Sort des différents nutriments à travers le tube digestif
Après une étude organe par organe, puis un récapitulatif d’ensemble, il est peut-être utile de refaire le chemin nutriment par nutriment.
Les lipides
Au niveau de la bouche : Ils subissent une attaque très partielle pur la lipase salivaire.
Dans l’estomac : Ils ne font l’objet d’aucune action enzymatique, mais :
- la mise à la température du corps rend liquide la quasi-totalité des lipides alimentaires;
- les puissants mouvements de brassage de l’antre fragmentent les amas lipidiques et les préparent en fines gouttelettes;
- inversement la richesse du repas en lipides retarde l’ouverture du pylore et stimule la sécrétion de gastrine antrale.
Le pylore déverse lentement et de façon très régulière son contenu, tandis que bile et suc pancréatique sont produits pendant 3 à 4 heures pour chaque repas. De ce fait, aucun triglycéride n’échappe à sa digestion avec formation soit d’acides gras, soit de monoglycérides. Dans le duodénum et le jéjunum supérieur, ces produits sont incorporé à la bordure en brosse de l’entérocyte (jéjuno-iléon) mais immédiatement retransformés en triglycérides dans la cellule elle-même avant d’être déversés liés à des apolipoprotéines dans le lymphatique sous-jacent sous forme de chylomicrons.
Une catégorie de lipides échappe : ce sont les triglycérides à chaîne moyenne (rares dans l’alimentation mais administrés parfois sous forme synthétique). Ils sont en effet capables d’être hydrolysés sans intervention des sels biliaires; les acides gras formés sont absorbés facilement. Bien plus, certains triglycérides à chaîne moyenne (jusqu’à 10 carbones) peuvent être absorbés tels quels sans hydrolyse (donc sans lipase). Ils sont alors drainés essentiellement par voie portale.
Ces particularités, inutiles chez le sujet normal, rendent de grands services en cas d’insuffisance bilio-pancréatique.
Dans le grêle : L’absorption des lipides est possible sur toute la longueur du grêle. Le plus souvent, tout est absorbé dans la première moitié.
Si théoriquement, un repas très riche en graisses, avec vidange gastrique brutale, peut dépasser les possibilités d’absorption du jéjuno- iléon et entraîner une stéatorrhée, en fait, chez l’homme normal ce n’est jamais le cas, puisque la vidange gastrique est d’autant plus lente que le repas est plus riche en graisses.
Sort des protides
Dans la bouche :
Les protides ne subissent que l’action mécanique de la mastication. Il faut toutefois rappeler que la cuisson a représenté, pour beaucoup de protides, un préalable utile entraînant la coagulation et un début de dégradation des grosses protéines.
Dans l’estomac :
C’est là que la digestion protidique commence vraiment, associant les protides alimentaires, les enzymes salivaires et gastriques, et une exsudation de plasma par la muqueuse gastrique.
Ces protéines subissent :
- l’action de l’acide chlorhydrique, acide fort, qui dissocie le collagéne permettant ainsi une meilleure attaque des protéines, dont il débute l’hydrolyse;
- l’action de la pepsine qui ne fait qu’un travail grossier, n’isolant que quelques acides aminés aromatiques lorsqu’ils sont en bout de chaîne (tyrosine, tryptophane, phénylalanine).
Dans le duodénum :
Les protides sont donc encore peu modifiés lorsqu’ils arrivent dans le duodénum. Là ils vont rencontrer les enzymes les plus puissantes : trypsine et chymotrypsine qui scindent les protéines en polypeptides, ceux-ci étant réduits en acides aminés, dipeptides ou oligopeptides par les carboxylases, nucléases.
A la bordure en brosse :
L’absorption des protides se fait sous forme d’acides aminés ou de dipeptides, c’est la bordure en brosse elle-même qui supporte les dernières transformations enzymatiques, terme final étant la formation d’acides aminés à l’intérieur de l’entéro cyte. Ce mélange intime « digestion-absorption » a lieu sur une grandi longueur du grêle : c’est pour les protides que l’absorption est la plus étalée.
Dans le grêle :
Au terme de ce périple, quelques protides (trop volumineux, mal cuits, enserrés de collagène…) vont échapper à lu digestion du grêle ainsi que des protides endogènes sécrétés dans lu partie basse de l’iléon.
Dans le côlon :
Quelques grammes de protides arrivent ainsi dans le côlon, où, subissant l’action des bactéries, ils vont donner lieu à la formation de CO2 de NH3 et de nombreux radicaux aromatiques. Ces modifications coliques ont un rendement nutritionnel négligeable.
Les glucides
Ils subissent une dégradation à tous les étages du tube digestif.
Dans la bouche :
Dès la traversée buccale, l’amylase salivaire attaque les amidons et le glycogène, surtout s’ils sont cuits et non enserrés dans des structures de protection (cellulose pour les végétaux, collagène pour les animaux).
Dans l’estomac :
On l’a vu, l’action de la salive se prolonge A l’intérieur de l’estomac, avant que toutes les couches du bol alimentaire n’aient été complètement acidifiées.
Quand l’amylase est inhibée par le pH acide, c’est l’acide chlorhydric que lui-même, acide fort, qui est capable d’hydrolyser certains glucides.
Ainsi c’est le tiers environ des hydrates de carbone qui se trouve hydrolysé au passage du pylore.
Rappelons ici que la teneur en glucides d’un repas n’influence pas le temps de vidange de l’organe (par opposition aux lipides et aux protides).
Dans le duodénum :
Les glucides rencontrent l’amylase pancréatique, qui s’attaque à ce qui reste d’amidon et de glycogène, pour produire un peu de glucose, beaucoup de maltose, et des dextrines courtes.
Cette action est puissante et rapide, mais laisse intactes les fibres végétales qui poursuivent la traversée du grêle.
Au niveau de la bordure en brosse :
Les glucides vont rencontrer des enzymes plus spécifiques qui permettent le découpage en oses simples :
- pour le lactose existe une lactase,
- pour le saccharose, existe une sucrase,
- pour le tréhalose, existe une tréhalase.
Par contre les produits de digestion de l’amidon et du glycogène peuvent être dégradés par plusieurs enzymes. On trouve :
- une maltase,
- une isomaltase,
- une glucoamylase.
Toutes ces réactions aboutissent à la production de glucose, de fructose, de galactose, qui seront finalement les formes d’absorption des glucides par le grêle.
Dans le grêle :
Toutefois le grêle n’a pas la possibilité de dégrader tous les glucides.
En effet, deux catégories d’aliments ne peuvent être digérés :
- Ceux qui contiennent des grains d’amidon trop volumineux, entourés de fibres et insuffisamment cuits : aucune amylase ne peut ies attaquer en totalité, et ce qui aura échappé à leur action aboutira au côlon.
- Ceux qui contiennent des fibres végétales dont la structure échappe aux actions enzymatiques du grêle. Les fibres alimentaires traversent donc le grêle et parviennent presqu’intactes au cœcum.
Dans le côlon :
C’est pourquoi le côlon joue un rôle si important dans l’achèvement de digestion des glucides : en effet une proportion souvent importante du repas (variable selon le régime) parvient jusqu’à la valvule iléocœcale. Dans le côlon droit, les bactéries de fermentation vont pouvoir dégrader une grande partie de l’amidon résiduel, la cellulose tendre, les hémicelluloses, avec formation de CO2, d’H2, de méthane et d’acides gras volatils :
Le butyrate est surtout utilisé par la cellule colique elle-même.
Propionate et acétate sont absorbés parallèlement au Cl et au Na contre un échange de potassium et passent dans la circulation : foie et muscle peuvent les utiliser.
Par contre la cellulose trop dure, les lignines, les pectines ne rencontrent pas d’enzymes bactériennes capables de les attaquer : elles vont constituer le lest du contenu colique et se retrouver en totalité dans les selles.