La lésion ostéopathique
Définition
Il est courant de considérer la lésion comme une atteinte sérieuse, voire irréversible des tissus : plaie, blessure… De cette définition traditionnelle, nous retiendrons uniquement la notion d’atteinte.
La lésion ostéopathique est d’un ordre différent et correspond à un ensemble de dysfonctionnements intervenant sur la structure ou la fonction, engendrant des modifications dans la mobilité (des articulations, des os, des muscles), génératrices de troubles. Si la lésion ostéopathique s’installe (parce qu’elle n’est pas décelée, qu’elle est trop vite ou mal traitée, méprisée par le patient qui refuse de « s’écouter »), elle pourra mener à certaines pathologies plus difficiles à traiter.
Parfois, elle est peu aisée à percevoir, on ne peut ni la voir ni l’entendre, et elle n’apparaît pas sur la radiographie : il est alors possible qu’elle n’en soit qu’au début de son évolution. On la dit alors lésion ostéopathique muette. L’ostéopathe chevronné repère cette perturbation au toucher. Quant au patient, il ressent différents troubles qui lui « mettent la puce à l’oreille » : fatigue excessive, dépression légère, manque d’énergie. Puis il peut paraître gêné dans sa vie quotidienne par des maux aussi divers qu’une douleur chronique à la main ou des troubles digestifs ; la lésion évoluera enfin dans L’ensemble du corps, saccageant le précieux équilibre que le phénomène d’homéostasie tentera de rétablir.
La lésion ostéopathique et le mouvement
La lésion ostéopathique correspond à une perturbation dans le jeu des pièces de l’organisme, par exemple au niveau d’une articulation affectée dans sa mobilité. Si cette lésion n’est pas réduite, elle gagnera d’autres parties du corps, créant un effet boule de neige.
Ses origines : la lésion primaire
La lésion ostéopathique est provoquée par des traumatismes d’origines diverses : chute, coup, stress, peur, posture répétitive ou inadaptée (la secrétaire devant sa machine à écrire, par exemple). Les articulations, os ou muscles sont victimes de mauvais traitements, un trouble s’installe. Prenons l’exemple de ce patient âgé d’une cinquantaine d’années, atteint d’une légère surdité de l’oreille droite. Afin de garder le contact avec ses proches, il a pour habitude d’incliner la tête, de « tendre l’oreille ». I ,es muscles de son cou s’hypertrophieront, entraînant (roubles adaptatifs et douleurs. De même, le mal peut venir de P« intérieur » : un organe fonctionnant à outrance dans le but de défendre l’Organisme face au monde extérieur (pollution, nourriture médiocre) ne pourra plus, à un moment donné, assumer son rôle. C’est ici qu’intervient une fois de plus le précieux phénomène d’homéostasie : le corps tente de réparer cette pièce perturbée, afin qu’elle puisse à nouveau travailler correctement. En cas d’échec, la machine humaine intériorisera ces perturbations et tentera de « faire avec ». Cette fonction perturbée agira sur la structure, qui pourra à son tour influencer négativement d’autres fonctions. Le rôle de l’ostéopathe est de déceler et de traiter la lésion primaire, par laquelle tout a débuté (et qui n’est pas forcément la plus importante) mais qui devient lésion secondaire lorsqu’une nouvelle lésion est apparue et prendra à son tour le nom de lésion primaire, c’est-à-dire celle par laquelle l’ostéopathe sera directement renseigné et pourra remonter jusqu’à la lésion originelle. Lorsqu’une articulation est perturbée, un processus de protection de cette articulation est mis en œuvre : les tissus s’épaississent, durcissent, un œdème apparaît. Lorsque la douleur survient, la lésion a déjà évolué et sera plus difficile à réduire.
SON EVOLUTION
La lésion bénigne traitée en temps et en heure n’aura pas le loisir de générer d’autres lésions. En revanche, une perturbation non décelée ou mal traitée évoluera. Toute douleur, même supportable, devrait inciter à consulter ; inutile d’ignorer le discours de ce corps qui vous parle : une entorse au poignet non soignée, et c’est l’avant-bras qui vous lance, puis le coude, enfin l’épaule : les lésions se sont épanouies. Rassurez-vous : le mal est souvent réparable, mais le traitement sera plus long, et vous aurez perdu un temps précieux.
De même, ne vous précipitez pas sur votre raquette de tennis ou le manche de votre casserole dès que les symptômes douloureux ont disparu : une activité physique reprise trop rapidement après la réduction de la lésion est cause de nombreuses rechutes ou de l’apparition de nouveaux troubles et, à long terme, de rhumatismes ; en effet, les tissus durcis, épaissis afin de compenser une lésion, sont le lieu privilégié des rhumatismes à venir.
SES CONSÉQUENCES
Les tissus entourant la lésion vont souffrir, durcir, compenser. La douleur peut apparaître, discrète d’abord, puis lancinante, enfin insupportable. Peu à peu, la perturbation s’est installée. Une lésion ostéopathique confortablement insérée au sein d’un organisme qui n’a pu achever sa tâche d’homéostasie ne va pas se contenter de nuire sur place : elle va également desservir à distance, s’étendant dans tout le corps par l’intermédiaire des fascias, des tissus conjonctifs, des voies de communication liquidiennes et nerveuses, dont les fonctions d’échange seront passablement perturbées : le sang, la lymphe circuleront difficilement, les nerfs transmettront moins bien les informations, et les perturbations se rendront des structures aux fonctions et des fonctions aux structures. C’est pourquoi il ne faut pas s’étonner du fait qu’une entorse au poignet provoque des douleurs au niveau des vertèbres cervicales qui engendreront en retour d’autres lésions : le corps est un tout, ne l’oublions pas…
Le patient doit rester à l’écoute de son corps afin de détecter les signes extérieurs des lésions : douleurs, tiraillements, céphalées… Une lésion ostéopathique non traitée et que le procédé naturel d’homéostasie n’a pu réussir à enrayer – évoluera vers d’autres lésions, vers les maladies chroniques et séniles, arthrose, rhumatismes, vieillisse¬ments articulaires prématurés… Agir avant qu’il ne soit trop tard reste la seule manière de ne pas sombrer dans la valse des consultations médicales où le patient se compare à une balle brûlante que tous les praticiens se renvoient faute de ne rien pouvoir pour elle…
Toute lésion peut donc entraîner d’autres troubles : il s’agit là d’une réaction en chaîne, une chaîne lésionnelle d’adaptation. L’organisme compense, adoptant une atti¬tude de sauvegarde de la santé : positions préservant les zones lésées, adaptations mécaniques adéquates visant à soulager l’organisme mais générant d’autres perturbations. L’ensemble de ces lésions imbriquées les unes dans les autres est appelé lésion totale. L’ostéopathe envisage le corps comme une unité, traitant effets et causes, remontant le long de la chaîne lésion¬nelle d’adaptation.