Hydrotherapie externe et interne et ses téchnique thermale
Hydrothérapie externe
Elle vise à mettre l’eau thermale et ses dérivés en contact avec la peau et les muqueuses. Elle comprend donc non seulement la voie externe cutanée des bains, des douches, et des applications de boues, de vapeurs et de ga/ thermaux, mais aussi la voie aérienne des inhalations et autres applications de la sphère ORL, ainsi que des instillations au contact des muqueuses rectales et vaginales.
Les mécanismes d’action sont chimiques, dans la mesure où des éléments thérapeutiques de l’eau sont absorbés par les muqueuses et la peau, et physiques en relation avec la chaleur, les stimulations mécaniques accrues par l’adjonction possible de massages manuels, et les propriétés physiques de l’eau.
L’action de l’hydrothérapie chaude est surtout manifeste en rhumatologie où entrent en ligne de compte l’effet décontracturant de la chaleur, l’effet anti-œdémateux et anti-inflammatoire des vapeurs et des gaz thermaux, elle la propriété de l’eau d’alléger la pesanteur et d’opposer une résistance aux mouvements qui fait l’intérêt de la kinébalnéothérapie.
Par le contact de l’eau chaude, l’application des produits thermaux, par les massages et les douches, les soins thermaux créent une stimulation cutanée étendue qui peut développer une action efficace contre la douleur |4]. On sait, d’après les travaux qui ont conduit à la théorie du portillon, que ces stimulations cutanées, qui empruntent des fibres myélinisées de gros calibre, ralentissent, voire interrompent le cheminement de l’excitation douloureuse au niveau médullaire où le message nociceptif arrive plus lentement par le canal de fibres plus fines ou non myélinisées.
Cette explication vaut aussi pour les affections douloureuses viscérales (foie, rein, abdomen) où elle complète les arguments des traités classiques évoquant des modifications circulatoires locales dans le sens d’un décon-gestionnement des organes profonds par la vasodilatation obtenue en surface dans leur territoire métamérique.
Les bains sont donnés chauds (37-38 °C) ou tièdes (33-36 °C) pendant une durée variable de 10 à 40 minutes. L’effet du bain peut être complété par l’action mécanique d’une douche sous-marine donnée par un soignant sur les régions indiquées par le médecin thermal, ou d’hydrojets automatiques, ou d’un bouillonnement d’air. Dans les bains carbogazeux pratiqués dans les stations d’eaux riches en gaz carbonique, l’air est remplacé par du C02 dont il a été montré qu’il diffuse dans l’organisme d’autant plus que la pression partielle du gaz est plus élevée et qu’il agit sur les débits artériels [1].
À côté des bains généraux il existe, dans certaines stations, des bains régionaux ou locaux notamment pour les mains (manuluves) ou les pieds (pédiluves).
L’eau thermale peut aussi s’appliquer, sous forme de compresses, spécialement en rhumatologie et en gastro-entérologie.
Les douches se prêtent à une variété plus grande encore d’applications selon la température, la pression, la forme et le débit des jets, la surface traitée, la position du patient, la durée du soin. Le jet est dit percutant lorsqu’il est donné à pleine puissance, ou brisé quand il est bridé par un doigt du soignant ou une palette, ou baveux en l’absence de pression et à l’aide d’un embout plat au contact de la zone à traiter comme cela se pratique notamment sur la région hépatique dans les stations des maladies digestives, ou lombaire en cas de lithiase urinaire.
Un jet fin est dit filiforme ; on l’emploie en dermatologie ou dans le traitement des gencives en stomatologie. Sous les fortes pressions parfois employées, il se comporte comme un véritable bistouri capable de décaper les lésions croûteuses ou hyperkératinisées.
En rhumatologie, la douche de près est déplacée par un soignant à proximité de la peau grâce à un embout muni d’une vanne permettant de faire varier la pression selon l’effet recherché.
La fragmentation des jets crée des pulvérisations qui s’emploient surtout en ORL et en dermatologie.
L’alternance de douches chaudes et froides est dite écossaise; elle se rencontre aussi dans les techniques dérivées de la Kneippthérapie. Le froid est utilisé pour son action vasoconstrictrice locale, ou pour obtenir une neurostimulation générale. Il s’emploie par courtes séquences de moins d’une minute.
D’autres douches ont une finalité très précise comme les douches nasales en ORL, les gargarismes, les aérosols éventuellement modifiés par des ultrasons (aérosols soniques) [3]. En gynécologie sont utilisées les douches vaginales, ou irrigations, données dans un bain à l’aide d’une canule à
double courant. En gastro-entérologie, on pratique des douches rectales en goutte-à-goutte; en urologie des lavages urétraux et vésicaux.
Dans la douche-massage, l’action mécanique de la douche est renforcée ou remplacée par celle d’un massage manuel qui peut être général, centré sur l;i région à traiter, ou local. Le massage général se fait sous un arrosage continu d’eau thermale, réalisé par des pommes de douches (douche de Vichy) ou par des embouts plats au contact du corps (douche d’Aix-les-Bains).
Les boues utilisées dans le thermalisme ont des origines diverses.
Certaines proviennent de dépôts proches des sources thermales (lit de l’Adour à Dax, bassin de Thau à Balaruc); d’autres sont reconstituées à partir d’argiles du commerce mélangées à l’eau de la station.
Les boues sont appelées péloïdes lorsqu’elles sont préparées longuement (plusieurs mois) dans un bassin à la surface duquel circule une eau minérale [5]. Ces péloïdes sont particulièrement riches en matières organiques.
Une argile est plus ou moins fine selon la taille des grains du minéral qui la constitue. A partir d’une certaine taille il ne s’agit plus d’argile mais de limon, puis de sable. L’eau est adsorbée par les grains. Une boue retient d’autant plus d’eau que ses grains sont fins et son pouvoir calorique en est d’autant plus élevé. La boue cède lentement sa chaleur ce qui signifie qu’elle se refroidit lentement et que la peau peut supporter des températures élevées, jusqu’à 55 °C sans brûlures.
Il se fait avec la peau des échanges de minéraux : l’eau interstitielle de la boue s’appauvrit en calcium et s’enrichit en ammonium au fur et à mesure des applications (étude Solargil). La pénétration cutanée de molécules organiques est présumée (acides aminés, vitamines, hormones végétales).
La boue est donnée en applications locales, ou illutations, à une température variant entre 35 et 50 °C, pendant une durée de 10 à 30 minutes, soit directement sur la peau soit enveloppée dans des supports divers. La réutilisation de la boue est discutée pour des raisons d’hygiène. Certaines stations réservent la même boue au même patient pendant toute sa cure, d’autres la pasteurisent, d’autres la rejettent après chaque usage. Pour les mêmes raisons d’hygiène, l’usage des bains de boue en baignoire se perd.
Les vapeurs sont des brouillards d’eau thermale recueillis au griffon de la source ou créés artificiellement par la pulvérisation de l’eau dans un courant d’air chaud. Elles sont utilisées en étuves locorégionales, ou générales, appelées berthollets à Aix-les-Bains [2], ou en étuves collectives, les vaporariums, ou en douches de vapeur au Mont-Dore et à La Bour- boule chez les asthmatiques.
Les gaz recueillis au griffon sont utilisés dans les stations dotées d’émanations de gaz carbonique ou d’hydrogène sulfuré, sous forme d’inhalations, d’insufflations tubo-tympaniques, de douches nasales au gaz carbonique, de bains gazeux secs, de bains carbo-gazeux à Royat où le gaz est amené dans l’eau du bain.
La kinébalnéothérapie s’est développée dans les stations qui traitent la rhumatologie et la neurologie. Elle est moins fondée sur la minéralité que sur les qualités physiques de l’eau qui allège la pesanteur et harmonise les mouvements. Elle convient particulièrement à la remise en fonction d’articulations douloureuses après un traumatisme ou une intervention chirurgicale mais aussi aux articulations arthrosiques, à certaines tendinites chroniques, aux rachis douloureux, et aux rétractions musculaires ou ligamenteuses.
Le plus souvent, la kinébalnéothérapie s’effectue de façon collective sous forme d’une gymnastique aquatique dont le même programme est attribué à tous. Quelques stations appliquent des programmes spécialisés à des groupes homogènes de patients, ou font pratiquer une mobilisation individuelle par des moniteurs immergés avec leur patient (Aix-les-Bains).
Hydrotherapie interne
Elle se fait par ingestion ou par injections.
L’ingestion est le mode habituel. La prescription médicale précise le choix des sources, la quantité de chaque prise, le nombre de prises par jour, leur horaire et les circonstances de leur ingestion, l’indication de la progressivité.
La posologie est de un à quelques verres par jour. Elle peut dépasser le litre dans les cures de diurèse qui tiennent compte aussi des circonstances de leur ingestion : eaux plus actives au griffon, ingestion en décubitus.
Les injections d’eau thermale sont rares (intramusculaires à Uriage, ou sous-cutanées). Les injections sous-cutanées de gaz se pratiquent dans les stations qui soignent les artériopathies avec le gaz carbonique.
Techniques thermales
Les services de la CNAMTS ont préparé, en annexe à la convention de mars 1997 entre les caisses d’assurance maladie et les syndicats d’exploitants thermaux, une «grille des appellations normalisées des soins thermaux». L’instauration de cette grille visait à mettre un terme à une certaine anarchie dans la définition et la dénomination des techniques thermales entre les stations, les même noms désignant parfois des techniques différentes alors que des noms différents pouvaient être appliqués à des techniques similaires.
Cette nouvelle grille réduit la centaine d’appellations qui figuraient à la nomenclature en 25 codes, dont chacun définit un soin thermal en précisant sa durée minimale, la qualification du personnel qui l’applique (soignant qualifié ou simple agent de service), le matériel utilisé, et les orientations thérapeutiques dans lesquelles il est employé.
Le code 10 désigne la cure de boisson, qui est donnée par un agent de service et intéresse toutes les orientations thérapeutiques.
Les codes 20 à 25 sont réservés aux bains; ceux-ci figurent dans toutes les spécialités avec des modalités parfois différentes. Le bain général simple, le bain local, le bain général avec gaz, le bain carbo-gazeux, et le bain général avec douche immergée sans intervention d’un soignant sont tous délivrés par un agent de service. Seul le bain avec douche sous-marine, code 25, nécessite la présence d’un soignant qualifié pour délivrer la douche sous-marine selon la prescription. Tous les bains ont la même durée minimale de 10 minutes.
Les codes 30 à 35 concernent les douches. Toutes les spécialités sont représentées. Les douches sont soit générales, soit locales et, dans chaque cas, délivrées soit par un soignant soit par un agent de service quand il suffit de mettre en route un appareil automatique. Elles durent toutes 3 minutes au minimum. Figurent aussi la douche térébenthinée de 3 minutes, donnée par un soignant, en rhumatologie, neurologie, ou maladies des voies respiratoires, et la douche intestinale en entérologie qui réclame le concours d’un soignant et dure 10 minutes.
Les codes 40 à 43 sont réservés aux boues. Il est distingué l’application de boue générale ou multiple de l’application de boue locale unique. Chaque application dure au minimum 10 minutes et demande la participation d’un soignant. Les spécialités qui utilisent la boue sont la rhumatologie, la neurologie, les voies respiratoires/ORL, la dermatologie, la gynécologie, les maladies de l’appareil digestif et de l’appareil urinaire. Il est ajouté la photo-illutation, en dermatologie, qui associe les applications de boue et l’exposition aux ultraviolets, et les compresses d’eau thermale qui durent 5 minutes et requièrent la présence d’un soignant.
Les codes 50 à 53 rassemblent les soins à base de vapeurs thermales : inhalation ou bain de vapeur collectif, aérosolthérapie individuelle, étuve locale ou générale, bain ou douche de gaz sec local ou général. Pour tous, la durée minimale est de 10 minutes. L’applicateur est un agent de service sauf pour l’aérosol manosonique en ORL qui réclame un soignant qualifié. Les spécialités concernées sont la rhumatologie, les maladies des voies respiratoires, la neurologie, et les troubles du développement de l’enfant. Les bains gazeux sont aussi utilisés dans les maladies artérielles, digestives et urinaires.
Les codes 60 à 62 concernent les soins délivrés par des kinésithérapeutes. La répartition se fait en soins collectifs (piscine de mobilisation, drainage postural en salle commune, rééducation respiratoire collective) rencontrés dans les orientations rhumatologie, neurologie et voies respiratoires, pour une durée minimale de 15 minutes, et soins individuels (massages, drainage postural individuel, rééducation respiratoire individuelle), rencontrés aussi en psychiatrie, phlébologie et maladies digestives et dont la durée minimale est de 10 minutes.
Conservent seuls leurs anciens codes les pratiques médicales complémentaires, délivrées par un médecin. On y trouve l’insufflation de trompe, la douche pharyngienne et la méthode de déplacement de Proëtz en ORL, les injections d’eau en rhumatologie, les injections de gaz en rhumatologie et maladies artérielles, la douche filiforme en dermatologie et stomatologie, la douche médicale en psychiatrie, le drainage manuel en phlébologie, et la columnisation du vagin en gynécologie.
Thérapeutiques complémentaire
De plus en plus de stations thermales offrent la possibilité d’aborder le traitement des patients qu’elles reçoivent par d’autres voies que la thérapeutique proprement thermale.
C’est ainsi que la diététique fait l’objet d’une formation collective ou de consultations privées non seulement dans les stations de l’obésité et des troubles métaboliques mais aussi dans celles qui soignent les rhumatismes ou l’insuffisance respiratoire.
Il en va de même pour les techniques de la relaxation training autogène ou sophrologie tandis que d’autres filières sont plus spécifiques : cures antitabac avec la pathologie respiratoire, écoles du dos et ateliers de l’ostéoporose ou de l’équilibre dans les stations rhumatologiques, ateliers de la mémoire en neurologie.
Cette extension de l’arsenal thérapeutique des stations thermales, au-delà de l’équipement thermal proprement dit, entre dans le cadre du concept de crénoréadaptation qui sera abordé aux chapitres 19 et 25.