Quelles sont les bonnes associations alimentaires
La complémentarité la plus importante en termes d’alimentation humaine, à l’échelon mondial, concerne les céréales et les légumes secs. Cette association permet de couvrir correctement les besoins en protéines puisque la composition en acides aminés des protéines céréalières (pauvres en lysine et riches en acides aminés soufrés) est complémentaire de celle des légumes secs (riches en lysine et pauvres en méthionine). Les céréales ont de plus un taux de protéines modeste (10 à 14% de la matière sèche) alors que celui des légumes secs est très élevé (aux enviions de 20 %). Les apports glucidiques de ces deux types de produits végétaux sont également complémentaires. L’amidon des produits céréaliers est très facilement digestible après cuisson, pouvant même conduire, dans certains cas, à des index glycémiques trop élevés (pain, riz blanc). Par contre, les légumes secs ont une teneur plutôt faible en amidon (environ 50 % de la matière sèche), et cet amidon fortement enchâssé dans un réseau fibreux et protéique est relativement résistant aux attaques pancréatiques.
Les produits céréaliers à base de riz et le blé (blé tendre ou blé dur) sont souvent très raffinés et bénéficient ainsi fortement d’un apport complémentaire de fibres en provenance des légumes secs. Par contre, certaines céréales (seigle, avoine, orge) naturellement riches en fibres solubles fermentescibles ne nécessitent pas un apport supplémentaire en fibres de légumes secs.
Les produits céréaliers raffinés sont peu riches en potassium, en oligo-éléments, en vitamines B alors que les légumes secs ont des teneurs beaucoup plus élevées en ces éléments. On peut donc recommander dans les pratiques culinaires d’associer le plus fréquemment possible produits céréaliers et légumes secs comme cela s’est toujours fait de par le monde sous la forme de plats à base de maïs-haricot, riz-soja, riz-lentille, couscous-pois chiches. Il serait même utile, pour aller au-devant des consommateurs, de disposer de davantage de préparations associant produits céréaliers et légumes secs. Il faut reconnaître que la culture culinaire française est relativement limitée dans l’utilisation des céréales (à part les produits classiques tels que le pain, les pâtes, le riz et le couscous venu plus récemment du Maghreb). Nous consommons très peu de maïs, d’avoine, d’orge, de mil, céréales qui font partie de la culture de nombreux peuples. Notre savoir- faire dans la préparation des légumes secs est également limité, notamment pour diversifier les modes de consommation des haricots, des pois chiches, des fèves.
L’association céréales-légumes secs intéresse beaucoup les végétariens soucieux de diminuer leur consommation de produits animaux. En fait, cette excellente association concerne l’ensemble des consommateurs puisqu’elle permet un apport remarquable de glucides lents et une excellente couverture d’un très grand nombre de besoins nutritionnels. Elle est particulièrement utile dans une optique de prévention primaire ou secondaire du diabète et des maladies cardio-vasculaires. Une utilisation courante de céréales et légumes secs est également une solution intéressante pour réduire le coût du budget alimentaire tout en disposant d’un bon statut nutritionnel. Il est grand temps de corriger les excès de l’alimentation occidentale actuelle par un retour à des bases nutritionnelles plus saines et plus durables. Un effort de vulgarisation conséquent devrait être entrepris dans ce sens pour valoriser les légumes secs plutôt que de mettre toujours en relief les mêmes produits transformés.
De nombreux produits animaux (viandes, œufs et charcuterie) sont consommés avec du pain ou d’autres produits céréaliers. Ce type d’association permet évidemment de disposer d’un bon apport protéique, de pallier le déficit complet des produits animaux en glucides, d’apporter des fibres alimentaires. Cependant un usage trop courant d’une association viandes-produits céréaliers, surtout si ces derniers sont trop raffinés, n’est pas satisfaisant au niveau nutritionnel. En effet, les viandes de par leur richesse en acides aminés soufrés ont des effets acidifiants au niveau de l’organisme qui peuvent se traduire par une augmentation de la calciurie et à long terme favoriser le développement de l’ostéoporose. Les produits céréaliers, beaucoup trop riches en phosphore et en acides aminés soufrés, ne peuvent pas contrecarrer l’effet acidifiant des viandes, si bien que la consommation de pain, pâtes, riz n’est pas un accompagnement suffisant pour les produits animaux, surtout si ces derniers sont consommés en quantité élevée.
Les produits céréaliers avec ou sans accompagnement de viandes méritent d’être complémentés par un apport de fruits et de légumes. La part respective des produits céréaliers par rapport aux fruits et légumes peut être très variable en fonction des besoins énergétiques de l’individu et donc du degré de sédentarité. Dans de nombreux plats, les céréales peuvent être associées à des légumes, ce qui permet de diminuer la densité énergétique de la préparation. Cette association a l’avantage d’accroître la quantité des fibres bien tolérées au niveau digestif, d’augmenter la densité nutritionnelle en minéraux et micronutriments. De plus, une préparation de céréales-légumes est relativement équilibrée en minéraux (calcium, magnésium) avec un apport de sels organiques de potassium suffisant pour exercer un effet alcalinisant. A l’évidence, l’association viandes-produits céréaliers- légumes constitue une complémentarité idéale, et l’équilibre de cet ensemble justifie qu’il soit placé au cœur du repas.
Les pommes de terre sont trop souvent considérées comme des féculents de faible intérêt nutritionnel. Pourtant ce tubercule peut avoir un rôle majeur dans notre alimentation s’il est associé avec des aliments suffisamment riches en protéines. L’association viandes-pommes de terre présente une excellente complémentarité à condition de ne pas surcharger la préparation en matières grasses. La pomme de terre est très riche en sels organiques de potassium avec un pouvoir alcalinisant susceptible de neutraliser l’effet acidifiant des viandes.
La pomme de terre a parfois un statut de légume lorsqu’elle est nouvelle. Arrivée à maturité, lorsqu’elle a réalisé son plein d’amidon, elle gagne à être associée avec d’autres légumes, ce qui permet théoriquement de diminuer la densité énergétique et d’accroître la densité nutritionnelle en micronutriments de cet ensemble. Pour une population végétarienne, l’association pommes de terre-légumes est toutefois insuffisante pour couvrir les besoins protéiques. Par contre, une association pommes de terre-légumes frais-légumes secs devient une préparation très intéressante au niveau nutritionnel largement utilisée autrefois dans les soupes par les populations rurales. Ces ingrédients sont retrouvés dans beaucoup de tajines marocains et même dans certains couscous du Maghreb ainsi que dans la soupe provençale au pistou. Que d’excellentes préparations qu’il conviendrait de réhabiliter au niveau à la fois gastronomique et nutritionnel.