Les états fébriles
La fièvre, quelle qu’en soit la cause, modifie les dépenses énergétiques, protéiques et hydriques, et il faudra en tenir compte en prescrivant le régime.
Principes
- les dépenses énergétiques liées à la fièvre sont faibles et peuvent parfaitement être couvertes par les réserves de lipides (seules les montées et les défervescences thermiques sont coûteuses en énergie). Cependant certains organes tel le système nerveux central ne peuvent couvrir leur dépense énergétique qu’à partir du glucose sous peine de voir s’installer un catabolisme protéique. Il faut donc assurer au sujet fébrile un apport glucidique de 150 g d’hydrates de carbone par jour.
Les dépenses protéiques sont accrues par augmentation du catabolisme protéique, ceci même s’il n’existe pas de catabolisme de néoglucogenèse, (les besoins en glucose étant couverts), et il y a une négativation du bilan d’azote. Pourtant, les besoins protéiques diminuent, une partie des réactions anaboliques ne pouvant se faire.
En pratique, le sujet fébrile doit recevoir la moitié de ses apports protéiques habituels lorsque ceux-ci sont élevés.
Un apport d’environ 50 g de protéines par jour est nécessaire, afin d’économiser les protéines propres du sujet.
- Au cours des accès thermioues s’accompagnant d’accès de sudation importants, un apport excédentaire très large en sel est nécessaire. En revanche, lorsque la température est en plateau, et dans une ambiance thermique favorable, le besoin en sel est normal.
- L’augmentation de la sudation et de la perspiration entraîne une augmentation des besoins d’eau, les pertes supplémentaires étant d’environ 150 cm724 h/C” dans une ambiance thermique favorable avec une hygrométrie moyenne.
Modalités pratiques
- D abord. il ne faut conseiller les classiques « purées compotes » que dans la limite des 150 g d’hydrates de carbone qui peuvent être donnés en effet sous cette forme, mais aussi sous forme de boissons sucrées.
- Ensuite, il est capital d’insister pour que le sujet prenne 50 g de protéines de bonne valeur biologique s’il est très anorexique (s’il n’est pas anorexique, on peut le faire manger normalement).
- Enfin, il est nécessaire d’assurer un large apport d’eau et de suivre la diurèse, et simultanément de fournir un apport sale important ; et lorsque le sujet fébrile est anorexique, donc absorbe peu de sel au cours de ses repas, il ne faut pas hésiter à lui donner des cachets de chlorure de sodium qui sont très facilement acceptes.
Mais ces prescriptions simples doivent triompher de divers obstacles.
- Obstacles physiologiques et socioculturels : s’il est relativement facile d’administrer au sujet fébrile des glucides, de l’eau et du sel, en revanche lui faire absorber au moins 50 g de protéines/j. l’est moins et on doit tenir compte d’un certain nombre d’obstacles, certains physiologiques, d’autres sociopsychologiques. Or il va de soi qu’il ne faut pas chercher à refaire l’éducation diététique du sujet au moment où il a 40”C ; il est donc inutile, voire abusif, de lui imposer des aliments qu’il croit nocifs pour « la fièvre ».
Deux obstacles physiologiques :
L’ingestion de protéines se heurte, d’une part, à l’anorexie constante chez le malade fébrile (on la retrouve expérimentalement lorsque l’on élève la température centrale d’un animal bien portant, mais il est bien évident que chez l’homme ce phénomène purement physiologique est fortement majoré par des facteurs psychologiques).
D’autre part, l’extra-chaleur postprandiale élevée des protéines constitue un autre obstacle : dans les heures qui suivent la prise d’un repas protéique, 25 à 35 % de l’énergie consommée sont obligatoirement dépensés sous forme de chaleur, ce qui accroît l’inconfort. La solution consiste à ne pas donner de repas protéiques massifs, mais à les étaler dans la journée.
Les obstacles socioculturels majorent l’anorexie physiologique du fébrile. Des symboles à peu près constants dans les civilisations du bassin méditerranéen font penser que les nourritures rouges ou foncées sont des nourritures qui donnent à la fois de la force et de la chaleur et qu’elles sont contre-indiquées chez les malades qui ont de la fièvre. La solution la plus raisonnable est de se conformer à ces croyances : d’abord, il n’est pas certain que l’extra-chaleur postprandiale de la viande rouge ne soit pas réellement supérieure à celle d’autres sources de protéines ; et, par ailleurs, il existe des protéines de remplacement dont il est aussi légitime, et plus simple, de se servir, les « nourritures blanches » : viandes blanches, poissons, laitages. (La consommation de lait est psychologiquement très bien supportée par le malade, mais elle doit être évitée lorsque celui-ci n’en a pas l’habitude : en effet, les intolérances sont fréquentes chez l’adulte).
- En pratique, il suffit de se rappeler qu’en première approximation toutes les viandes contiennent 20 % de protéines, si bien que, pour donner les 50 g de protéines nécessaires, on doit prescrire 250 g de viande blanche ou 300 g de poisson ou 5 œufs. Bien souvent le malade anorexique acceptera beaucoup plus volontiers une nourriture qu’il n’aura pas à mâcher même si aucune raison pathologique ne s’oppose à la mastication, d’où l’intérêt de préparations hachées, voire mixées.
- Rien ne motive la diète chez le malade fébrile ; mieux vaut encore le répéter : la diète chez le fébrile, qu’il soit enfant ou adulte, est une ineptie ; de l’eau, du sel, des hydrates de carbone et des protéines doivent être apportés, sinon on risque de provoquer très artificiellement des complications nouvelles qui ne seraient alors pas dues à l’agent causal mais à une mauvaise diététique ; il est parfaitement inutile de mettre un sujet fébrile à la diète ; si bien que lorsque pour des raisons spécifiques, digestives ou autres, il ne peut s’alimenter par la bouche, il faut avoir recours à la sonde ou aux perfusions veineuses pour apporter les éléments indispensables, en particulier les acides aminés.
Vidéo : Les états fébriles
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