La médecine nucléaire : Politique et législation
Radiologues et médecins nucléaires revendiquent une certaine autonomie dans leur secteur. Encore faudrait-il être capable de bien définir les domaines de compétences de chaque spécialiste. La situation se complique quand budget et investissements font partie de la discussion. À priori les radiologues, implantés depuis plus longtemps et chargés de l’imagerie par Rayons X et par Résonance Magnétique, pourraient prétendre à couvrir l’ensemble du secteur diagnostic. Les médecins nucléaires, spécialisés dans un domaine très pointu, chargés de veiller à toutes les conséquences de l’utilisation de produits radioactifs, se considèrent plus comme des praticiens évaluant le degré d’avancement d’une maladie que de simples techniciens chargés d’appliquer une technologie. Malheureusement, leur budget de fonctionnement est l’un des plus faibles de l’hôpital et le nombre d’hôpitaux équipés de services de médecine nucléaire est très réduit également. Une complication supplémentaire s’ajoute avec l’arrivée des produits de radiothérapie métabolique qui pourraient faire partie du domaine du radiothérapeute. Malheureusement celui-ci, bien que spécialiste du nucléaire, n’est autorisé qu’à utiliser le rayonnement au départ d’une source interne ou externe, mais scellée. La radiothérapie métabolique n’ayant, comme nous l’avons vu, des applications précises que dans certains domaines comme l’oncologie ou la rhumatologie, est prescrite par des oncologues, des hématologues ou des rhumatologues qui s’empressent de considérer la médecine nucléaire comme une unité de service.
Le médecin nucléaire n’a pas la formation, ni l’expérience de l’oncologue. L’oncologue n’a pas les connaissances de l’utilisation de matériaux radioactifs. Le radiothérapeute n’a pas les autorisations pour injecter un produit radioactif et le radiologue ne s’intéresse à priori qu’aux techniques de diagnostic. Ils sont condamnés à travailler en équipe. Les services hospitaliers dans lesquels la médecine nucléaire a réussi à se développer sont ceux où ces spécialistes s’entendent plus particulièrement et où chacun a réussi à trouver sa place et démontrer son utilité sans vouloir pour autant gérer l’autre service.
Le budget annuel d’un médecin nucléaire est prévu pour un certain nombre d’analyses en cardiologie et en oncologie, mais serait épuisé en quelques semaines s’il le dépensait en produits de thérapie. Les oncologues et les hématologues disposent des médicaments les plus chers pour leurs chimiothérapies et pourraient à l’avenir faire
de substantielles économies en substituant certaines chimiothérapies par des radiothérapies, mais ne sont pas encore suffisamment formés ou plutôt informés à ces techniques. Il reste quelques années pour améliorer au niveau hospitalier la répartition budgétaire, mais cela ne pourra se faire que si le ministère de la santé fixe de nouvelles règles qui en fin de compte seraient particulièrement profitables à la fois au patient et au budget de l’état.
Sur fond de limitations budgétaires dans les dépenses de santé et réorganisation des services, la seule alternative pour tous ces spécialistes consiste à mettre en place une vraie coopération et un vrai travail d’équipes multidisciplinaires. On verra apparaître, d’ici quelques années, des centres de très bonnes réputations, spécialisés en radiothérapie métabolique. Ce sont ceux qui auront réussi à créer autour d’un responsable fédérateur et charismatique, qu’il soit oncologue, radiologue, radiothérapeute, médecin nucléaire ou directeur d’hôpital, une équipe efficace dans le traitement des cancers par toutes les nouvelles techniques.
Ce phénomène n’est pas typiquement français et d’autres pays comme l’Allemagne se battent aussi avec le nombre croissant de spécialités médicales qui ne fait que cloisonner les hôpitaux et limite les succès du travail d’équipe. L’administration européenne est en train de s’intéresser de plus près à ce problème et il ne serait pas surprenant de voir paraître sous peu des textes réglementant au niveau européen la répartition par secteurs spécialisés des compétences nécessaires dans un hôpital.