Le diagnostic,clé de voûte de la thérapeutique: faire le tri
Un autre facteur vient modérer l’enthousiasme : il existe de nombreux examens et appareillages diagnostiques, mais tous ne sont pas performants, ni même utiles. Certains examens, mis au point il y a 20 ou 30 ans, ont été supplantés par des examens plus profitables. Il n’est donc plus souhaitable de les utiliser. A l’inverse, des appareillages coûteux, lourds, n’ont pas encore trouvé leur place dans l’arsenal de la médecine, parce que les informations qu’ils donnent n’ont pas encore d’intérêt démontré ou de conséquence pratique pour les malades. Or, le coût et le nombre d’examens disponibles sont devenus des préoccupations de premier plan, en matière d’économie de la santé. Il est donc nécessaire de faire le tri.
Depuis une vingtaine d’années, la communauté scientifique internationale s’efforce de délimiter précisément les connaissances acquises sur les maladies, les techniques anciennes ou nouvelles, les protocoles thérapeutiques. Des «conférences de consensus» internationales réunissent ainsi des experts incontestés, et tentent de répondre à des questions précises concernant, par exemple, la place et l’utilité des examens diagnostiques dans le dépistage et l’identification des maladies. Car avant de voir son emploi généralisé, tout appareillage, toute méthode diagnostique doit avoir fait la preuve de son utilité et de sa fiabilité dans deux domaines au moins : sa spécificité et sa sensibilité. La spécificité d’un examen est le fait que celui-ci ne concerne qu’une question bien précise. Ainsi, les appareils qui comptent les globules rouges dans le sang doivent ne compter que les globules rouges etnon l’ensemble des cellules. La sensibilité de l’examen est le seuil à partir duquel il est considéré comme positif. Si l’on dose, dans le sang, des anticorps, on doit savoir précisément à partir de quelle quantité d’anticorps le test en montrera la présence.
Un examen biologique qui ne confirme la présence d’une jaunisse qu’après que la jaunisse soit visible à l’examen du malade à l’œil nu n’aurait aucun intérêt. Le dosage de la bilirubine (qui confère la coloration jaune en cas de jaunisse) dans le sang doit être positif avant que le patient soit devenu cliniquement jaune. Ces deux critères sont indispensables pour juger de la pertinence d’un examen, afin de pouvoir le comparer à des examens existants et surtout d’en connaître les limites. Car les examens diagnostiques doivent toujours être lus en relation avec les données cliniques existantes. Une prise de sang n’a aucun sens si l’on ne connaît pas l’histoire du patient, s’il n’a pas été examiné et si l’on ne sait rien des conditions dans lesquelles il devra apprendre l’existence de sa maladie puis se soigner.
Le développement des examens diagnostiques est, nous le verrons, étroitement lié aux progrès de la chirurgie. La meilleure connaissance du corps permet de pratiquer des interventions plus précises, moins mutilantes que jadis. L’utilisation de certains appareillages pendant une intervention permet de faire un bilan complet des lésions du patient, et donc d’éviter d’avoir à répéter les opérations. Les chapitres qui suivent tiennent compte des données scientifiques les plus récentes en ce domaine, en particulier en ce qui concerne des examens de pratique très courante aujourd’hui : bilan sanguin, échographie, radiographie des seins… Nous verrons que les techniques diagnostiques se classent dans trois catégories principales:
• les examens biologiques, qui étudient -en éprouvette» les substances prélevées dans l’organisme ;
- les explorations radiologiques et apparentées, qui visualisent la forme, le contenu ou parfois le fonctionnement des organes au moyen de rayonnements captés par un appareillage extérieur (rayons X pour la radiographie et le scanner,
rayonnement isotopique pour la scintigraphie, ultra-sons pour l’échographie, champ magnétique pour la résonance magnétique) ;
- les explorations en- doscopiques, pratiquées grâce à de véritables «périscopes» en fibre optique, qui permettent non seulement de voir à l’intérieur d’un intestin ou d’une articulation, mais aussi d’en ôter une tumeur ou d’y injecter un médicament sans devoir recourir à une intervention chirurgicale.