Les risques des cures
La population qui fréquente les stations thermales est plutôt âgée (65 ans en moyenne en rhumatologie), souvent composée de personnes seules, et on peut penser que le concept de pathologie liée aux voyages (civelle associative) s’applique particulièrement à elle. Il faut s’attendre, du seul fait de éloignement du domicile et d’un changement des conditions habituelles de vie, à une augmentation du nombre de traumatismes, d’épisodes infectieux, de troubles vasculaires, et de pathologies diverses. D’où la nécessité de comparer les curistes avec des personnes de même âge et éloignées un aussi long temps de chez elles, pour pouvoir imputer avec certitude un événement pathologique à la thérapeutique thermale.
Aucune enquête ne l’a fait. Il n’est donc pas possible de répondre avec certitude sur les effets secondaires de la thérapeutique thermale, c’est-à- dire sur l’imputabilité à la cure des incidents rencontrés sauf pour quelques complications ciblées. Ces incidents, toutes causes confondues, sont d’ailleurs peu fréquents et bénins pour la quasi-totalité.
Une étude récente, toutefois, a cherché à appliquer au thermalisme une méthode d’imputabilité des effets indésirables des médicaments [8], Chez 1 794 curistes observés en 1 mois à Bagnères-de-Bigorre
ORL : 24 %, PSY : 20 %), il a été rapporté 48 événements indésirables par les infirmières et 22 par les médecins. L’imputabilité à la cure a été jugée plausible 6 fois (0,33 % des curistes) et vraisemblable 6 autres fois.
Quatre études précédentes avaient recensé les pathologies de rencontre apparues au cours de la cure thermale. L’une a concerné les épisodes infectieux survenus en 1989, 1990, et 1991 chez les curistes de Luchon [30] (3/4 ORL, 1/4 RH) ; une autre a surveillé les infections observées chez les curistes de La Bourboule [12] (3/4 d’enfants, voies respiratoires/ORL pour plus de 80%) en 1991 et 1992, et Saint-Nectaire en 1992; une troisième a exploré l’ensemble des pathologies de rencontre chez 5 782 curistes d’Aix-les-Bains (RH) et Aix-les-Bains-Marlioz (ORL) en 1992 [15].
Dans cette dernière étude, il a été assuré une exhaustivité par le numérotage des fiches remises aux médecins. Les données suivantes en proviennent. Les pathologies observées appartenaient aux domaines neurovégétatif, vasculaire, ou infectieux.
Dans le domaine neurovégétatif, des troubles ont été observés chez 5,74 % des curistes en moyenne avec, s’agissant de troubles bénins, des variations importantes dans les déclarations d’un médecin à l’autre : insomnie, asthénie, angoisses, céphalées, nervosité… Ces troubles font partie de ce qu’il est convenu d’appeler la «crise thermale» parfois observée soit au tout début, soit à la fin de la 2e semaine de la cure [21]. Cette crise comporte aussi une réactivation de la pathologie initiale notée ici chez 4,65 % des patients.
Dans le domaine vasculaire, les troubles ont consisté en accidents vasculaires cérébraux transitoires (0,07 %), en crises d’angor (0,16%), et en complications veineuses (0,52%) qu’il s’agisse d’œdème de jambe, de phlébite variqueuse, d’hypodermite variqueuse, ou d’hémorroïdes. L’érysipèle a été compté dans cette catégorie (0,05 %).
Quant aux pathologies infectieuses, elles se subdivisent en réactivation d’affections préexistantes (sinusite, bronchite) surtout signalée dans le thermalisme ORL; en épidémies de rencontre d’allure virale, probablement facilitées par la promiscuité dans les thermes ; et en manifestations pathologiques sous la dépendance de germes pathogènes présents dans les établissements, champignons ou bactéries, responsables d’infections nosocomiales.
A côté des mycoses (0,67 %) répondant à une réactivation de lésions anciennes dans la moitié des cas, les germes impliqués sont des bactéries de l’environnement dont toutes ne sont sans doute pas connues. Deux sont surveillées par des prélèvements bactériologiques réglementaires : Pseudo- monas, responsable de folliculites, de conjonctivites et d’otites, et Legionella.
Les Legionellœ sont des bactéries de l’environnement, très répandues et très inconstamment pathogènes. Elles aiment les eaux chaudes et se rencontrent facilement dans les eaux thermales [1], Elles sont sensibles au chlore et aux températures supérieures à 56 °C mais difficiles à éradiquer complètement.