Le paradoxe de l'alimentation et du cancer
Le rôle paradoxal de l’alimentation, potentiellement si bienfaisante mais aussi porteuse de risques, s’illustre particulièrement en matière de cancer. Le cancer est un problème majeur de santé publique, cette maladie est responsable d’environ 30 % des décès et constitue la première cause de mortalité avant soixante-cinq ans. En France, les cancers les plus meurtriers sont, en ordre décroissant, ceux du poumon, du côlon-rectum, des voies aérodigestives, du sein et de la prostate. Avec le vieillissement de la population, mais aussi sous l’influence de facteurs environnementaux défavorables (tabagisme, pollution environnementale, alimentation, pesticides), l’incidence des cancers avec son cortège de souffrances prend une forte extension dans les pays occidentaux, gâchant ainsi le plaisir de vieillir paisiblement à beaucoup de personnes et à leur entourage. En France chaque année, 150 000 personnes meurent d’un cancer, soit plus que le double de l’immédiat après-guerre. Les cancers semblent se développer dans les pays industrialisés plus que dans les pays pauvres, et cette différence ne pourrait s’expliquer entièrement par le vieillissement. Ainsi, dans un pays comme la France, l’incidence globale de cancers a crû en vingt ans d’environ 30 % à âge égal (ce chiffre masque beaucoup de disparités dans l’évolution des divers types de cancer). Lorsque nous aurons suffisamment de recul sur ce fléau, le cancer apparaîtra comme la rançon à payer pour le développement d’un certain style de vie, caractéristique des sociétés industrielles. Était-ce une fatalité ? Certainement pas puisque nous pourrions disposer de véhicules peu polluants, de demeures saignes faites avec des matériaux sûrs, d’aliments produits sans pesticides ou avec des produits phytosanitaires sans risques avérés.
Parce que les facteurs génétiques jouent un rôle fondamental dans la survenue de ces pathologies, parce que le cancer provient d’un dérèglement de la division et de la différenciation cellulaire, le rôle de l’alimentation, de la pollution ou d’autres facteurs environnementaux dans l’apparition de divers cancers a semblé longtemps marginal. Pourtant, dans la mesure où elles peuvent être responsables de la première mutation indispensable au processus cancéreux, les substances toxiques si abondantes dans notre environnement pollué pourraient en partie expliquer la prévalence actuelle de nombreux cancers, à l’instar du cancer du poumon.
Notre vision sur l’origine des cancers, et donc notre vigilance, a profondément changé, et il est probable que l’impact des facteurs environnementaux apparaîtra plus déterminant au fur et à mesure des progrès de la recherche. Cela ne signifie pas que le développement du cancer ne résulte pas aussi d’une logique de dysfonctionnement interne (responsable de l’apparition de nouvelles mutations dans les cellules préalablement transformées), avec des causes complexes difficiles à analyser mais qu’il faudrait mieux comprendre. De plus, il n’existe pas un cancer mais des cancers avec des circonstances d’apparition extrêmement diverses.
Il y a à l’évidence une nécessité d’agir sur les facteurs qu’il serait possible de contrôler tels que l’exposition aux cancérigènes (tabac, alcool, pollution, pesticides), mais également le mode de vu c l la qualité de l’alimentation. Dès à présent au niveau alimentaire, il est prudent d’éviter d’ingérer fréquemment des qualités trop importantes de substances cancérigènes. Mais comment les repérer? La contamination par les pesticides est passée sous silence pour ne pas décourager les consommateurs. Ce pendant elle est bien réelle (on peut même parfois la percevoir sur les raisins de table par exemple), même si les résidus de pesticides présents dans les produits sont très rarement supérieurs .aux limites réglementaires (qui sont sans doute assez arbi- li aires). Pour certains aliments tels que les fruits et légumes, une indication de la date et de la nature du dernier traitement serait bienvenue, même si nous sommes plus résistants que les abeilles. Mien des substances naturelles présentes dans les aliments comestibles et les boissons peuvent théoriquement exercer des effets cancérigènes, mais, comme elles ne sont pas absorbées isolément ou sont présentes en faible quantité, elles sont normalement neutralisées ; en tout cas, il y a fort longtemps que les hommes les absorbent. Une recommandation de bon sens consiste à varier ses habitudes de consommation pour éviter à l’organisme d’être toujours en contact avec les mêmes facteurs de risque. En effet, la durée d’exposition à un facteur cancérigène prime sur la dose ingérée.
Le paradoxe de l’alimentation est de pouvoir créer un environnement favorable ou défavorable à la cancérogenèse. Être directement responsable du cancer par la présence de divers cancérigènes (pesticides, pyrolysats, mycotoxines), jouer un rôle prédisposant par un environnement nutritionnel déséquilibré (excès d’énergie, de graisses, d’alcool, de sel) ou exercer un rôle protecteur par l’apport de micronutriments, de fibres alimentaires, par l’équilibre des acides gras,par l’effet spécifique de certains aliments tels que les fruits et légumes.
L’impact et le mécanisme d’action des facteurs alimentaires sont plus ou moins établis selon le type de cancer. Les données
épidémiologiques et expérimentales sont convaincantes et concordantes concernant le rôle protecteur des fruits et légumes vis-à-vis des risques de cancers de la bouche, du pharynx, de l’œsophage, du poumon, de l’estomac et sans doute du gros intestin (rôle assez net des légumes). La proportion des cancers qui pourraient être évités par voie nutritionnelle demeure difficile à chiffrer, sans doute de l’ordre de 30-40 % tous cancers confondus. La prévention nutritionnelle est plus élevée pour les cancers de l’estomac et du côlon-rectum que pour ceux du sein, de la bouche, du larynx, du pharynx et du poumon. En fait, les potentialités de prévention sont certainement beaucoup plus élevées que les estimations actuelles assez fluctuantes parce qu’il est rare que les comportements alimentaires aient été optimaux à l’échelle d’une vie. De plus, un très grand nombre de cas de cancers ont été prévenus grâce à l’alimentation sans qu’ils aient pu être comptabilisés.
L’organisme est exposé à de nombreux facteurs qui peuvent favoriser la cancérogenèse. Le temps de latence entre la première lésion de l’ADN et l’apparition d’une tumeur est souvent très long (de dix à quinze ans), et les tumeurs peuvent se développer à partir d’une seule cellule normale transformée ! Les événements impliqués dans la cancérogenèse sont très complexes et liés au fait que certains accidents peuvent survenir lors de la division des cellules et plus particulièrement au cours du vieillissement de l’organisme. Les études expérimentales sur les animaux de laboratoire ont permis de mettre en évidence le fait que le processus cancéreux procède par étapes, où de nombreux facteurs de protection peuvent avoir un rôle à jouer.
L’étape d’initiation correspond à une première lésion génotoxique provoquée par des cancérigènes d’origine exogène ou produits dans l’organisme. Quelles que soient leurs origines, les radicaux libres ou les espèces oxygénées réactives sont fortement impliqués dans les lésions et les mutations de l’ADN. Les facteurs alimentaires peuvent contribuer à prévenir cette étape d’initiation du processus cancéreux en empêchant la formation de métabolites toxiques, en favorisant leur détoxification et leur expulsion de la cellule, en neutralisant les radicaux libres ou les espèces oxygénées réactives, en protégeant les sites sensibles de l’ADN vis- à-vis clos molécules génotoxiques, en modifiant l’expression de certains gènes clés de la division cellulaire et enfin en activant la réparation des lésions de l’ADN. Chez l’homme, il est possible de se rendre compte de l’importance des lésions génotoxiques par I élimination urinaire de produits d’oxydation de l’ADN. Ainsi a- ! on pu observer que la consommation de fruits et légumes contribuait à diminuer cette excrétion.
Le processus de cancérogenèse nécessite aussi l’intervention île divers facteurs qui stimulent la division des premières cellules transformées (promotion tumorale). Les facteurs nutritionnels et les réponses de l’organisme peuvent ainsi contribuer soit à limiter, soit à amplifier les conséquences des premières mutations cellulaires. Lorsque la cellule acquiert un potentiel toujours plus élevé de division cellulaire en sécrétant ses propres facteurs de croissance, le processus cancéreux est bien enclenché. Ce pendant, pour que les tumeurs deviennent malignes, il est nécessaire que d’autres stades, permettant la progression et l’invasion tumorale, soient franchis.
Les facteurs nutritionnels peuvent donc exercer un rôle préventif sur les processus cancéreux, mais les connaissances concernant les mécanismes d’action sont loin d’être suffisantes pour essayer d’agir au mieux par les facteurs nutritionnels. A partir d’un grand nombre d’études épidémiologiques, le rôle protecteur global des fruits et légumes a été mis en évidence dans les cancers digestifs mais aussi dans ceux du poumon, de la vessie et même dans les cancers hormono dépendants. Cependant, il est probable qu’il y ait des produits végétaux plus ou moins efficaces selon la nature des micronutriments qu’ils apportent. En l’absence de connaissances suffisamment précises, une recommandation sûre est de bien diversifier les espèces botaniques de fruits et légumes de qualité dans le cadre d’une alimentation bien équilibrée en énergie et de bonne densité nutritionnelle.
Le risque de développement d’une épidémie d’obésité, parce qu’elle touche précocement les jeunes, parce qu’elle est bien visible, est parfaitement perçu alors que la progression de l’incidence du cancer est encore trop analysée comme la rançon à payer du vieillissement. Cette analyse s’applique relativement bien au cancer de la prostate qui est quasiment inhérent au vieillissement, à-vis clos molécules génotoxiques, en modifiant l’expression de certains gènes clés de la division cellulaire et enfin en activant la réparation des lésions de l’ADN. Chez l’homme, il est possible de se rendre compte de l’importance des lésions génotoxiques par I élimination urinaire de produits d’oxydation de l’ADN. Ainsi a- ! on pu observer que la consommation de fruits et légumes contribuait à diminuer cette excrétion.
Le processus de cancérogenèse nécessite aussi l’intervention île divers facteurs qui stimulent la division des premières cellules transformées (promotion tumorale). Les facteurs nutritionnels et les réponses de l’organisme peuvent ainsi contribuer soit à limiter, soit à amplifier les conséquences des premières mutations cellulaires. Lorsque la cellule acquiert un potentiel toujours plus élevé de division cellulaire en sécrétant ses propres facteurs de croissance, le processus cancéreux est bien enclenché. Ce pendant, pour que les tumeurs deviennent malignes, il est nécessaire que d’autres stades, permettant la progression et l’invasion tumorale, soient franchis.
Les facteurs nutritionnels peuvent donc exercer un rôle préventif sur les processus cancéreux, mais les connaissances concernant les mécanismes d’action sont loin d’être suffisantes pour essayer d’agir au mieux par les facteurs nutritionnels. A partir d’un grand nombre d’études épidémiologiques, le rôle protecteur global des fruits et légumes a été mis en évidence dans les cancers digestifs mais aussi dans ceux du poumon, de la vessie et même dans les cancers hormono dépendants. Cependant, il est probable qu’il y ait des produits végétaux plus ou moins efficaces selon la nature des micronutriments qu’ils apportent. En l’absence de connaissances suffisamment précises, une recommandation sûre est de bien diversifier les espèces botaniques de fruits et légumes de qualité dans le cadre d’une alimentation bien équilibrée en énergie et de bonne densité nutritionnelle.
Le risque de développement d’une épidémie d’obésité, parce qu’elle touche précocement les jeunes, parce qu’elle est bien visible, est parfaitement perçu alors que la progression de l’incidence du cancer est encore trop analysée comme la rançon à payer du vieillissement. Cette analyse s’applique relativement bien au cancer de la prostate qui est quasiment inhérent au vieillissement,
mais cela ne signifie pas que les possibilités de prévention nutritionnelle soient faibles.
L’augmentation de l’incidence de beaucoup d’autres cancers ne semble pas dépendre de l’élévation de la longévité. La progression fulgurante du cancer du poumon est liée au développement du tabagisme, et, avec un certain décalage, ce cancer frappe maintenant la population féminine. De même, l’incidence du cancer de la peau est liée à une exposition inconsidérée au soleil de la part de sujets relativement sensibles. La prévalence du cancer du sein ne cesse d’augmenter dans les pays européens, et cela ne peut s’expliquer seulement par un dépistage précoce. Au début des années 1990, on répertoriait 25 000 nouveaux cas de cancers du sein par an en France, l’incidence actuelle serait de l’ordre de 42 000 cas par an. Ainsi, on peut estimer qu’une femme sur dix développera un cancer du sein durant sa vie. L’échec des médecins dans l’éradication du cancer du sein est en grande partie due à l’absence d’identification d’un agent étiologique spécifique et à notre ignorance de l’initiation tumorale. Cette maladie cancéreuse semble dans tous les cas multifactorielle, et aucun facteur étiologique, pris isolément, ne peut expliquer la maladie. Certains facteurs de risque héréditaires sont très forts, mais des observations ont mis en évidence que l’environnement pouvait amplifier les conséquences des prédispositions génétiques. Parmi les facteurs de risque on peut citer l’impact à long terme des œstrogènes (règles précoces, ménopause tardive, première grossesse tardive, utilisation prolongée de contraceptifs oraux à base d’œstrogènes), et parmi les facteurs nutritionnels, la surcharge pondérale, la prise d’alcool et une alimentation trop pauvre en facteurs de protection (acides gras polyinsaturés, micronutriments, phyto-œstrogènes d’origine alimentaire). La nutrition peut avoir une influence sur l’imprégnation hormonale ou agir sur le métabolisme cellulaire. L’exemple du cancer du sein illustre parfaitement la difficulté de cerner le rôle des facteurs nutritionnels dans la forêt des autres facteurs génétiques, physiologiques et environnementaux impliqués.
Le cancer du côlon est un exemple particulier où les facteurs nutritionnels peuvent revêtir une influence déterminante, bien qu’il existe des facteurs génétiques de prédisposition également
très importants. Une forte proportion de cancers du côlon se développent à partir d’une tumeur bénigne lorsque les cellules de la paroi de cet organe prolifèrent anormalement. Le contrôle de cette prolifération est influencé à la fois par l’état nutritionnel et métabolique du sujet et par la composition du contenu intestinal. La prévention nutritionnelle est loin d’être limitée aux apports de fibres alimentaires qui vont conditionner la qualité des fermentations symbiotiques développées dans le gros intestin. Une ingestion de graisses et de protéines animales associée à une surcharge pondérale est un facteur de risque pour le cancer du côlon via des déviations métaboliques ou via des facteurs présents dans le contenu du côlon. À l’inverse, une consommation diversifiée de produits végétaux complexes (céréales complètes, légumes secs, fruits et légumes), une nutrition lipidique de qualité riche en oméga-3 créent un terrain favorable à la prévention de ce type de cancer. Il est intéressant de noter qu’un même type d’alimentation protectrice, par le biais de la qualité du contenu intestinal, peut à la fois contribuer à optimiser le métabolisme de la paroi digestive et créer un milieu digestif environnant très favorable à la différenciation des cellules du côlon qui perdent ainsi la possibilité de se diviser anormalement.
Pour aboutir à ce fonctionnement optimal, les fibres alimentaires jouent un rôle fondamental par leur rôle sur le transit digestif et par la production d’acides gras à chaîne courte qui auront un impact très fort sur la différenciation des colonocytes. Il est compréhensible ainsi qu’il soit nécessaire de disposer d’une gamme suffisante de fibres de fermentescibilités différentes pour maintenir des fermentations équilibrées tout au long du gros intestin. Les produits végétaux exercent également des effets protecteurs par leur richesse en micronutriments, et ces composés pourront agir par voie générale (apportés par le sang) ou par leur présence dans le contenu intestinal. Ainsi, les nombreuses substances associées aux fibres telles que les polyphénols et les caroténoïdes partiellement absorbées dans l’intestin grêle se retrouvent fort utiles pour la protection de la paroi du côlon. Les fermentations intestinales, selon la nature des apports végétaux et des autres apports alimentaires, vont donc constituer un milieu plus ou moins génotoxique pour la paroi du côlon, et il est surprenant que, malgré cette exposition si particulière, une large majorité d’individus échappe à la cancérogenèse colique, ce qui montre la puissance des facteurs de protection. Une prudence élémentaire est de ne pas s’exposer inutilement à des facteurs de risque par une alimentation désordonnée quant à l’apport régulier de fibres alimentaires, et déséquilibrée sur le plan général. Il est notable d’observer que des facteurs de protection aussi généraux que la vitamine D ou l’acide folique, voire les oméga-3, s’avèrent utiles pour parfaire la prévention du cancer du côlon.
De manière générale, il semble exister des liens entre le bon état nutritionnel et métabolique (voire psychologique) d’une personne et sa capacité à résister au développement potentiel de divers cancers. N’oublions pas que nous sommes tous porteurs de cellules transformées qui, heureusement, seront maîtrisées par nos systèmes de défenses métaboliques et immunitaires. Il est compréhensible dans ces conditions que la surcharge pondérale puisse être aussi un facteur de prédisposition à la genèse de certains cancers tels que ceux du sein ou du côlon.