Le Chewing-gum : les polymères hydrocarbonés
Autrefois le chewing-gum était entièrement fabriqué à partir de produits naturels. On utilise aujourd’hui beaucoup de produits synthétiques qui le rendent non seulement meilleur mais aussi plus sain.
La communication entre deux personnes qui se font face implique non seulement le fait de parler mais aussi la gestuelle, le langage du corps et l’odeur. Rien ne peut freiner davantage le désir de poursuivre une conversation qu’une haleine fétide. Que pouvons-nous faire pour prévenir cela ou pour remédier à la situation ? On peut se rincer la bouche avec une solution à base de menthol ou d’eucalyptol, mais il est difficile de le faire sur son lieu de travail. L’autre solution consiste à rafraîchir notre bouche en mâchant du chewing-gum.
Les aliments que nous mangeons, par exemple l’oignon cru et l’ail, dégagent certaines odeurs : ces derniers contiennent des molé¬cules à base de soufre que l’on expulse en respirant. Une telle situa¬tion peut durer quelques heures mais généralement, nous avons nous-mêmes conscience de l’odeur. Cependant, si de telles molécules sont générées par des bactéries qui, dans votre bouche, se nourrissent de débris alimentaires et vivent dans des cavités dentai¬res, nous pouvons ne pas sentir leur présence dans notre haleine, et à notre insu, elles peuvent affecter sérieusement notre vie professionnelle et sociale.
L’hygiène buccale faite partie de notre toilette ; nous pouvons nous brosser les dents ou même nous passer le fil dentaire après le petit- déjeuner, mais il est peu probable que cela nous apporte toute la protection nécessaire durant la journée. La façon la plus simple de rafraîchir notre haleine est de mâcher du chewing-gum. Non seule¬ment il donnera une odeur mentholée à notre haleine, mais il élimi¬nera également tous les débris alimentaires et les bactéries de nos dents et « lavera » la bouche en stimulant la sécrétion salivaire.
Les chewing-gums modernes constituent le produit le plus sophistiqué de l’industrie alimentaire, mais il est encore loin d’être parfait, le problème majeur étant la pollution de l’environnement urbain due aux chewing-gums abandonnés. En 2000, un examen des trottoirs et de la principale artère commerçante de Londres, Oxford Street, y a dénombré plus d’un quart de million de chewing-gums collés.
La chimie de la salive
Une personne en bonne santé sécrète en moyenne un demi-litre (500 ml) de salive par jour. La vitesse à laquelle les six glandes de la bou¬che en produisent varie de 0,3 ml par minute, lorsque le corps est au repos, à 5 ml au démarrage de la mastication, bien qu’elle retombe à 1,5 ml par minute au bout de vingt minutes.
La salive contient 99,5 % d’eau, mais les 0,5 % de produits chimiques qui y sont dissous jouent un rôle crucial dans la santé bucco-dentaire en plus de celui, évident, qui est de fournir des enzymes pour la digestion. Les espèces chimiques présentes dans la salive sont des molécules organiques, des ions inorganiques et des macromolécules.
Les molécules organiques sont, par ordre décroissant de quantités relatives : les acides gras, l’urée, les acides aminés libres, l’acide urique, le lactate, et le glucose. Leurs abondances relatives reflètent approximative¬ment, mais à des degrés moindres, celles du plasma dans l’organisme.
Les ions inorganiques sont, par ordre décroissant d’importance : le chlorure, le potassium, le sodium, le phosphate, le bicarbonate, le calcium et le magnésium. Le calcium et le phosphate sont essentiels pour maintenir les dents en bon état car l’émail de la dent est constitué de phosphate de calcium ; par ce biais, la salive aide à la réparation des dents. Le pH de la salive est neutre (pH = 7), afin d’aider à la reminéralisation de la dent. En dessous de 5,5 une légère déminéralisation intervient.
Parmi les macromolécules, il y a des protéines, des glycoprotéines, des anticorps, des lipides ainsi que les enzymes amylase, peroxydase et lyso- zyme (qui est un agent antibactérien). Le nombre de protéines détectées dans la salive a considérablement augmenté ces dernières années, nous en connaissons une cinquantaine dont le rôle, pour certaines d’entre elles, n’est pas encore clarifié.
Une xérostomie indique un manque de salive. C’est un symptôme dans de nombreuses maladies et également un effet secondaire de certains médicaments courants. Le chewing-gum est un remède idéal.
En 1992, le gouvernement de Singapour a interdit le chewing-gum car il gênait les rebords en caoutchouc des portes coulissantes du métro. (Il leva partiellement cette interdiction en 2002 en permettant les chewing-gums sans sucre vendus en pharmacie, uniquement sur prescription d’un médecin ou d’un dentiste.) Le chewing-gum colle à l’asphalte et au caoutchouc, c’est un cas de collage de deux matériaux
similaires : l’asphalte, le caoutchouc et le chewing-gum sont constitués de polymères hydrocarbonés.
Théoriquement, il devrait être possible de fabriquer un chewing- gum qui ne dégrade pas les places publiques. Une solution évidente au problème serait de le rendre digeste ; ainsi, après l’avoir mâché, nous pourrions l’avaler discrètement plutôt que de le cracher et de le jeter. On pourrait aussi le concevoir biodégradable, ce qui est difficile car il devrait demeurer inchangé dans la bouche, tout en étant exposé à la salive et aux enzymes digestives, mais rester sensible aux autres enzymes de l’environnement. Nul doute que les services publics de nettoyage devront continuer à se débattre avec le problème car le chewing-gum est particulièrement tenace !
Il y a des milliers d’années, les gens mâchaient des gommes. Celles-ci suintaient d’arbres dont les troncs étaient endommagés. En 1993, Bengt Nordqvist, du Bureau National Suédois des Antiquités, tomba sur le plus vieux chewing-gum mastiqué jamais découvert alors qu’il menait des fouilles dans une habitation préhistorique, une hutte vieille de 9000 ans sur l’île d’Orust. La présence d’empreintes de dents prouvait bien qu’il s’agissait de chewing-gum. La gomme était de la résine de bouleau, et ressemblait assez aux chewing-gums modernes « sans sucre » sucrés au xylitol, appelé plus communément « sucre de bouleau ». Il était plus que probable que cette gomme a été jetée par une ou un adolescent de l’Âge de la Pierre car les empreintes montraient des dents saines.
Les Grecs anciens mâchaient certainement des gommes. Le médecin Dioscoride, qui vécut au premier siècle après J.-C., recommandait de mâcher de la résine de lentisque pour ses vertus curatives. C’est une résine aromatique qui s’écoule des entailles de l’écorce du pistachier
lentisque (Pistacia lentiscus). Cet arbre est originaire du bassin méditerranéen ; il pousse très bien dans les régions côtières et en parti¬culier sur les îles grecques. Du temps des Romains, la production de résine de lentisque était l’xclusivité de l’île grecque de Chios, la plus grande quantité de ce produit entrant dans la fabrication de vernis. Durant les mois d’été, le lentisque était lacéré de nombreuses entailles verticales d’où suintait la sève qui durcissait lentement pour former de grosses gouttes ovales de la taille d’un petit pois. Celles-ci étaient recueillies tous les quinze jours entre juin et septembre.
La consommation moderne du chewing-gum peut remonter aux Indiens d’Amérique de la Nouvelle-Angleterre qui mâchaient une gomme issue de l’épicéa, obtenue en entaillant le tronc. Vers le début des années 1800, les colons américains reprirent cette habitude et, en 1848, John Curtis de Bangor, dans le Maine, commença à en commercialiser.
La plus grande percée du chewing survint avec l’introduction du chicle, une gomme élastique provenant du sapotillier (Acbras zapota) qui pousse dans les forêts du Yucatan au Guatemala et dans d’autres régions d’Amérique Centrale. Les Américains étaient seulement en train de redécouvrir le chewing-gum autrefois apprécié par les peuples de la civilisation Maya qui fut prospère jusqu’en 800 après J.-C.
La tradition raconte que c’est le premier Président du Mexique, le Général Antonio Lopez de Santa Anna (1797-1876), qui emporta du chicle à New York et en donna à Thomas Adams, un photographe du quartier de Staten Island, lui indiquant qu’on pouvait l’utiliser en remplacement du caoutchouc. Il s’avéra inutilisable dans ce but mais Adams décida qu’il pouvait être utilisé comme chewing-gum et il le transforma en bandes, le commercialisant sous l’appellation Adams New York Chewing-gum au prix d’un cent le bâton. On était en 1871. Le chicle constituait une base idéale pour le chewing-gum ; il donnait une pâte à mâcher lisse et élastique et il retenait bien les parfums. Il devait devenir le principal ingrédient du chewing-gum pendant 50 ans, jusqu’à son remplacement en 1940 par des polymères synthétiques. L’inconvénient du chicle est qu’il devait être recueilli sur des arbres qui poussent dans la jungle. Malgré diverses tentatives, on ne parvint pas à faire pousser ces arbres dans des plantations.
Les Etats-Unis ont importé annuellement jusqu’à 7000 tonnes de chicle d’Amérique Centrale. La sève recueillie ne peut provenir que des arbres qui ont au moins 20 ans. La récolte a lieu uniquement tous les trois ou quatre ans, avec une production d’un kilogramme de gomme seulement par récolte. La sève s’écoule mieux durant la nuit ou tôt le matin.
Le lait est recueilli puis chauffé ce qui provoque sa polymérisation en une masse visqueuse que l’on verse dans des moules en bois et qu’on laisse refroidir et durcir. Actuellement, la quantité importée est inférieure à 200 tonnes, et peut-être est-ce mieux ainsi. Peu rentable (la gomme ne se vend qu’à 1,6 € le kilogramme, soit un très faible pourcentage du prix final du chewing-gum), la récolte du chicle comporte en effet beaucoup de dangers provenant non seulement des serpents venimeux de la forêt mais aussi de la mouche du chicle. Celle-ci pond ses œufs dans le nez et les oreilles du récolteur de résine, d’où sortent des larves qui, à leur tour, rongent sa chair et provoquent des difformités faciales.
On fabrique aujourd’hui le chewing-gum à partir de polymères synthétiques élastiques (élastomères) au coût de revient très faible en rapport avec le prix final, lequel s’établit comme suit : matières premières, 20 % ; fabrication, 25 % ; distribution, 10 % ; ventes et promotions, 30 % et bénéfices, 15 %.
En plus du chicle, les gommes naturelles qui étaient utilisées autrefois provenaient essentiellement de plantes tropicales telles que le chiquibul, le jelutong, le perillo, la sorva et le tuno. (Le latex des plantations de caoutchouc n’était d’aucune utilité car il n’a pas la bonne texture.) Ces gommes sont dérivées de l’isoprène, un hydrocarbure simple produit par les arbres. L’isoprène est un liquide volatil qui bout à 34 °C ; sa formule chimique est C5H8. Cette molécule est constituée d’une chaîne de quatre atomes de carbone avec une double liaison à chaque extrémité et un groupement méthyle (CH3) lié à un des deux carbones centraux. Tout comme les matériaux possédant des doubles liaisons, l’isoprène se polymérise sous l’action d’un catalyseur, et, à l’état naturel, ce sont les molécules d’oxygène de l’air qui déclenchent ce processus.
On peut accélérer cette polymérisation en recueillant la sève, en l’acidifiant, et en la faisant bouillir, ce qui provoque sa coagulation en une masse molle et caoutchouteuse. La polymérisation produit de longues chaînes hydrocarbonées molles, souples et susceptibles d’être mâchées.
Les gommes naturelles présentent l’inconvénient majeur d’avoir une odeur assez forte. Idéalement, la gomme de base ne devrait avoir aucun goût en elle-même car cela permet d’ajouter une large palette de parfums plus attractifs ; les fabricants de chewing-gum préfèrent donc utiliser un matériau obtenu à partir de l’isoprène pur. L’industrie pétrochimique en produit à grande échelle pour la fabrication de différents caoutchoucs synthétiques.
Une fois franchi le Rubicon entre élastomères naturels et artificiels, il n’y avait plus aucune raison de limiter le choix des élastomères uniquement aux polymères de l’isoprène. De nos jours, nous constatons donc que d’autres matériaux sont utilisés : le polyisobutylène, l’acétate de
polyvinyle, le laurate de polyvinyle, et plus particulièrement les copolymères du butadiène et du styrène. La filiale chimique de la société Exxon Mobil produit des polymères de haute pureté pour les chewing- gums. Le Vistanex LM est un polyisobutylène à faible poids moléculaire alors que le Vistanex MM est un polymère à poids moléculaire élevé auquel on a ajouté un antioxydant. Cette société fournit également le Butyl 007 qui est un copolymère de l’iso butylène et de faibles quantités d’iso propène.
Initialement introduites aux Etats-Unis en raison de la pénurie croissante des gommes naturelles, les gommes synthétiques sont maintenant les seules à être utilisées dans les chewing-gums. Parmi les polymères agréés pour la fabrication du chewing-gum, on peut citer le styrène-butadiène-caoutchouc (SBC), le copolymère d’isobutylène- isopropène, la paraffine, la cire de pétrole, le polyéthylène, le polyiso¬butylène, l’alcool polyvinylique, la résine terpène synthétique (Pour davantage d’informations sur ces polymères, voir Glossaire, à polymè¬res hydrocarbonés).
La société de fabrication de chewing-gum la plus connue au monde est encore celle créée par Adams et qui, en 2002, a été rachetée par le groupe Cadbury Schweppes. Un autre fabricant de chewing-gum célè¬bre est Wrigley dont la société a été fondée par William Wrigley en 1892 à Chicago. Il démarra dans les affaires en vendant d’abord du savon puis de la levure chimique. Pour stimuler les ventes de cette dernière, il offrait des paquets de chewing-gum à chaque achat. Il obtint l’effet désiré mais il réalisa vite qu’il ferait plus de bénéfices en vendant du chewing-gum. Son produit le plus vendu, le « Wrigley’s Spearmint Gum » a été lancé en 1906 et Wrigley devint en quatre ans la marque la plus vendue aux États-Unis. Elle occupe aujourd’hui la
première place sur le marché mondial du chewing-gum. Un Américain mâche en moyenne 300 chewing-gums par an, ce qui correspond globalement à un chiffre d’affaires de plus de 2 milliards de dollars. Les plantations de menthe utilisée pour parfumer ces gommes s’étendent sur 150 kilomètres carrés environ, dans des états tels que l’Idaho, l’Oregon et le Wisconsin.
En Europe, plus de 80 ingrédients sont autorisés pour la fabrication de chewing-gum et aux Etats-Unis, leur nombre s’élève à 50. Un chewing-gum standard contient au moins quinze ingrédients, souvent vingt, et parfois même trente. Les ingrédients essentiels sont toujours : la gomme de base, des édulcorants, des parfums, des émulsifiants, des stabilisants et des conservateurs. Ils sont énumérés par ordre d’impor¬tance pour l’obtention d’un bon produit et non par ordre d’impor¬tance dans sa composition. Dans un chewing-gum Wrigley’s Spearmint Gum, le principal ingrédient est le sucre qui constitue la moitié de son poids. La gomme de base compte pour le tiers et les pourcentages des ingrédients restants, y compris l’eau, sont de l’ordre de 1 à 2 %.
Les caoutchoucs deviennent plus mous lorsqu’ils absorbent de l’huile ; c’est aussi le cas des gommes de base lorsqu’on leur ajoute des cires. Celles-ci rendent la gomme plus malléable car elles agissent comme un lubrifiant entre les chaînes de polymères. Les cires sont des chaînes de groupements CH2 reliés entre eux. (On a cité quelques cires naturelles à la page 10.) Les cires issues de l’industrie pétrochimique sont plus stan¬dardisées. Les cires à chaînes plus courtes (25 à 30 atomes de carbone) sont dites cristallines et celles qui sont constituées de chaînes plus longues (35 à 50 atomes de carbone) sont dites micro-cristallines.
On utilise les cires naturelles, telles que la cire de carnauba et la cire d’abeille, comme plastifiants ; on les ajoute pour obtenir la bonne consistance et pour contrôler la quantité d’arôme libérée. Les cires de pétrole sont meilleures car elles permettent une durée de stockage plus longue du produit. On a attribué des numéros d’additifs alimentaires aux cires cristallines : par exemple, le E907 correspond à une cire cris¬talline et le E905 à une cire microcristalline. Cependant, suite à l’accusation d’un groupe de pression selon lequel la cire microcristalline aurait provoqué un cancer chez des animaux testés en laboratoire, celle-ci n’est plus utilisée (bien que la preuve de ses propriétés cancéri¬gènes n’ait jamais été apportée).
Les autres ingrédients importants du chewing-gum sont les émulsifiants, tels que la lécithine et le monostéarate de glycérol. Ils sont nécessaires pour le ramollir et ils permettent aux autres ingrédients de se lier entre eux en formant un mélange homogène. La présence de stabilisants empêche la gomme de devenir trop sèche ou trop dure. Le meilleur stabilisant est le glycérol. Les émulsifiants et les stabilisants constituent globalement moins de 1 % du produit.
Parmi les différents édulcorants ajoutés au chewing-gum, le plus traditionnel est le sucre glace dont la finesse des grains est de 200 microns ou moins. On peut citer d’autres édulcorants tels que le sirop de glucose, le sorbitol, le mannitol, le xylitol, l’aspartame et l’acesul- fam. Le meilleur d’entre eux est le sirop de glucose car il améliore la texture de la gomme, mais il a une action négative au plan de l’hygiène dentaire. Tout comme le sucre, il peut nourrir les bactéries buccales Streptococcus mutans : celles-ci produisent des acides qui peuvent atta¬quer l’émail des dents et causer des caries. Les édulcorants comme le xylitol, l’aspartame et l’acesulfam sont beaucoup plus sûrs. Bien que le xylitol soit un hydrate de carbone comme le sucre, il ne fermente pas pour donner un acide. Il apporte donc une forme de douceur inoffensive.
consistance et pour contrôler la quantité d’arôme libérée. Les cires de pétrole sont meilleures car elles permettent une durée de stockage plus longue du produit. On a attribué des numéros d’additifs alimentaires aux cires cristallines : par exemple, le E907 correspond à une cire cristalline et le E905 à une cire microcristalline. Cependant, suite à l’accusation d’un groupe de pression selon lequel la cire microcristalline aurait provoqué un cancer chez des animaux testés en laboratoire, celle-ci n’est plus utilisée (bien que la preuve de ses propriétés cancérigènes n’ait jamais été apportée).
Les autres ingrédients importants du chewing-gum sont les émulsifiants, tels que la lécithine et le mono stéarate de glycérol. Ils sont nécessaires pour le ramollir et ils permettent aux autres ingrédients de se lier entre eux en formant un mélange homogène. La présence de stabilisants empêche la gomme de devenir trop sèche ou trop dure. Le meilleur stabilisant est le glycérol. Les émulsifiants et les stabilisants constituent globalement moins de 1 % du produit.
Parmi les différents édulcorants ajoutés au chewing-gum, le plus traditionnel est le sucre glace dont la finesse des grains est de 200 microns ou moins. On peut citer d’autres édulcorants tels que le sirop de glucose, le sorbitol, le mannitol, le xylitol, l’aspartame et l’acesulfam. Le meilleur d’entre eux est le sirop de glucose car il améliore la texture de la gomme, mais il a une action négative au plan de l’hygiène dentaire. Tout comme le sucre, il peut nourrir les bactéries buccales Streptococcus mutans : celles-ci produisent des acides qui peuvent attaquer l’émail des dents et causer des caries. Les édulcorants comme le xylitol, l’aspartame et l’acesulfam sont beaucoup plus sûrs. Bien que le xylitol soit un hydrate de carbone comme le sucre, il ne fermente pas pour donner un acide. Il apporte donc une forme de douceur inoffensive.
L’aspartame et l’acesulfam sont très doux et on en utilise donc très peu, mais dans tous les cas, ces édulcorants artificiels ne provoquent pas de caries dentaires. Le pourcentage d’arômes dans un chewing-gum est d’environ 1 % : le plus populaire est la menthe verte, dont la molécule chimique active est la carvone, et la menthe poivrée qui est essentiellement du menthol. On utilise quelque fois des esters de fruits pour donner à la gomme des arômes fruités. En moyenne, un chewing-gum dure environ 20 minutes et dans les chewing-gums modernes, l’arôme persiste aussi longtemps. Au Japon, il existait une nouvelle gomme appelée Mystery Gum (Gomme Mystère) dont le goût changeait à mesure qu’on la mâchait et qui, à différents moments, pouvait donc avoir un goût de pêche, de raisin, d’ananas et de fraise.
Le conservateur caractéristique utilisé dans le chewing-gum est le BHT (abréviation de butyl-hydroxytoluène, alimentation UE, conservateur E321) : c’est un antioxydant très puissant qui protège le chewing-gum d’une attaque par l’oxygène. Pour cela, une quantité d’environ 100 ppm (0,01 %) de ce produit est suffisante. Ce conservateur est inter¬dit dans certains pays où on utilise d’autres antioxydants tels que l’alpha- tocophérol. Lorsqu’on utilisait les gommes naturelles pour fabriquer le chewing-gum, on devait également ajouter des antioxydants car les doubles liaisons des chaînes de polymères étaient tout aussi sensibles à une attaque chimique de l’oxygène de l’air. Celle-ci conduit en effet à une réticulation et donc à un durcissement de la gomme. (Ces antioxy¬dants remplacent les antioxydants naturels qui étaient éliminés durant le lavage et la purification des caoutchoucs naturels.)
On fabrique le chewing-gum dans de grosses cuves ; pour cela, on y fait fondre une tonne de gomme à laquelle on ajoute les autres ingrédients. On remue bien ce mélange jusqu’à obtenir une consistance de pâte à pain qui, dans le cas du chewing-gum traditionnel, est roulée en bandes fines, saupoudrée, découpée en morceaux et enveloppée. On peut aussi passer le chewing-gum à travers des cylindres laminoirs qui le découpent et le pressent en petits blocs qui sont ensuite enrobés de sucre ou de xylitol, dans le cas d’un chewing-gum sans sucre.
Le chewing-gum peut contenir des substances actives bénéfiques pour la santé telles que le fluorure qui renforce l’émail de la dent, des vitamines et même parfois de la p-chlorobenzyl-4-méthylbenzyl pipé- razine qui prévient le mal des transports. Ces ingrédients actifs constituent généralement 5 % du produit. On a pensé administrer d’autres médicaments par cette voie, mais cette méthode de dosage n’a pas été agréée. L’idée d’un chewing-gum médicamenteux pour une prescription à libération lente serait théoriquement possible en mélangeant le médicament à l’acétate de polyvinyle (PVA) et en incorporant l’ensemble à la gomme en tant que plastifiant. Le PVA est déjà utilisé dans les produits pharmaceutiques comme liant et il assurerait une libération lente du médicament.
Du Viagra à mâcher ?
Un brevet pour un chewing-gum de Viagra a été déposé par la compagnie Wrigley en novembre 2000. Chaque tablette de chewing-gum contiendra entre 5 et 100 mg de citrate de sildénafil et l’utilisateur devra le mâcher une demi-heure environ avant d’avoir des relations sexuelles. Le chewing- gum de Viagra ne sera probablement pas disponible avant 2013, lorsque le brevet du Viagra tombera dans le domaine public et que l’on pourra obtenir des versions génériques bon marché du médicament. Le bienfait du chewing-gum de Viagra viendrait du fait que la molécule active serait libérée lentement, évitant ainsi l’irritation de l’estomac observée chez cer¬tains hommes lorsqu’ils prennent un comprimé.
Les chewing-gums peuvent avoir d’autres fonctions telles que ne pas coller aux prothèses dentaires, rendre les dents plus blanches et déboucher des voies nasales congestionnées (en y incluant du menthol ou de l’eucalyptus). Freedent est le chewing-gum destiné aux person¬nes qui ont des prothèses dentaires ou des couronnes sur lesquelles un chewing-gum ordinaire a tendance à adhérer. Sa gomme de base est moins collante.
Le Bubble Gum a une gomme de base de plus grande élasticité, ce qui permet de faire des bulles. Il a été inventé, en 1906, par l’Américain Frank Fleer. Il n’eut pas beaucoup de succès car il éclatait facile¬ment avant de pouvoir faire une bulle, et le pire c’est qu’il collait à tout. Son entreprise en fabriqua une variété supérieure, Dubble Bubble, qui fut commercialisée en décembre 1928 et qui est encore vendue aujourd’hui. La gomme de base du Bubble Gum est soit du SBC soit tout simplement du caoutchouc butyle.
En 1996, une société américaine, Church & Dwight, mit sur le marché un chewing-gum thérapeutique qui réduit la plaque dentaire. Il était à base d’hydrogénocarbonate de sodium (NaHC03, appelé également bicarbonate de sodium ou tout simplement bicarbonate) qui neutralise les acides de la bouche. Selon le fabricant, il fallait mâcher la gomme après brossage des dents et au bout d’un mois d’usage régulier, la plaque diminuait de 25 %. Pour le rendre agréable au palais, le fabricant masquait le goût du bicarbonate par une combinaison d’édulcorants, tels que le xylitol, et d’arômes de menthe poivrée, de menthe verte, de thé des bois et de cannelle.
L’horreur de l’haleine de chien
À la télévision britannique, une des publicités les plus contestées en 2003 fut celle du chewing-gum X-cite de Wrigley. Elle présentait l’image effrayante d’un chien sortant de la bouche d’un homme, le but étant d’insister sur le fait que X-cite pouvait éliminer « l’haleine de chien », cette haleine fétide. Des protestations ont conduit à ne la diffuser qu’après 21 heures. La médiatisation de cette affaire a augmenté massive¬ment les ventes de X-cite.