Toxicologie alimentaire
Intoxications bactériennes
Le botulisme
Cette affection très grave est due à la toxine d’une bactérie anaérobie, le Clostridium botulinum. Le germe peut se développer dans les conserves préparées par les ménagères lorsque la stérilisation est insuffisante. En effet, les spores de Clostridium botulinum ne sont détruites qu’à un chauffage de 15 min à 120° ou 6 h à 100°. Par contre, la toxine est aisément détruite en 30 min à 80° et 10 min à 100°. Les sources d’intoxication les plus fréquentes sont les préparations de légumes, les jambons, saucissons et diverses charcuteries préparées de façon artisanale. Par contre, les méthodes industrielles de conserve permettent d’éliminer pratiquement tout risque.
Symptomatologie. — Après une incubation de I à 2 jours, la période d’invasion comporte nausées, douleurs abdominales, constipation, asthénie. La période d’état est caractérisée par trois ordres de troubles :
- oculaires (mydriase, paralysie de l’accommodation, diplopie, ptosis, strabisme);
- sécrétoires avec sécheresse de la bouche;
- moteurs avec paralysie de la langue, de la mastication, des sphincters, des muscles respiratoires.
Diagnostic. — Il se fait sur l’identification des germes dans la conserve incriminée. 11 y a six souches de Clostridium (A, B, C, D, E et I ), et il est indispensable de déterminer la souche en cause car le traitement repose sur l’administration de sérum spécifique. La souche E donne la plus grave maladie (35 p. 100 de mortalité).
Traitement. — Il est préventif (stérilisation correcte des conserves, rejet des boîtes bombées, cuisson prolongée des conserves familiales avant consommation), et curatif (administration de sérum polyvalent ou mieux spécifique lorsqu’on connaît la souche).
Les salmonelloses
La contamination se fait soit par porteurs de germes sains ou malades qui polluent le sol ou les eaux, soit par des aliments souillés : viande il’un animal infecté, viande souillée à « l’attendrisseur », œuf de cane, mollusques, poissons, gâteaux à la crème. Le germe est très sensible à la chaleur, détruit en 10 mn à 80°, une heure à 60°.
Symptomatologie. — Après une incubation de 8 à 12 h, apparaissent lièvre, douleurs abdominales intenses, vomissements, diarrhée fétide avec 8 à 15 selles jaunâtres par 24 h. Les troubles s’estompent en 2 à ■I jours, le sujet restant asthénique plusieurs semaines. Chez l’enfant, sont possibles septicémies, méningites, arthrites.
Diagnostic. — Il se fait généralement par la coproculture. Celle-ci isole le plus souvent le Salmonella typhi murium.
Traitement. — Il est essentiellement symptomatique. Ce n’est qu’en cas de forme grave, chez l’enfant notamment, qu’on aura recours au • liloramphénicol à dose très progressive. Le régime sera d’abord une diète hydrique avec compensation des pertes électrolytiques, puis strictement sans résidu.
Intoxications à staphylocoques
Ce sont souvent des intoxications collectives, dues à l’ingestion de viande contaminée (viande hachée + + +) de crèmes, de lait (mammite de la vache), de poissons. La contamination est souvent due à la manipulation des aliments par des sujets porteurs de staphylocoques dans leurs fosses nasales, ou atteints de panaris ou de furoncles. Les staphylocoques sont tués par chauffage à 70°; l’entérotoxine responsable des troubles est plus résistante (résiste à 100° pendant 30 mn).
Symptomatologie. — Les troubles apparaissent 1/2 h à 4 h apriS l’ingestion, brutalement : vomissements abondants, prostration, inconi* 1 tamment diarrhée; il n’y a pas de fièvre. L’évolution est presqin toujours bénigne.
Traitement. — Il est essentiellement préventif : ne pas acheter <lc viande hachée préparée à l’avance. Faire bouillir longuement le làil frais. Il n’y a pas de traitement curatif. Ce n’est qu’en cas de formes graves avec collapsus qu’un traitement symptomatique sera nécessaire.
Autres germes responsables de toxi-infection
- Clostridium perfringens (viandes, charcuteries contaminées).
- Bacillus proteus (œufs, charcuterie, préparations à base de pomme de terre).
- Entérocoques.
- Bacillus cereus (riz réchauffé).
Intoxication par les aliments végétaux
Champignons vénéneux
Il existe plusieurs syndromes :
Syndrome phalloïdien. — L’amanite phalloïde contient trois peptides très toxiques. La phalloïdine responsable de syndrome cholériforme est détruite par la cuisson; la phalline responsable de l’hémolyse, également détruite par la cuisson; et l’ammanitine, non détruite par la cuisson, mortelle par les lésions de nécrose hépatique et rénale qu’elle détermine. L’intoxication est mortelle dans 70 p. 100 des cas; les sujets qui survivent ont des séquelles graves (cirrhose).
Syndrome muscarinique. — L’amanite panthère sécrète la muscarine qui a une forte action parasympathomimétique : vomissements, coliques, hypersialorrhée, myosis, délire, bradycardie, paralysie respiratoire. Les traitements antagoniste et symptomatique sont efficaces.
Syndrome hémolytique. — Après ingestion de certains champignons sécrétant Vacide helvellique (détruit par chauffage à 60°).
Hallucinations. — Elles sont dues aux champignons sécrétant la psilocvbine.
intoxication par plantes diverses
Favisme. — Après absorption de fèves, les sujets porteurs d’un défi- i il congénital en glucose-6-phosphate déshydrogénase sont menacés il une anémie hémolytique. L’affection se rencontre dans le Bassin méditerranéen, surtout en Italie.
Pommes de terre. — Intoxication par la solanine, substance norma- h ment présente en petite quantité dans le tubercule, mais qui augmente il,ins certaines conditions (exposition à la lumière).
Miel. — Certains miels recueillis dans des régions où poussent des variétés particulières de rhododendrons (autour de la Mer noire), contiennent une substance responsable d’intoxication alimentaire bénigne.
Rhubarbe. — Intoxication en cas de teneur élevée en acide oxalique.
Épinards. — Ils peuvent être responsables chez l’enfant de méthémoglobine (due aux nitrites).
Intoxication cyanhydrique par certains végétaux : amandes amères, noyaux de pêche, abricots, cerises, manioc.
Intoxication par les serpentaires (ou maladie du lait de chèvre). — la substance toxique est le trématal, détruite par pasteurisation du lait.
La Ciguë. — Plante proche de l’anis, elle peut être ingérée par i crtains animaux pour lesquels elle est sans danger, mais les rend toxiques pour l’homme (cailles empoisonneuses).
Moisissures
Connus depuis longtemps (ergotisme), les syndromes dus à des toxines libérées par les moisissures ont eu récemment un regain d’intérêt avec les nllatoxines des tourteaux d’oléagineux (cf. p. 142).
Intoxication par les produits de dégradation des acides aminés
Les bactéries libèrent, à partir des acides aminés, des aminés responsables de manifestations allergiques ou toxiques graves.
Intoxication par l’histamine (produite à partir de l’histidine). — Elle est la mieux connue : elle survient surtout après ingestion de thon (frais ou conserve), de crustacés ou de coquillages. L’histamine résiste à la chaleur. Cliniquement, les signes apparaissent précocement après l’ingestion, avec malaises, céphalées, rougeur, œdème de Quincke, urticaire, hypotension. Les troubles sont atténués par les antihistaminiques.
Intoxication par la tyramine (produite à partir de la tyroxine), avec mydriase, hypertension, est le fait de certains fromages fermentés, surtout chez les sujets traités par un inhibiteur de la monoamine oxydase (IMAO).
Intoxication à la méthylamine (produite à partir du glycocolle).