Effet de la cure thermale
Dans le deuxième type d’essai [23], les auteurs ont évalué le bénéfice clinique d’une cure thermale, à moyen terme, dans l’arthrose du rachis lombaire, du genou et de la hanche. Un total de 188 patients, recrutés à distance du lieu de cure, a été réparti par tirage au sort dans deux groupes : le groupe cure (n = 91) et le groupe témoin (n = 97). Dans le groupe témoin, les patients restaient dans leurs conditions de vie habituelles. Dans le groupe cure, les patients séjournaient 21 jours dans la station thermale et bénéficiaient de divers soins thermaux dispensés pendant 18 jours. Les effets de la cure thermale ont été évalués, à 4 semaines et à 6 mois, par la mesure de : la consommation médicamenteuse d’antalgiques et d’AINS, l’intensité de la douleur, l’incapacité fonctionnelle et la qualité de vie mesurée par une version française d’une échelle générique, VArth- ritis Impact Measurement Scale (AIMS 2). À 4 semaines et à 6 mois, les patients du groupe cure comparé au groupe témoin, toutes localisations confondues, présentent une amélioration statistiquement significative de I intensité de leur douleur et de leur qualité de vie ainsi qu’une réduction significative de leur consommation d’antalgiques et d’AINS. Cette étude suggère l’effet bénéfique, à moyen terme, d’une cure thermale dans l’arthrose du rachis lombaire, du genou et de la hanche.
Les auteurs confirment l’intérêt des mesures de la douleur, de l’incapacité fonctionnelle, de la qualité de vie et de la consommation médicamenteuse dans l’évaluation des effets de la cure thermale.
Travaux évaluant les effets indésirables ou les complications des cures
Ils sont indispensables pour apprécier le rapport bénéfice/risque. Ils sont traités dans le chapitre 2.
Études mesurant l’impact économique de la cure thermale
Elles peuvent permettre d’évaluer le rapport coût/utilité. La rhumatologie compte une seule étude prospective comparative, réalisée par la Caisse régionale de l’Assurance maladie du Nord [1,2], Les résultats indiquent une
diminution du recours aux soins à visée rhumatologique chez les curistes
principalement chez ceux qui n’ont pas effectué de cure thermale l’année précédente mais l’économie globale réalisée n’apparaît pas suffisante pour compenser les dépenses induites par la cure. La méthodologie utilisée pour cette étude a toutefois fait l’objet de sérieuses réserves [14],
Indications
La crénothérapie s’adresse avant tout à la pathologie chronique. La prise en charge thermale vient soit en complément des autres thérapeutiques médicamenteuses ou chirurgicales, soit après échec ou contre-indication
sur plusieurs mois de la douleur, des capacités fonctionnelles et de la qualité de vie ainsi qu’une réduction de la consommation d’antalgiques et il’AINS. Ces paramètres représentent les critères de jugement principalement utilisés lors des essais cliniques thermaux.
Arthrose et pathologie dégénérative du rachis
I,’arthrose symptomatique représente de loin la première indication en rhumatologie, soit 80 à 90 % des motifs de cure.
L’évaluation de l’effet des traitements thermaux sur certaines localisations arthrosiques (rachis lombaire, hanches, genoux, mains) est particulièrement bien documentée par les essais comparatifs.
Arthrose lombaire et lombalgie mécanique chronique
La lombalgie chronique, qu’elle soit d’origine discale ou articulaire postérieure, avec ou sans radiculalgie chronique, apparaît comme une excellente indication de la cure thermale. Plusieurs études comparatives randomisées ont ainsi montré un effet bénéfique des traitements thermaux persistant de 3 à 12 mois après la cure sur la douleur, la consommation d’antalgiques et d’AINS, les capacités fonctionnelles et la qualité de vie des patients [6, 7, 17, 20, 23],
Coxarthrose et gonarthrose
Malgré les progrès de la chirurgie, la cure thermale garde ici toujours une place intéressante. Les indications sont surtout réservées aux patients en attente de chirurgie ou à ceux pour qui la chirurgie est contre-indiquée. L’effet bénéfique de la crénothérapie, mesuré lors d’essais comparatifs randomisés [5, 11, 23], se traduit par une amélioration rémanente d’au moins 6 mois pour les principaux paramètres cliniques évalués (douleur, indice fonctionnel de Lequesne, échelle de qualité de vie) et par la réduction de la consommation médicamenteuse. En cas de deuxième cure consécutive, cette amélioration semble pouvoir être maintenue pour le périmètre de marche et l’indice de Lequesne [10J.
Arthrose des mains
La crénothérapie apparaît comme une excellente indication pour la rhizarth- rose et/ou l’arthrose digitale symptomatiques. Un essai clinique randomisé récent a ainsi mis en évidence la supériorité d’un traitement par étuve locale ou «berthollet» comparé à l’application locale d’une pommade à base d’ibuprofène. Après trois semaines de soins, l’amélioration était significativement plus importante dans le groupe «berthollet» pour la douleur, l’indice fonctionnel de Dreiser, le gonflement articulaire et la force de préhension. A 6 mois, la force de préhension restait encore significativement améliorée dans le groupe «berthollet» comparé au groupe témoin [15]. Une étude antérieure avait suggéré, pour les mêmes paramètres cliniques, un effet symptomatique.
Autres localisations arthrosîques
Certaines manifestations douloureuses chroniques liées à des atteintes arthrosîques (cervicarthrose, dorsarthrose, arthrose des pieds) n’ont pas été encore évaluées. Le service médical rendu autorise à toujours les situer parmi les bonnes indications de la crénothérapie.
En pratique, la crénothérapie est un recours thérapeutique particulièrement intéressant :
— dans les formes polyarthrosiques car elle permet de traiter plusieurs articulations à la fois ;
— en cas de contre-indication ou d’intolérance à des traitements médicamenteux, notamment anti-inflammatoires ;
— en cas d’efficacité insuffisante des traitements prescrits.
Rhumatismes inflammatoires
Le recours à la crénothérapie dans le cadre des rhumatismes inflammatoires a toujours fait l’objet de controverses. Un consensus existe concernant I indication pour les formes «éteintes» avec raideurs et douleurs mécaniques séquellaires des destructions ostéo-articulaires. Toutefois, certains essais cliniques menés pour des formes actives de polyarthrite rhumatoïde [9, 25, 26, 28], rhumatisme psoriasique [27] et spondylarthrite [30] suggè- îent également un effet bénéfique prolongé de 1 à 3 mois avec amélioration des douleurs, de la durée du dérouillage matinal et de l’index articulaire de Ritchie. La cure ne peut cependant prétendre remplacer les traitements de lond de ces maladies et 1 indication doit obéir à certaines conditions : le patient doit faire sa cure en dehors des grandes poussées évolutives inflammatoires ou de vascularité associée et ne pas être traité par un traitement de fond immuno-suppresseur du fait des risques infectieux nosocomiaux. Les techniques thermales de soins doivent en outre toujours rester les plus sédatives possibles (massages doux évitant les articulations inflammatoires, mobilisation prudente en piscine…).
Suites de chirurgie ostéo-articulaire et séquelles de traumatismes ostéo-articulaires
Bien que non encore évaluée dans ce domaine par des études prospectives, la crénothérapie peut s avérer utile lors de la prise en charge :
– des lombalgies chroniques secondaires à une fibrose postopératoire ;
– des douleurs chroniques sur prothèses (principalement hanche et genou), à condition qu’elles ne soient pas liées à un sepsis ou qu’elles ne relèvent pas d’une reprise chirurgicale ;
– de certains retards de consolidation de fractures;
– de suites de traumatismes chez des sportifs, opérés ou non. Ces indica-
Autres indications
Certains états douloureux chroniques peuvent également bénéficier de l’effet antalgique prolongé obtenu par la crénothérapie. Les affections concernées sont :
les douleurs chroniques liées aux troubles de la statique rachidienne (scoliose, séquelles de tassements vertébraux ostéoporotiques). Elles bénéficient des techniques thermales sédatives ;
certaines tendinopathies chroniques, après échec des traitements médicaux classiques. Une étude par séries appariées concernant la pathologie liée aux lésions de la coiffe des rotateurs par conflit sous-acromial a comparé la cure thermale à une prise en charge hospitalière en service de rééducation. En fin de traitement, l’amélioration clinique et fonctionnelle est significa- I i ve de façon équivalente dans les deux groupes mais le coût journalier est en revanche quatre fois inférieur dans le groupe «cure thermale» [16] ;
la fibromyalgie ou syndrome polyalgique idiopathique diffus (SPID). Une étude randomisée comparant l’effet d’une balnéothérapie de deux semaines à l’absence de traitement a pu mettre en évidence, dans le seul groupe balnéothérapie, une amélioration significative et rémanente des douleurs sur quatre semaines [34] ;
– les syndromes algoneurodystrophiques ;
– la goutte chronique ne reste une indication de cure thermale rhumatolo- gique qu’en cas d’intolérance aux urico-inhibiteurs et aux uricosuriques, et d’arthropathies chroniques ;
– la chonclrocalcinose articulaire disséminée (CCAD) est une indication intéressante au titre d’arthropathies chroniques, de même que d’autres arthropathies chroniques secondaire.
Contre-indications
Contre-indications relatives
Certains soins sont contre-indiqués, mais non la cure, en cas de :
– insuffisance veineuse;
– intolérance aux piscines : phobie des piscines ;
– intolérance à la chaleur ; dermatoses non contagieuses.
Contre-indications passagères
Le moment de la cure doit être différé en cas de : rachialgies ou radiculalgies hyperalgiques ;
– dermatose étendue ou infectée ;
– phlébite ou chirurgie récente.
Contre-indications absolues
La cure est contre-indiquée en cas de :
-grandes insuffisances viscérales (cardiaques, pulmonaires, cérébrales..
– cancer ou infections en évolution ;
– immuno-suppression iatrogène (chimiothérapie…) ou non;
– psychoses ou démences séniles.
Principales stations thermales
Soixante-neuf stations ont l’orientation «Rhumatologie» reconnue prise en charge par la Sécurité sociale.
Parmi les stations françaises à orientation rhumatologique figurent D Aix-les-Bains, Balaruc, Gréoux-les-Bains, Ax-les-Thermes, Barbot Bourbonne-les-Bains, Vittel, Vichy, Uriage, Bains-les-Bains, Alleva les-Bams… .
En pratique, le choix de la station peut être guidé par :
-la qualité et 1 offre des soins (piscine, boue, massages, vapeurs) c varient selon l’équipement des stations. Nombreuses sont néanmoi celles qui disposent d’une panoplie complète de ces soins;
– en cas de polypathologie, l’association d’une autre orientation thérape tique que la rhumatologie.