Les compliments nutritionnels : Les alicaments
La définition des alicaments doit être bien précisée. Il ne s’agit pas d’aliments produits par la nature, comme le laissent entendre certains.
Les alicaments sont un nouveau type d’aliments industriels
qui aurait pour but de non seulement nourrir le corps, mais aussi
de le soigner. Cette idée, certes intéressante, a été matérialisé*’ dès les années 60 avec l’apparition du sel iodé pour éviter le goitre thyroïdien, du sel fluoré pour prévenir les caries dentai res, des yoghourts au bifidus actif, des boissons vitaminées, des laits fermentés ou enrichis à la vitamine D ou en Oméga 3, les céréales avec suppléments de minéraux et oligoéléments, etc.
Les industries agro-alimentaires et certains grands laboratoires pharmaceutiques ont compris qu’un gros marché s’ouvrait à eux et se sont engouffrées dans le créneau, d’autant plus facilement que la législation n’avait pas prévu le cas de figure. En effet, jusqu’ici l’on connaissait les médicaments et les aliments. Déjà, les compléments alimentaires posaient problème, et les avis étaient partagés, les uns les classant médicaments (l’ordre des pharmaciens bien sûr), les autres aliments (herboristeries et maisons de régime bien entendu). La législation avait résolu, plus ou moins, le dilemme, en réglementant les doses contenues dans les compléments, doses autorisées ridiculement faibles comme nous l’avons expliqué.
Les alicaments sont une toute autre affaire, pour trois raisons principales :
- La législation a en face d’elle des industries agro-alimentaires et des laboratoires pharmaceutiques extrêmement puissants et influents, ce qui n’était pas le cas, au contraire, pour les compléments alimentaires.
- Les compléments alimentaires avaient une « présentation » et des conseils d’utilisation qui ressemblaient à ceux des médicaments. Là, c’est l’inverse, la présentation est strictement celle d’aliments. La législation est donc non seulement inadaptée mais totalement paralysée et impuissante juridiquement. De plus, les premières autorisations à titre « d’aliments spéciaux favorables à la santé » ayant été données, cela fait jurisprudence. Cela sera bien difficile de faire machine arrière, même si une nouvelle
- Le marché mondial des alicaments est déjà en plein boom. Il est de 92 milliards de francs français (23 milliards de francs suisses) en 2000 et les prévisions les moins optimistes parlent de 140 milliards de francs français (35 milliards CHF) en 2006. Comment, maintenant, éviter les abus et endiguer quelque peu ce phénomène ? Quel sera le politique qui osera intervenir, même si par miracle, il en reste un intègre ? Mis à part ces problèmes juridiques, qui pour nous au fond sont secondaires, analysons un peu quelles sont les qualités et les défauts de ces nouveaux aliments.
Au premier abord, l’idée de supplémenter des aliments pauvres en substances essentielles comme les vitamines, les minéraux, les acides gras insaturés n’est pas une mauvaise idée, loin de là. A quatre conditions cependant :
- Qu’ils soient de qualité : nous avons déjà abordé ce problème épineux. Les vitamines synthétiques, utilisées automatiquement par l’agro-alimentaire ou les laboratoires pharmaceutiques sont mal absorbées et ont des produits de dégradation (déchets) plus ou moins toxiques. Les minéraux, qui ont subi des manipulations telles que l’action de la chaleur, ne sont plus ionises. La flore intestinale d’une grande partie de la population n’est plus capable de les ioniser à nouveau, car en mauvais état. Ils sont donc, eux aussi, mal absorbés. Les dosages de ces vitamines ou minéraux ne pourront, en principe, dépasser les apports quotidiens recommandés (AQR) qui sont très insuffisants pour être vraiment efficaces. L’action revendiquée par les producteurs est donc surfaite, surtout à long terme.
- Qu’ils soient correctement dosés et qu’ils respectent les équilibres entre les différentes substances ? Des vitamines et des minéraux, c’est bien. Mais en quelle quantité ? Mais comment respecter les équilibres dont l’exemple idéal serait la nature ? Des vitamines ou des minéraux mal équilibrés sont inefficaces ou même parfois néfastes. De plus, comment s’adapter aux besoins de chacun ? Cela est déjà difficile avec des compléments alimentaires que l’on peut pourtant moduler à volonté en fonction de l’individu, alors avec des alicament tous sortis d’un même moule, comment faire ?
- Qu’ils ne deviennent pas la base de l’alimentation de la population, car ils ne peuvent pas être autre chose que des substituts, et de qualité très médiocre, du moins comme ils sont conçus pour le moment.
- Qu’ils ne viennent pas masquer et faire oublier que les aliments industriels sont surtout toxiques par des additifs et des techniques d’emballages qui restent plus que douteuses et préoccupantes. A l’heure actuelle, les aliments sont contaminés par toute une gamme de substances chimiques qui n’ont pas fait l’objet d’une expérimentation suffisante.
Sous prétexte que c’est la mode, on vous balance des vitamines et autres substances en vogue, mais améliorer la qualité même du produit, on n’en parle même pas !
Alors, que dire pour clore ce chapitre ? Alicaments oui mais alicaments de qualité, ce qui ne semble pas être pour demain. Avant de parler d’enrichir les aliments de vitamines, faire en sorte de présenter des aliments plus sains et de meilleure qualité.
Le public « gobera-t-il » les alicaments ? Je n’en suis pas si sûr. De plus en plus, il se rend compte qu’on le manœuvre, et les associations de protection des consommateurs font en général du bon travail. Enfin, ces alicaments sont chers et coûtent environ une fois et demie plus que les aliments normaux. Bien sûr, on peut nous répliquer que cela évite les dépenses occasionnées par les compléments alimentaires. A suivre…
Nous ne pouvons pas éviter d’aborder un autre problème, bien plus inquiétant, les OGM.