La défense de l’organisme : l’immunité cellulaire
La mise en évidence de la phagocytose:
Dans les dernières décennies du XIXe siècle, un débat scientifique virulent opposa les tenants de l’immunité cellulaire et les partisans de l’immunité humorale (médiée par des solubles présentes dans le sang). Le zoologiste russe Elie Metchnikoff (1845-1916) et les scientifiques français de l’institut Pasteur étaient « cellularistes ». Ils affirmaient que la défense de l’organisme s’appuyait sur la phagocytose des éléments étrangers par des cellules spécialisées qu’ils avaient mis en évidence : les macrophages et les « microphages ».
Les expériences de Metchnikoff (1882 et 1890):
Dans le cadre des études qu’il mène, depuis 1865, sur le développement des échino- dermes, Elie Metchnikoff effectue, en 1882, un séjour à Messine (Italie). Il examine des larves pélagiques d’étoiles de mer sous le microscope :
«J’observais les cellules mobiles [de la cavité cœlomique] de larves transparentes d’étoiles de mer, quand une nouvelle idée me traversa l’esprit : des cellules simi-laires pourraient servir à la défense de l’organisme contre des envahisseurs […] Une écharde introduite dans le corps d’une larve d’étoile de mer, dépourvu de vaisseaux sanguins ou de système nerveux, devrait être rapidement entourée de cellules mobiles […] J’allais chercher quelques épines de rosier et les intro¬duisis immédiatement dans la peau de quelques jolies larves d’étoiles de mer aussi transparentes que l’eau. »
Le lendemain, Metchnikoff vérifie son hypothèse en piquant des épines de rosier dans des larves d’étoiles de mer. Il propose le terme de « phagocyte » pour qualifier les cellules capables d’engloutir un corps étranger qu’il observe alors. Le zoologiste confirme ces premiers résultats en étudiant des petits crustacés d’eau douce, les daphnies, parasités par le champignon Monospora bicuspidata. Certains crustacés survivent à la parasitose. Metchni¬koff remarque qu’ils sont affectés par des souches de champignon entourées et détruites par des phagocytes. En revanche, d’autres souches de Monospora ne sont pas phagocytées et l’hôte parasité meurt.
En 1890, Metchnikoff identifie, chez les mammifères cette fois, deux types de cellules phago- cytaires: les «microphages» et les «macrophages». Il montre que, d’une bactérie à l’autre, les phagocytes qui sont mobilisés par un organisme infecté peuvent être différents :
« Il y a des bactéries qui ne sont englobées que par une catégorie de phagocytes, tandis que d’autres sont mangées uniquement par les phagocytes d’une autre catégorie; d’autres encore par les différentes espèces de ces cellules. Ainsi les spirilles [bactéries spiralées] de la fièvre récurrente [maladie infec¬tieuse transmise par les poux, due à une bactérie du genre Borrelia] et les streptocoques de l’érysipèle [affection dermique caractérisée par des plaques éruptives souvent situées sur la face] ne sont attaqués que par les leucocytes à noyau lobé ou multiple, avec un protoplasma se colorant difficilement, c’est- à-dire par une catégorie de phagocytes que nous appellerons microphages [il s’agit en fait des polynucléaires neutrophiles].
Les bacilles de la lèpre, au contraire, ne se retrouvent jamais dans l’intérieur de ces cellules, mais bien dans les phagocytes à noyau unique et à protoplasma prenant facilement les couleurs d’aniline, c’est-à-dire dans les phagocytes désignés sous le nom de macrophages. Dans cette catégorie se rangent tous les grands leucocytes uninucléaires, les cellules de la pulpe splénique, les cellules étoilées du foie […] .»
Avec ces observations, Metchnikoff fournit des arguments forts en faveur du rôle des phagocytes dans l’immunité dirigée contre les bactéries. Il s’intéressera ensuite à l’in-flammation et montrera comment la phagocytose participe, dans ce cadre, à la défense de l’organisme
Vidéo : La défense de l’organisme : l’immunité cellulaire
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