Pourquoi l'alimentation actuelle augment-t-elle le diabète ?
L’homme occidental, devenu sédentaire, a réduit fortement sa consommation de glucides complexes, et cela a paradoxalement favorisé une augmentation considérable des situations d’intolérance au glucose, caractéristique du diabète de type 2. Cette maladie métabolique diffère du diabète classique dont l’origine est la destruction précoce des cellules du pancréas chargé de sécréter l’insuline. Cette hormone a un rôle indispensable pour favoriser l’utilisation du glucose, principalement dans deux grands territoires, les muscles et le tissu adipeux. Ainsi, après un repas, il est nécessaire de stimuler l’utilisation du glucose pour normaliser la glycémie, et l’insuline joue un rôle clé dans cette régulation. L’effet de cette hormone est facilité si les glucides sont lentement absorbés et ne sont pas accompagnés d’une trop grande quantité de lipides. C’est pourquoi le développement du diabète de type 2 est favorisé par une mauvaise gestion de la qualité des glucides et de leur accompagnement en lipides. Le simple fait de remplacer systématiquement et à long terme une partie des lipides de la ration alimentaire par des aliments glucidiques complexes de bonne qualité nutritionnelle peut avoir des effets favorables dans la prévention du diabète de type 2, le plus fréquent, celui qui survient chez les sujets âgés. Ce mode alimentaire permet aussi d’éviter la surcharge pondérale qui joue elle-même un rôle clé dans le développement de ce type de diabète.
La prévalence du diabète de type 2 est en très forte augmentation dans le monde (de 100 millions actuellement, elle pourrait atteindre 300 millions dans dix ans). En France, cette pathologie atteint 3 % de la population, soit environ 1,8 million de personnes, et nous sommes loin d’être le pays le plus touché. Ce type de diabète correspond schématiquement à un état de résistance à l’insuline souvent compliqué de désordres dans la sécrétion pancréatique de cette hormone. L’insuline devient moins efficace pour contrôler la glycémie, en particulier parce que les acides gras provenant de l’excès lipidique environnant, celui du régime alimentaire ou celui des graisses corporelles, perturbent l’action de l’insuline.
Dans 75 % des cas, c’est au surpoids et à l’obésité que l’on attribue le diabète de type 2, qui est devenu, et de beaucoup, le plus fréquent (neuf cas sur dix). Ce diabète touche maintenant des sujets de plus en plus jeunes (moins de vingt ans), alors que l’on pensait qu’il fallait plusieurs dizaines d’années de déviation métabolique pour l’induire. Pour qualifier cette nouvelle épidémie, les scientifiques ont inventé le mot de diabésité pour associer les deux syndromes de diabète et d’obésité. La brusque augmentation du diabète dans un très grand nombre de pays, et surtout chez des populations migrantes habituées à des nourritures rustiques, est fortement liée à l’occidentalisation des modes de vie, à l’industrialisation alimentaire et à la sédentarité. Il est surprenant que le bouleversement des facteurs environnementaux aboutisse à des évirations cellulaires et moléculaires aussi spécifiques que celles u diabète.
Dans ce syndrome, la liaison de l’insuline à son récepteur perd de son efficacité, elle ne parvient plus à stimuler l’utilisation u glucose dans les tissus sensibles tels que les muscles ou les tissus adipeux. De plus, cette hormone n’est plus capable de moduler la synthèse de glucose par le foie qui se met à produire trop e glucose, même lorsque les apports digestifs pourraient suffire l’organisme. Le mauvais contrôle de la glycémie, après le repas t même à jeun, maintient une imprégnation trop forte des tissus par le glucose, entretient un processus de glucotoxicité aboutissant ainsi à une glucosylation anormale de nombreuses protéines t à une production excessive de radicaux libres.
Beaucoup de personnes ignorent qu’elles sont diabétiques u pré diabétiques parce que la présence d’une quantité légèrement trop importante de glucose dans le sang ne provoque pas e symptôme évident. Les personnes en surpoids, avec un tour e taille très élevé, une forte répartition des graisses au niveau u ventre, sont, pour la plupart, prédisposées à un diabète de type 2. À titre d’exemple, les hommes qui ont un tour de taille supérieur à 1 mètre présentent un risque majeur de développer, plus ou moins long terme, cette maladie insidieuse. L’élévation e la glycémie semble toxique pour les vaisseaux et les micro aisseaux ; ainsi, le diabète s’accompagne de complications vasculaires au niveau des reins, des yeux, du système nerveux et cardio-vasculaire. Cette pathologie est la première cause de cécité et de troubles visuels, d’amputation d’un pied ou d’une jambe et même de l’impuissance masculine. Avec un diabète, le risque d’avoir un infarctus du myocarde, un accident vasculaire cérébral ou une insuffisance rénale devient très élevé. Changer e mode de vie, d’alimentation, accroître les dépenses physiques e doit pas rester des vœux pieux et concerne une large partie de la population.
Compte tenu de la susceptibilité particulière de certaines populations, les biologistes ont recherché les gènes de sensibilité
pouvant rendre compte de l’expression d’un phénotype diabétique chez certains sujets. En fait, pour le diabète, comme pour l’obésité, il existe principalement un profil multi génique de prédisposition et non une origine génétique unique du diabète. Tout se passe comme si les bouleversements des facteurs environnementaux, des habitudes alimentaires permettaient de mettre en évidence les populations ou les sujets les moins adaptés aux nouvelles conditions de vie ou, réciproquement, les plus adaptés à des modes de vie traditionnels. Avec une activité physique élevée et des aliments naturels peu transformés, les chances de développer un diabète deviennent infimes.
Pourquoi l’alimentation actuelle est-elle devenue diabétogène ? Sûrement à la suite d’un apport trop élevé de matières grasses visibles ou cachées (40 % de l’énergie totale), de sucres purifiés ou de céréales fortement raffinées, une consommation insuffisante de glucides complexes lentement digérés (pâtes, légumes secs, riz et pain complet) et de fruits et légumes. Dans ces conditions, l’offre en produits transformés fournit ainsi une énergie parfaitement assimilable trop faiblement accompagnée de micronutriments.
Les excès d’apport lipidique créent une forte compétition entre glucose et acides gras pour leur utilisation énergétique. Cette compétition est d’autant plus grave que l’absorption glucidique est rapide, nécessitant une intervention très puissante de l’insuline pour assurer le maintien de la glycémie. L’effet bénéfique de l’exercice physique est largement lié à la stimulation de l’utilisation des acides gras par les muscles, ce qui évite qu’ils soient en compétition avec le glucose.
Il existe aussi un lien très fort entre le développement du diabète et la mauvaise densité nutritionnelle des régimes en minéraux et micronutriments, d’où le rôle extrêmement néfaste des sucres purifiés, des produits raffinés et de tous les aliments riches en calories vides. Les rôles protecteurs de la fraction non énergétique des produits végétaux pour la prévention du diabète sont de nature très diverse et bien peu pris en considération : effet de la matrice des aliments pour ralentir la vitesse d’absorption du glucose, effet des antioxydants pour prévenir les altérations cellulaires et moléculaires provoquées par les radicaux libres et une imprégnation trop élevée de glucose, effet des vitamines pour faciliter l’utilisation énergétique du glucose et des acides gras, effet des minéraux et des micronutriments pour assurer une protection vasculaire.
Il existe donc un lien de cause à effet entre la sédentarité, l’offre des supermarchés en aliments énergétiques de faible valeur nutritionnelle et le développement du diabète de type 2, entre des modifications environnementales apparemment très générales et des événements cellulaires et moléculaires très précis et très sophistiqués. Cela signifie tout simplement que notre organisme n’est pas adapté à des conditions environnementales si particulières par rapport à l’histoire de l’humanité.
Connais-toi toi- même
Puisque nos dépenses individuelles, notre environnement et nos modes de vie varient fortement, il revient à chaque individu, diabétique ou non, d’adapter la charge glycémique de son alimentation à son mode de vie, à ses besoins nutritionnels en ajustant les proportions des aliments pourvoyeurs d’amidon et des produits végétaux bien moins riches en glucides tels que les fruits et légumes. Il peut sembler paradoxal, pour les sujets diabétiques, de se sentir encouragés à consommer en relative abondance des produits végétaux de bonne qualité nutritionnelle, cependant ils doivent faire preuve de plus de rigueur dans leurs choix alimentaires.
Les quantités de produits riches en amidon à consommer augmentent théoriquement avec le niveau des dépenses physiques. Pour ceux ou celles qui fonctionnent avec des apports caloriques alimentaires très faibles, il est important de réduire très fortement les calories inutiles (le sucre, les matières grasses cachées), avant de diminuer le pain, le riz, les légumes secs. Pour tous, la consommation de fruits et légumes doit être le plus élevée possible avec un strict minimum de 300 g de fruits et de 300 g de légumes par jour.
Le pain, les féculents, tout ce qui évoque l’amidon revêt, pour une bonne partie du public, un caractère trivial, de lourdeur, de fadeur, à l’inverse de beaucoup d’autres mets parés d’une image plus noble, voire festive. Il est important de corriger
cette vision générale. Les sources d’amidon ne sont pas des aliments d’accompagnement secondaire (du pain pour déguster le fromage, des pommes de terre pour accompagner la viande, des lentilles pour servir la saucisse), ils constituent la base de notre alimentation. Par contre, les produits céréaliers et les divers féculents ont effectivement besoin pour équilibrer leurs qualités organoleptiques ou nutritionnelles d’être associés, relevés, enrichis par des produits complémentaires : viandes, fruits et légumes, matières grasses, herbes, épices, aromates. Si l’accompagnement en viandes ou matières grasses gagne à être plutôt modéré, l’association avec les fruits et légumes devrait être le plus généreuse possible. Cela est nécessaire pour disposer d’une panoplie suffisante de phytomicronutriments, beaucoup moins abondants dans les produits amylacés que dans les autres produits végétaux.