Inutile au-delà d'un certain âge
En découvrant ces multiples armes antirides de la médecine esthétique, j’ai très vite compris pourquoi je ne m’étais pas suffisamment informée depuis dix ans sur les progrès dans ce domaine. Toutes ces techniques s’adressent en fait à des patientes dont l’organisme est encore assez dynamique pour intégrer avec profit les nouvelles substances et se contenter de doses légères. Au-delà d’une certaine profondeur, les rides ne relèvent plus de la médecine esthétique, il ne reste que la chirurgie avec tous ses inconvénients. Et à l’âge qui est le mien, la seule solution est la chirurgie lourde, celle à laquelle je me suis toujours refusée pour ne pas risquer de ne plus me reconnaître en troquant ma tête d’origine contre un masque post fabriqué.
Je me souviens d’avoir vu, au cours d’une croisière, à l’heure de l’apéritif, un spectacle hallucinant : trois blondes assises côte à côte sur trois tabourets de bar ; leurs trois profils avec le même nez, le même front lissé, les mêmes cheveux mi- longs recouvrant un peu les oreilles pour cacher les cicatrices, mais aussi les mêmes mains un peu fripées et tachées de brun qui démentaient tous leurs efforts pour faire «jeune». Elles n’étaient pas laides, ni jolies d’ailleurs, elles n’avaient simplement plus aucune chance d’être prises pour des jeunes femmes, et pas davantage la possibilité de retrouver leur véritable personnalité, à laquelle elles avaient renoncé par hantise de la voir prendre naturellement de l’âge.
Il est possible que la médecine esthétique remédie, au moins en partie, à cette fabrication en série de bimbos matures.