Quelques aspects du métabolisme: la source d'énergie du muscle: quelques aspects du métabolisme chez l'homme
L’idée que l’énergie de la contraction musculaire provient du muscle lui-même, c’est-à- dire de la dégradation de ses protéines constitutives, était prédominante à la fin du XIXe siècle. Justus von Liebig (1803-1873) affirmait ainsi, en 1842, que le travail muscu¬laire était proportionnel à la quantité d’azote excrétée dans l’urine. En 1862, le médecin britannique Edward Smith (1819-1874) compara l’excrétion urinaire d’azote chez des prisonniers qui, soit actionnaient la roue d’un « manège de discipline », soit se reposaient. Les résultats qu’il observa portèrent un sérieux coup à la théorie de Liebig.
L’expérience de Smith (1862):
Quatre détenus de la prison de Coldbath Fields à Londres sont mobilisés par Edward Smith pour mener à bien son expérience. Agés de 22 à 43 ans, ces hommes – un plâtrier, un épicier, un boucher et un manœuvre – n’ont passé que quelques mois en prison et sont encore en bonne santé, habitués à produire un travail physique conséquent.
Trois jours par semaine, ils actionnent la roue d’un manège de discipline et sont employés le reste du temps dans la prison à des tâches moins lourdes. Pendant deux semaines, du 3 au 17 mars 1860, l’urine des quatre prisonniers est recueillie le matin entre 6hl5 et 8h25, alors que les sujets, à jeun, fournissent soit leur travail habituel, soit actionnent la roue du manège de discipline. L’urée – principale forme d’excrétion des déchets azotés chez l’homme et, plus généralement, chez les mammifères – est dosée sur les échantillons d’urine collectés. La quantité durée retrouvée dans les urines n’est pas significativement différente chez les sujets se livrant à un exercice physique modéré et chez ceux qui, au contraire, produisent un effort intense. Smith montre ainsi que la production d’urée n’est pas corrélée avec le travail musculaire.
L’expérience de Fick et Wislicenus (1866):
Quatre ans après les travaux d’Edward Smith, c’est une randonnée expérimentale dans les Alpes suisses organisée par deux Allemands, le physiologiste Adolf Fick (1829- 1901) et le chimiste Johannes Wislicenus (1835-1902), qui va porter un coup fatal à la théorie de Liebig. Pour tester l’hypothèse selon laquelle les protéines seraient la seule source d’énergie du muscle, ces deux ingénieux scientifiques réalisent l’ascension du Faulhorn – une «expérience» exigeant un travail musculaire important puisque le sommet est haut de 2 683 mètres – tout en suivant un régime alimentaire totalement dépourvu de protéines.
Le jour précédant l’ascension, les deux physiologistes reçoivent une alimentation solide exclusivement constituée de gâteaux (pâte d’amidon frite dans de la matière grasse). Ils s’abreuvent de thé sucré, de bière et de vin. L’ascension du Faulhorn débute à 5h le matin pour se terminer à 13h20. Parvenus au sommet, les deux hommes, qui ont 1965 mètres de dénivelé dans les jambes, se reposent immédiatement dans l’hôtel du Faulhorn, l’un des premiers établissements d’altitude (il fut ouvert en 1832). Un dosage d’azote est réalisé sur les urines qu’ils ont pris soin de collecter pendant toute la durée de l’ascension ainsi que durant les 6 heures qui ont suivi leur arrivée à l’hôtel.
Fick et Wislicenus montrent que la quantité d’énergie libérée lors de la métabolisation des protéines est insuffisante pour fournir le travail mécanique nécessaire à l’ascen¬sion du Faulhorn, dont elle représente environ la moitié. Ce constat est d’autant plus évident que le calcul de Fick et Wislicenus considère un rendement musculaire de 100%, autrement dit, que toute l’énergie issue de la dégradation des protéines est utilisée par le muscle, ce qui est loin d’être le cas. Le rendement musculaire est en réalité de l’ordre de 20 à 30% seulement. Dans ces conditions, le rapport B/A se situerait aux alentours de 12%.
Les protéines ne peuvent donc pas constituer la seule source d’énergie pour le travail musculaire.
Vidéo : Quelques aspects du métabolisme: la source d’énergie du muscle
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