patients recrutés par voie de presse et d’affiche qui répondaient aux critères d inclusion. Un médecin examinateur unique a vu les patients à trois reprises en aveugle, à l’entrée, à 3 semaines, et au bout de 6 mois. Les
Thermalisme : du bénéfice/risque à l’utilité 41 principal, l’EVA de la douleur, la force de préhension, l’amélioration de l’index de cotation topographique d’une main rhumatismale (ICTMR) conçu pour l’étude, le diamètre des nodosités mesuré par des anneaux de bijoutier, l’opinion de l’examinateur. Les résultats ont apporté la preuve très significative d’une amélioration dans la série berthollet supérieure à celle de la pommade, à l’issue de la période de traitement de 3 semaines pour tous les critères, et pour 3 d’entre eux dont le critère principal à 6 mois.
À l’étranger, plusieurs essais thérapeutiques randomisés ont été effectués en rhumatologie. Ils ont surtout été le fait d’auteurs israéliens. Elkayam et <il. |9J ont étudié l’effet de l’eau et de la boue d’une source de Tibériade sur un groupe de 19 patients atteints de polyarthrite rhumatoïde, comparés il 22 témoins traités à l’eau ordinaire, sans boue, et suivis pendant 3 mois.
l ’amélioration obtenue dans le groupe thermal est un peu plus complète.
Sukenik et al. ont effectué plusieurs essais thérapeutiques sur l’eau de la mer Morte chez des patients atteints de polyarthrite rhumatoïde. Une première étude [24] porte sur quatre groupes de 10 patients dont le traitement a été affecté par tirage au sort : soit bains sulfurés, soit applications de boue, soit les deux, ou absence de traitement pour constituer des témoins. Trois mois après, il n’est observé d’amélioration, et de façon similaire, que dans les trois groupes traités. Une autre étude |27] porte sur 30 patients ; l’eau de la mer Morte est testée contre une eau salée reconstituée et se montre plus active qu’elle. Dans une étude sur la boue |25], 28 patients sont répartis en deux groupes de 14 par tirage au sort : le premier est traité par la vraie boue et le second par une boue lavée et moins concentrée. A 1 et 3 mois, la vraie boue se montre plus active.
Les mêmes équipes ont étudié aussi l’action du traitement thermal sur l’arthrose du genou. Sukenik et al. [26] ont réparti 26 patients en 2 groupes de 13, traités par des bains quotidiens d’eau salée pendant 2 semaines, obtenus avec le sel de la mer Morte dans un groupe et avec du NaCl dans l’autre. L’amélioration à 1 mois est plus nette dans le groupe qui a été au contact des sels de la mer Morte.
Wigler et al. [32] ont réparti 33 patients en 3 groupes exposés à l’association de bains et d’applications de boue qui pouvaient être soit les produits thermaux authentiques, soit des produits reconstitués. Les conclusions sont en faveur des produits authentiques.
En Hongrie, Konrad et al. [20] ont comparé trois techniques de balnéothérapie avec une eau thermale chaude chez 158 patients souffrant d’une lombalgie datant d’au moins 3 mois : bains, tractions sous l’eau, et massages sous l’eau. Un groupe de 53 patients tirés au sort servait de témoin. Une amélioration est notée à 1 mois et à 1 an chez les sujets traités des 3 groupes, mais pas chez les témoins.
D’autres auteurs hongrois [28] ont étudié l’action de bains chauds chez.