Psychologie du vieillissement : La chronique d'une mort annoncée
Doit-on informer une personne atteinte d’une maladie incurable de l’imminence de son trépas ? De plus en plus de familles et de médecins choisissent d’informer le patient de son état. Consciente qu’elle vit ses derniers moments, la personne traverse alors une série d’étapes ou de stades qui ont été particulièrement bien étudiés par la psychiatre américaine Kübler-Ross. Son ouvrage publié en 1969 et intitulé On death and dying relate les résultats d’une étude conduite à partir de deux cents entretiens auprès de personnes conscientes qu’elles sont rentrées dans la dernière phase de leur vie. Selon Kübler-Ross, leur psychologie se développerait selon un scénario en cinq stades : le refus, la colère, le marchandage, la dépression et l’acceptation.
Après le choc émotionnel, les personnes pratiquent souvent le déni ou le refus. Elles évoquent une erreur de diagnostic et elles démarchent souvent auprès d’un autre médecin en espérant un avis contraire. Certaines se tournent vers la religion. Après l’acceptation du diagnostic, apparaît le stade de la colère. «Pourquoi moi alors que tant de personnes mauvaises et inutiles sont bien portantes ?», telle est la question. Un sentiment de frustration et d’injustice peut alors envahir le mourant, se traduisant parfois par l’apparition de comportements négatifs voire méchants envers autrui. Passé cette phase, le stade du marchandage apparaît. Le contrat peut être proposé à Dieu ou bien à quelque force supérieure sous la forme «laissez-moi la vie et je serai une bonne mère, un bon père, etc.» Le mourant peut à cette phase perdre sa lucidité. Dans le cas contraire, un état dépressif apparaît souvent : il s’agit du quatrième stade. Le mourant peut verbaliser des sentiments de chagrin, de culpabilité ou de honte envers sa maladie. Il peut même souhaiter «en finir». A cette phase, le soutien psychologique assuré par un psychologue ou un psychiatre peut favoriser et séréniser l’acceptation de la mort. Cette acceptation représente le dernier stade. Le patient témoigne d’un détachement envers le monde, il s’abandonne à l’inéluctable dans un état de paix intérieure.
Le modèle de Kübler-Ross présente un grand intérêt sur le plan de la formation du personnel soignant amené à pratiquer l’accompagnement au trépas. Il soulève les habituelles questions relatives à tout modèle de développement discontinu par stades, à savoir l’universalité du scénario et son ordination stricte. Certains auteurs mettent en doute que tous les mourants passent par tous les stades et qu’ils se suivent strictement dans le même ordre. Pattisson (1977) préfère un modèle en trois phases : une phase de crise aiguë, une phase chronique de sentiments ambivalents et une phase terminale .
Durant la phase aiguë, l’anxiété et le stress montent jusqu’à un paroxysme. Elle correspond aux deux premiers stades de Kübler-Ross. Durant la phase chronique, le mourant est envahi de sentiments contradictoires qu’il doit intégrer. Un mélange d’angoisse, de chagrin et de dépit représentant souvent un tableau dépressif apparaît alors. Elle correspond aux stades 3 et 4 de Kübler-Ross. Enfin, la dernière phase est celle de l’acceptation et du détachement. Il s’agit de la plus courte. Elle précède le trépas.