Souffrir d'incompréhension
Le sens que l’on donne à une situation émotionnelle ne suffit pas toujours à canaliser la totalité de la tension qu’elle suscite. La persistance de l’inconfort malgré le sens construit est souvent le résultat d’une incompréhension réciproque. En effet, bien qu’elle soit provoquée par un vécu interne, la souffrance a aussi une dimension relationnelle. Une émotion adresse un message à l’autre et nécessite un accueil. Quand elle est comprise et qu’elle reçoit une réponse, la tension disparaît. Parfois, la manière gauche de l’exprimer, au lieu de favoriser la communication, la bloque. Prenons le cas de l’agressivité. L’extérioriser dans un « agir » impulsif, en criant ou en frappant sur un objet, par exemple, devrait en principe entraîner un certain soulagement puisqu’une partie de la tension est évacuée. Mais bien souvent, un tel geste met l’autre sur la défensive, provoque sa colère et envenime le conflit. Au lieu du soulagement escompté, l’individu voit son malaise persister du fait de l’incompréhension qui augmente. Exprimer son émotion de manière à être entendu demande une certaine habileté qui n’est pas donnée à tous. L’agir expressif de la colère permet de la signifier à l’autre sans couper la communication. Une inhalation brusque d’air suivie d’un blocage en inspiration forcée, les yeux qui se froncent, le visage qui se colore pendant que la parole se suspend indiquent clairement à notre vis-à-vis ce que l’on ressent sans l’agresser directement comme risquerait de le faire un passage à l’acte. Le message clair, exprimé avec une intensité modérée, même s’il crée un certain malaise chez le protagoniste, l’incite à modifier son approche, à s’ajuster à ce qu’il perçoit. Une saine communication demande aussi que l’on soit capable d’exprimer en mots plutôt qu’en actes ce que l’on ressent de manière à favoriser l’échange et non pas à le bloquer. Il n’est pas simple d’exprimer verbalement une émotion qui surgit comme une impulsion. L’agir expressif, tout en signifiant immédiatement à l’autre ce qu’on éprouve, permet de contenir l’émotion le temps nécessaire pour que les centres supérieurs du cerveau la traduisent en images mentales sur lesquelles on pourra mettre des mots.
Il peut arriver aussi que, même si on exprime calmement et clairement notre sentiment, celui à qui il s’adresse le perçoive mal parce qu’il l’interprète à la lumière de sa subjectivité. Ici aussi, l’incompréhension qui en découle peut faire persister le malaise, et ce, même si l’émotion a du sens pour le psychisme et qu’elle a été exprimée correctement. Ces situations, lorsqu’elles persistent, ont un effet destructeur quand le malaise devient trop intense. La nécessité d’être entendu, couplée à l’impossibilité de l’être, génère le sentiment de se trouver dans une impasse, ce qui peut conduire au désespoir et à î autodépréciation. Au contraire, une relation où la personne se sent comprise, accueillie avec sa souffrance et appuyée dans sa recherche de sens peut avoir un effet revitalisant qui l’aide à sortir de l’impasse, la souffrance naît dans l’intersubjectif, mais c’est aussi dans une relation qu’elle peut se résoudre, d’où l’importance de consulter une personne compétente quand la douleur morale nous submerge.
Une souffrance en mal de sens peut revêtir différents visages. Parfois, le versant moral est à l’avant-scène ; à d’autres moments, c’est le corps qui porte le mal-être. Au cours des chapitres suivants, ms allons explorer quelques-uns de ces visages et tenter de voir iqpeDes émotions ont été écartées et comment le travail de la pensée Ifgot aider à sortir de l’impasse afin de retrouver un mieux-être.