Anti-âge : le cancer et l'inflammation
Dès 1860, le Dr Rudolf Virchow avait émis l’hypothèse selon laquelle les tumeurs cancéreuses se développaient sur le site d’une inflammation chronique. Un siècle plus tard, les cancérologues accordent plus d’attention au rôle que les diverses mutations génétiques pourraient jouer en favorisant des proliférations cellulaires anormales qui risquent de devenir malignes. Aujourd’hui, les chercheurs pensent que les mutations génétiques et les syndromes inflammatoires seraient des processus qui se renforcent mutuellement, et qui, si on n’arrive pas à les contrôler, peuvent transformer des cellules normales en cellules malignes.
Comment cela se produit-il ?
L’une des plus puissantes armes produites par les macrophages et les autres cellules inflammatoires sont ce qu’on appelle des radicaux libres d’oxygène. Ces molécules très réactives dé-truisent à peu près tout ce qui se trouve sur leur chemin, notamment l’ADN. Si la cellule endommagée n’est pas détruite, elle peut subir une mutation génétique qui lui permettra de continuer à croître et à se diviser. Cela n’aboutira pas toujours à une tumeur maligne, mais à une blessure chronique persistante, incitant les cellules immunitaires à affluer, apportant avec elles des facteurs de croissance et des protéines qui entretiennent le processus inflammatoire, dans une sorte de cercle vicieux.
Parfois, la cause du syndrome inflammatoire est évidente, comme pour les brûlures oeso-gastriques qui lèsent continuellement la paroi de l’œso-phage par l’acide de l’estomac, prédisposant une personne au développement d’un cancer de l’œsophage. Les chercheurs s’intéressent aussi au rôle d’une enzyme appelée la cyclo-oxygénase 2 (COX – 2) dans le développement du cancer du colon. La COX – 2 est aussi une protéine produite par le corps lors de l’inflammation.
Récemment, on a pu montrer que les gens qui prennent régulièrement des doses quotidiennes d’aspirine, qui est connue pour bloquer la COX 2, sont moins susceptibles de développer des polypes, petites tumeurs bénignes précancéreuses. Mais l’aspirine n’est pas dénuée d’effets secon-daires, pouvant aussi provoquer des saignements internes.
En 2000, des chercheurs qui étudiaient des patients traités par des anti-inflammatoires anti-arthrosiques s’aperçurent que ces anti-inflammatoires étaient aussi efficaces dans la prévention de l’apparition de polypes intestinaux. Depuis, d’autres études ont montré que ces anti-inflammatoires peuvent aussi prévenir le cancer du sein, retarder la perte de mé-moire ou ralentir la progression de maladies neurodégénératives comme la sclérose latérale amyotrophique. En effet, les stimuli inflammatoires prédisposent et participent à la progression de plusieurs cancers : la gastrite à hélicobacter pylori pour le cancer de l’estomac, la prostatite pour le cancer de la prostate, la salpingite et l’endométriose pour le cancer de l’ovaire, le syndrome de Barett, pour le cancer de l’œsophage, les maladies inflammatoires intestinales (Crohn) pour le cancer colorectal, l’asbestose prédisposant au cancer du poumon. Or, 70 % des cancers du tube digestif et 30 % de tous les cancers sont favorisés par une inflammation digestive liée à une mauvaise alimentation, riche en sucres et farines raffinés, en graisses saturées et trans, et pauvre en fibres, en fruits et légumes.