Examens de laboratoire : Le sang,acteur et messager
les examens biologiques sont, on le sait, extrêmement nombreux.
Les «bilans de santé» se pratiquent de plus en plus, que ce soit dans le cadre de la médecine du travail ou à titre systématique après une consultation chez le médecin de famille. Les deux liquides biologiques immédiatement accessibles qui sont le plus souvent (et le plus facilement) examinés sont, bien sûr, le sang et l’urine.
On entend parfois des patients s’étonner que leur médecin n’ait rien découvert à l’analyse de sang, alors qu’ils présentent des symptômes manifestes et des signes inquiétants. Cela est facile à comprendre : le sang contient un très grand nombre de substances dont la quantité, les fonctions et la signification peuvent varier énormément selon les maladies.
Certaines maladies se traduisent par très peu de modifications sanguines, d’autres entraînent de très nombreuses perturbations, très difficiles à interpréter. Nous tenterons de faire un tour d’horizon des analyses les plus connues afin de bien circonscrire leur utilité et leurs limites.
Le sang est à la fois un élément de base de l’organisme et le messager d’informations et de substances indispensables à son bon fonctionnement. Tous les organes du corps étant irrigués par le sang, qui leur apporte l’oxygène et les substances nutritives et les débarrasse du gaz carbonique et des déchets, les dysfonctionnements et les maladies sont susceptibles de se traduire par une modification du contenu sanguin.
Le sang est composé de cellules (globules rouges, globules blancs et plaquettes) et de plasma. Le plasma est un liquide constitué d’eau salée et de nombreuses substances dissoutes. Les examens de sang ne peuvent être tous énumérés ici (de nouveaux examens apparaissent chaque jour), mais les plus fréquemment effectués recherchent et mesurent trois sortes de substances : les composants du sang lui-même (globules rouges. blancs et composants du plasma), les substances que celui-ci véhicule normalement (substances nutritives, hormones, certains déchets normaux comme l’urée, certains oligo-éléments comme le fer) et des substances qui y apparaissent anormalement, du fait des maladies ou du mauvais fonctionnement de certains organes.
Cellules et plasma
Le sang, on le sait, est formé de cellules (globules rouges et globules blancs) et d’un liquide, le plasma, dans lequel circulent les cellules et les substances en suspension. La numération globulaire permet de dénombrer les globules rouges (ou érythrocytes) et de mesurer leur taille (le volume globulaire moyen) et leur contenu en hémoglobine. Celle-ci compte en effet autant que le nombre apparent de globules rouges. La formule sanguine permet de dénombrer les leucocytes (ou globules blancs) et de déterminer leur nature. Il existe en effet V plusieurs sortes de leucocytes : les granulocytes, les lymphocytes et les monocytes. Toutes ces cellules ont pour principale fonction de débarrasser l’organisme des corps étrangers, qu’ils soient microbiens (bactéries, virus) ou cellulaires (cellules cancéreuses). Elles jouent aussi un rôle dans de nombreuses maladies inflammatoires. Le nombre de leucocytes des différentes familles varie en fonction du type de maladie dont souffre le patient. Les infections entraînent une augmentation importante du nombre de leucocytes.
La biologie sanguine permet aussi d’étudier les plaquettes (ou thrombocytes), cellules qui favorisent l’arrêt des saignements, en s’agglutinant sur la bordure des plaies et en permettant la formation de caillots. Elle permet également de mesurer un certain nombre de composants dissous dans le sang : les facteurs de la coagulation, substances qui permettent la formation du caillot autour des plaquettes agglutinées (le fibrinogène est le composant le plus souvent dosé), les diverses protéines fabriquées par le foie qui servent au transport des aliments et des médicaments ou participent aux défenses de l’organisme, enfin l’albumine, composant essentiel du plasma. Il s’agit d’une protéine très importante : sa
présence dans le sang retient le plasma dans les vaisseaux. Une diminution de l’albumine sanguine (en raison d’une maladie du foie, par exemple) s’accompagne d’une «fuite» de liquide plasmatique hors des vaisseaux. Cette fuite fait gonfler les tissus et produit les œdèmes. Aujourd’hui, on peut rechercher et doser de nombreuses protéines sanguines, même présentes en faible quantité : les immunoglobulines (ou anticorps), par exemple. Ce sont des protéines fabriquées par certaines classes de globules blancs.
Elles se fixent sur la paroi de microbes, ou de cellules étrangères à l’organisme, et permettent aux lymphocytes de «reconnaître» les cellules ou les bactéries étrangères et de les détruire. Il peut s’agir aussi de certaines protéines dont la sécrétion existe au cours de la vie fœtale, disparaît chez l’adulte, mais redevient importante au cours de maladies particulières.
Substances nutritives, déchets et hormones
Le sang, nous l’avons dit, permet de transporter l’oxygène des poumons à tous les autres organes. Il leur apporte aussi les nutriments indispensables à leur croissance et à leur renouvellement. On peut donc doser dans le sang des sucres (glycémie),des graisses (cholestérol, triglycérides) et des protéines. Les quantités de ces nutriments peuvent bien sûr varier en fonction de l’état de santé du patient. Le cholestérol et les triglycérides sont très élevés au cours de certaines maladies familiales des graisses du sang, ou tout simplement chez des patients obèses ou dont l’alimentation est très riche en graisses. Le fer, nous l’avons vu, est également une substance importante pour le sang lui-même. Une diminution du fer (et de la protéine porteuse du fer, nommée transferrine ou sidérophylline) incite toujours à rechercher un saignement chronique passé inaperçu. De nombreuses substances qui sont en fait les déchets de fonctionnement des organes sont véhiculées dans le sang en effet, leur élimination s’effectue soit dans la bile grâce au travail du foie, soit dans les urines par filtration dans le rein. Parmi les substances les plus connues du grand public, citons l’urée, produit de dégradation des protéines, et l’acide urique, déchet issu de l’utilisation des acides nucléiques — provenant du noyau — des cellules. Ainsi, l’urée était autrefois dosée pour évaluer le fonctionnement du rein (l’urée est fabriquée par le foie et filtrée et éliminée par le rein). Cette méthode est remplacée depuis de nombreuses années par le dosage de la créatinine, beaucoup plus précis. Les différents organes peuvent ainsi être explorés au moyen de tests simples. Le fonctionnement du foie, par exemple, véritable centrale de traitement, de synthèse et d’épuration des substances physiologiques, peut être apprécié à travers l’augmentation dans le sang des substances qu’il est censé éliminer, ou au contraire la diminution de celles qu’il est censé produire.
Un «bilan hépatique standard» étudie en général la bilirubine, les transaminases et la gamma-glutamyl transpeptidase (ou gamma-GT). La bilirubine, comme son nom le suggère, est un pigment destiné à l’élimination dans la bile. Elle ne doit pas, en principe, se trouver dans le sang en grande quantité, sauf lorsque le foie est dans l’incapacité de l’éliminer, ou lorsque les voies biliaires sont obstruées par un calcul (un «caillou» biliaire) ou une tumeur. Les transaminases et la gamma-glutamyl trans- peptidase sont des enzymes nombreuses dans les cellules hépatiques, et dont la présence en quantité croissante dans le sang traduit une destruction importante des cellules du foie, comme dans la cirrhose du foie.
Le fonctionnement d’un organe peut également être exploré mesurant sa production d’hormones. Les hormones sécrétées par un organe — une glande dite «endocrine» — sont libérées dans le sang et leurs effets s’exercent à distance sur d’autres organes. Le corps humain contient de nombreuses glandes endocrines : la thyroïde, les glandes surrénales, les gonades ou glandes sexuelles (testicules, ovaires). Leurs hormones respectives peuvent aujourd’hui être dosées grâce à des techniques de plus en plus fiables et précises.
Du sel et de l’eau
En dehors du sang, un autre liquide physiologique important permet d’étudier un grand nombre de fonctions et de dépister des maladies. Il s’agit des urines. Presque toutes les substances sécrétées ou absorbées par l’organisme sont susceptibles d’être retrouvées dans les urines, et donc d’y être recherchées. L’urine est, comme le plasma, constituée de deux éléments principaux : de l’eau et du sel (ou chlorure de sodium). L’eau et le sodium sont en effet des composants essentiels à la vie. Le corps humain contient près de 70% d’eau ; le sodium permet l’équilibre de l’eau dans l’organisme (les médecins d’autrefois résumaient ce phénomène en disant «l’eau suit le sel»), il intervient dans le fonctionnement des neurones et les phénomènes de contraction et le rythme du cœur. Le ionogramme, ou dosage du sodium et du potassium dans le sang et les urines, est un examen simple mais qui donne de précieux renseignements en cas de maladie cardiaque, rénale ou hépatique.