Les alphahdroxyacides : l'acide lactique
L’acide lactique est plus doux que l’acide glycolique. On peut l’obtenir à partir de tout hydrate de carbone fermentescible tel que le petit-lait, le dextrose, l’amidon, la mélasse ; on peut le fabriquer à partir d’un produit chimique, l’acrylonitrile, utilisé dans la fabrication de divers plastiques et de fibres.
C’est dans les années 1780 que le chimiste suédois Cari Scheele (1742-1786) mit en évidence l’un des premiers acides organiques, l’acide lactique, ainsi que l’acide citrique, l’acide oxalique, l’acide tartrique. L’acide lactique est un des constituants du lait, son nom provenant du mot latin lac qui signifie lait. On le trouve également dans le pain, le fromage, la viande, la bière et le vin.
L’acide lactique est largement présent dans le corps humain en tant que sous-produit tout à fait naturel du métabolisme des hydrates de carbone. (En fait, en respirant, nous émettons un peu d’acide lactique, ce qui permet aux moustiques de nous localiser.)
L’acide lactique est un constituant de notre peau ; dans l’épiderme, il est l’acide le plus soluble dans l’eau et il est indispensable pour maintenir l’épiderme en bon état. Cet acide est donc systématiquement présent dans les préparations pour la peau avec l’idée qu’il puisse compenser un manque naturel. L’acide lactique aide à la guérison des coups de soleil, réduit les ridules, les rides et les tâches cutanées, de couleur brune, dues à un excès de mélanine, qui surviennent avec l’âge1. L’acide lactique est quelquefois incorporé dans les crèmes à raser et sert à faire disparaître les tâches de rousseur.
L’acide lactique agit par pénétration de la peau ; il fragilise les liaisons hydrogène qui lient les cellules entre elles, facilitant ainsi l’élimination des cellules mortes de l’épiderme. Il augmente et maintient le degré d’hydratation de la couche superficielle de la peau en accroissant sa capacité de rétention d’eau et en lui redonnant de l’élasticité, ce qui contrebalance la tendance de la peau à se dessécher, à se craqueler ou à s’écailler. On peut aussi utiliser l’acide lactique pour boucher les pores, adoucir la peau et d’une manière générale la tonifier.
Le pH de l’acide lactique est stabilisé par un tampon qui permet d’avoir un acide ni trop fort, qui irriterait la peau, ni trop faible pour pouvoir être efficace. Dans la plupart des formulations cosmétiques de AHA, le domaine de pH est de 3-4, ce qui leur permet d’avoir une action optimale. L’effet tampon permet de stabiliser le pH ; on l’obtient en mélangeant l’acide avec un de ses sels, le lactate de sodium.
Les lactates sont aussi utilisés dans la fabrication des produits d’hygiène : le lactate de potassium accroît la viscosité et est utilisé dans les gels liquides. Le lactate d’argent entre dans la composition des shampoings antipelliculaires alors que le lactate de zirconium permet d’obtenir de bons déodorants.
Dans l’industrie cosmétique, on utilise d’autres types de lactates. Ce sont les esters de l’acide lactique tels que le lactate de butyle, le lactate de lauryle, le lactate de myristyle qui rendent la peau lisse et douce. Le lactate d’éthyle a un domaine d’utilisation bien plus large (voir encadré suivant).
Au-delà de son utilisation dans les préparations de cosmétiques, l’acide lactique est appelé à jouer un rôle plus important car l’industrie chimique se convertit aux ressources renouvelables. Il va faire partie de notre vie tout comme l’acide poly lactique (PLA) que l’on obtient maintenant à partir de produits de l’agriculture. La société américaine Cargill et le géant de l’industrie chimique Dow Chemisas se sont notamment associés pour construire une usine de fabrication d’acide lactique à partir de plantes comme le maïs et la betterave à sucre. Cet acide, une fois polymérisé, peut être utilisé pour l’emballage et le textile.
Le lactate d’éthyle : un solvant renouvelable pour l’industrie
Dans les nettoyants industriels, on utilise des solvants qui doivent être efficaces et sans danger. Un solvant qui s’évapore dans l’atmosphère et dont les vapeurs ne se décomposent pas rapidement, agira comme un gaz à effet de serre. Les solvants doivent provenir de ressources renouvelables ; autrement dit, tous ceux provenant généralement de combustibles fossiles devront, un jour, être issus de l’agriculture. Le lactate d’éthyle satisfait à ces conditions.
Il existe déjà des usines de produits chimiques qui fabriquent du lactate d’éthyle à partir de ressources agricoles aux États-Unis, en Hollande et en Espagne. La demande mondiale atteint déjà les 20 000 tonnes par an, bien que son prix, 4 €/litre, soit quatre fois supérieur à celui des autres solvants de nettoyage. Aux Etats-Unis, on fabrique le lactate d’éthyle à partir de l’amidon de maïs, alors qu’en Hollande et en
Espagne, on utilise plutôt la betterave à sucre. L’acide lactique est obtenu par fermentation de l’amidon ou du sucre par une bactérie ou un champignon. Le lactate d’éthyle (appelé aussi Vertec) est un liquide incolore ayant une odeur fruitée caractéristique. Il bout à 145 « C et n’est donc pas très volatil. Dans l’environnement, on en retrouve une très faible quantité qui se dégrade rapidement. Vertec peut dissoudre une grande variété de matériaux et a déjà remplacé des solvants tels que le xylène, l’acétone et la diméthylformamide.
La forme solide du PLA ressemble au polystyrène, son film transparent est analogue au cellophane et sa fibre, semblable au polyester, peut servir à la fabrication de T-shirts et de tapis. Mais l’action des AHA est-elle vraiment efficace ? Apparemment, la réponse est oui. Un test en double aveugle, mené par Matthew Stiller, est décrit, en 1996, dans le journal Archives of Dermatology. Son but «ait d’examiner l’effet de solutions de AHA à 8 % sur 74 femmes, de 40 à 70 ans, dont la peau avait été sérieusement mise à mal par une surexposition au soleil durant leur vie. Stiller a conclu qu’une application quotidienne de AHA durant six mois apporte des bienfaits évidents, les effets anti-âges des AHA restant toutefois limités.
En 1997, lors de la 55e rencontre annuelle de l’American Academy of Dermatology, Lynn Drake de l’Université de l’Oklahoma a présenté un travail sur les AHA et plus précisément les résultats d’un test en double aveugle sur des crèmes contenant 8 % d’acide lactique et 8 % d’acide glycolique : ces crèmes amélioraient « légèrement mais notablement » l’apparence de la peau, particulièrement lorsqu’elle avait souffert d’une surexposition au soleil.
Pour finir, signalons qu’il existe aussi des bétahydroxyacides (BHA) qui, comme leurs cousins alpha, agissent comme exfoliants, mais on les dit meilleurs car ils réduisent ridules et rides sans provoquer les irritations qui accompagnent parfois l’utilisation des AHA. Jusqu’ici, aucune preuve sérieuse n’a montré que les BHA sont plus efficaces que les AHA.