Pratiques commerciales agressives
Pratiques commerciales agressives
En fait, de mon temps, on ne se posait pas la question puisque les interventions esthétiques étaient presque exclusivement chirurgicales, et réservées à une toute petite avant-garde du show business – que l’on n’appelait pas encore des « people ». Seules les stars du grand écran commençaient, dans le plus grand secret, à faire retoucher leurs traits mais il s’agissait d’un secteur de luxe, réservé à une clientèle de nantis. Les mêmes qui s’habillaient en haute couture et qui se faisaient offrir des bijoux chez les joailliers de la place Vendôme ou de la 5e Avenue.
Ces dernières années, le marché de la médecine et de la chirurgie esthétiques s’est complètement métamorphosé. Car c’est bien d’un marché qu’il s’agit. Des démarches commerciales de plus en plus agressives s’adressent désormais au grand public et veulent convaincre une vaste clientèle potentielle – principalement les femmes de la classe moyenne – que la «jeunesse » n’est plus réservée à une petite élite. Une femme, chirurgien esthétique dans une clinique parisienne, déclarait récemment sur une radio à forte audience nationale :
« On ne peut pas accuser les pratiques esthétiques d’être un luxe, elles sont maintenant à la portée du plus grand nombre. Un visage rajeuni coûte beaucoup moins cher qu’une automobile. Si une femme préfère renoncer à s’acheter une voiture (source de soucis et de dépenses constantes dans une ville comme Paris) pour s’offrir dix ans de moins (source évidente de satisfactions dans toutes les relations sociales et amoureuses) croyez-moi, elle ne regrettera pas son choix ! »
La beau raisonnement que voilà ! Essayez donc de prendre un lifting pour partir en vacances avec le mari, les enfants et le chien ! Plaisanterie mise à part, je m’insurge contre ces démarches marketing, qui font croire que la beauté et la jeunesse sont désormais à la portée de toutes les bourses, quitte à payer sa nouvelle tête à crédit comme on le fait pour une bagnole. D’ailleurs, la preuve de la vocation mercantile de ce style d’interventions fut soulignée, peut-être avec un brin d’ironie, à la fin de l’émission quand le journaliste conclut : « Merci, docteur X. Et je n’oublie pas de préciser, comme vous me l’avez demandé, que vous consultez à la clinique XX… » Et la dame chirurgien, fermement décidée à tirer le maximum de son passage à la radio, d’ajouter : « Oui, et nous sommes également associés avec la clinique XXX. » Les noms des deux cliniques citées étant vraiment faciles à retenir, du moins par les auditrices parisiennes : ils correspondaient à deux célèbres avenue et rue de la capitale.
Une fois de plus, j’ai été scandalisée en écoutant cette publicité à peine déguisée. C’est exactement pour dénoncer ce genre de pratiques que j’ai décidé d’écrire ce livre. Je veux mettre en garde mes compatriotes contre ces marchands du temple de la jeunesse et de la beauté qui ont désormais à leur disposition tous les médias modernes, eux-mêmes