Allaitement : plaisir, pudeur et tabou
Il est délicat d’aborder le thème du plaisir tant il peut prendre de formes différentes.
Il est le jardin secret de chacune, et si certaines femmes ne se retrouvent pas dans ces descriptions, qu’elles se rassurent : en ce domaine, les règles n’existent pas, mais le plaisir s’invente toujours ! Le plaisir de la femme qui allaite s’exprimera de mille manières. Nous en aborderons trois aspects, parfois distincts, parfois se chevauchant. Certaines femmes se réjouiront du plaisir sensuel de la tétée. Tous les sens en éveil, elles percevront globalement la chaleur des corps réunis, la douceur du contact des lèvres de l’enfant, de ses petites mains qui glissent sur son sein, le plaisir de la chanson de la tétée, de l’odeur de l’enfant. Plaisir de le voir heureux et confiant, niché en son sein. Un plaisir plus défini sera perçu par d’autres à l’éjection du lait. Si, dans les premiers temps, la succion des seins par l’enfant surprend par sa vigueur, elle peut être sensible, voire douloureuse, et devenir rapidement plaisante. L’éjection intervient au bout de quelques minutes de succion, annoncée chez certaines par un picotement, comme une vague montante ; le mamelon se gonfle, s’allonge et se tend. Toute cette énergie mobilisée dans les seins diffuse une douce chaleur à la surface de la peau maternelle, qui peut détendre sa gorge – elle déglutit – ou qui va s’étendre à la surface de son corps.
Pour d’autres femmes encore, la pulsation de la tétée va se prolonger dans leur corps et, comme la contrebalançant, éveiller la pulsation de l’utérus. Quand on vient d’accoucher, cette sensation peut même être douloureuse, l’utérus se contracte alors fortement pour reprendre son volume antérieur. Les douleurs vont s’estomper, les pulsations vont se poursuivre et s’imposeront à la perception de certaines femmes. Doivent-elles s’en inquiéter ? Qu’est-ce qui s’anime en elle ? L’onde
Quel que soit le type de plaisir ressenti, pourquoi ne pas le partager avec l’homme ? Pourquoi ne pas se lover, mère et enfant, dans les bras masculins et voyager à trois ? L’homme n’est pas un enfant de plus à nourrir. S’il assiste, d’abord timide, peut-être inquiet, mais bientôt touché par cette expression, quelle qu’elle soit, de l’énergie féminine, lui aussi va canaliser ses forces vitales, laisser son plaisir masculin s’animer.
Pudeur et tabou
Pudeur et tabou sont l’expression de nos peurs à l’encontre de ces souffles de vie qui nous animent et nous dépassent. Nos peurs de les laisser vivre en nous et de les accepter en l’autre…
Pudeur et tabou sont aussi l’expression d’un profond respect vis-à-vis de ce qui ne nous appartient pas encore ; une façon de maintenir ses forces à distance respectueuse. Le tabou touche à ce qui est sacré ou impur. En quoi la femme allaitant son petit est- elle une image taboue ? Est-ce une peur du caractère sacré de l’allaitement ? Le lait est-il alors manne céleste ? La femme en majesté deviendrait-elle déesse inaccessible et l’enfant angelot asexué et indifférencié ? Ou bien l’allaitement a-t-il un caractère impur car il est l’image du plaisir, la femme étant habitée des forces d’en bas, de l’énergie sexuelle féminine ? Et si l’allaitement était à la rencontre de ces deux expressions ? Mais où commence la pudeur ? Où sévissent les tabous ? Envers la femme elle-même quand elle s’interdit l’abandon au plaisir de la tétée. Tétées pudiques, témoins d’une relation à l’enfant aseptisée, elles sont souvent l’expression d’une peur des forces de vie enfouies en elle. Peur de s’y perdre, peur d’être prise et dévorée par les puissances d’en bas, de devenir ensuite une mère dévoreuse. Inquiétude grandissante de couler dans une fusion mère/enfant primitive et dévastatrice. Respectons ces défenses nécessaires de la mère pour qu’elle garde ses repères, se différencie de son enfant.
La pudeur face à l’homme, c’est aussi le respect de ses limites à lui. La femme peut s’offrir dans sa puissance féminine à la mesure de ce qu’il peut recevoir sans se noyer. La maternité est souvent vécue comme une initiation au monde des femmes. La mère manifeste le besoin que soit reconnu dans son corps cet événement qui a marqué sa chair. Alors, elle aimera laisser son corps s’exprimer sans retenue. Période privilégiée où elle se sent protégée. Cette impudeur joyeuse de la femme en maternité est peut- être à réserver à la compagnie des femmes.
Alors, entre plaisir, pudeur et tabou, où se situer ? Vécu dans l’intimité de la cellule familiale, le plaisir a toute sa place ; sa non- émergence est l’expression de nos peurs, de nos résistances, de notre cheminement à travers nos difficultés.
Quand vous choisissez d’allaiter parmi votre famille ou vos amis, l’environnement vous permet-il d’entrer dans cette relation corporelle à votre enfant ? Votre intimité sera-t-elle suffisamment respectée pour favoriser votre détente à l’un et à l’autre ? De même, si vous êtes dans un lieu public, l’entourage est-il suffisamment neutre ou bienveillant pour que cela n’interfère pas négativement sur votre relation à votre enfant ?
Apprenez à connaître l’image que vous renvoyez, les sentiments que vous éveillez, vous et votre petit, dans cette « tétée plaisir ». Face à l’autre, avez-vous quelque chose à prouver ? Car, alors, le plaisir manipulé devient objet de provocation. Comment va s’exprimer cette énergie mal canalisée ? Respectez les inquiétudes que vous pouvez soulever^ et faites confiance à votre bon sens pour vous guider.
Vidéo : Allaitement : plaisir, pudeur et tabou
Vidéo démonstrative pour tout savoir sur : Allaitement : plaisir, pudeur et tabou