La chirurgie esthétique : Le charlatanisme chirurgical
L’image troublante de charlatanisme chirurgical a été beaucoup développée dans les années quatre-vingt-dix par les médias.
En effet, dans ces années, un véritable « boom » de la chirurgie esthétique s’est produit. Beaucoup de médecins, qui n’avaient pas la qualification de chirurgien, certains dermatologistes, oto-rhino-laryngologistes ainsi que d’autres spécialistes : gynécologues, chirurgiens généraux, ont été tentés de faire de la chirurgie esthétique et pour certains, d’une façon légitime, dans leur domaine.
En effet, quoi de plus légitime pour un O.R.L. d’opérer des nez esthétiques, pour un gynécologue de faire des réductions ou des augmentations mammaires, des reconstructions du sein après cancer, pour un chirurgien généraliste de faire des plasties abdominales à la suite de grossesses multiples qui ont distendu le ventre ?
La démarche initiale n’est donc pas fondamentalement mauvaise. Mais le vrai problème, c’est que la chirurgie esthétique ne s’apprend pas sur le tas. Il faut de dix à quinze ans de pratique pour pouvoir réellement, pour chacune des opérations que nous avons citées, arriver à une maturité telle que le niveau de complications devient le plus faible possible ; et que si complication il y a, un rattrapage sera possible par le chirurgien qui a opéré, et non pas par un autre chirurgien plus spécialisé auquel on va d’urgence envoyer la complication.
Sous ce terme de charlatanisme, il ne faut donc pas seulement entendre le fait qu’une patiente est opérée par un faux médecin, ou un médecin qui est dévoyé ou qui n’opère que pour l’argent.
En effet, rien ne paraît plus facile à pratiquer que les opérations de chirurgie esthétique, puisque ce sont des opérations non vitales, portant essentiellement sur la peau et ses organes ; la tentation est donc grande de se lancer pour exercer cette chirurgie apparemment très lucrative.
Mais en fait, qu’elle est dure la chirurgie esthétique ! C’est la plus difficile des chirurgies, puisqu’il faut que le chirurgien réussisse à tout coup son intervention du mieux possible, sans cicatrice, avec une symétrie aussi parfaite que possible, et satisfasse la clientèle la plus exigeante. Ces impératifs sont très difficiles à atteindre pour ceux qui se lancent dans la chirurgie esthétique uniquement dans l’intérêt de l’argent.
Dans ces années quatre-vingt-dix, des associations de consommateurs ont mis en avant les complications liées à la chirurgie esthétique.
On s’est alors aperçu que ces complications n’étaient pas seulement le fait de chirurgiens peu experts ou peu habitués à cette chirurgie esthétique, mais que tout chirurgien y était confronté, même quand il s’agissait d’un chirurgien esthétique émérite.
Cette prise de conscience a de nouveau généré une peur de la chirurgie esthétique : une évolution de la jurisprudence semblait montrer que pour un chirurgien, le résultat devait être garanti et non pas les moyens de l’intervention, c’est- à-dire la connaissance des actes de la technique, le fait que l’opération se fasse en fonction de l’art du moment. La garantie du résultat en chirurgie esthétique transforme l’acte opératoire en un produit matériel fini, contrôlable et non soumis aux aléas de la cicatrisation individuelle, de l’infection redoutable ou de la détérioration tissulaire inexorable avec le temps.
De plus, la notion d’obligation de sécurité est à l’ordre du jour ; c’est-à-dire qu’en cas de complication, le chirurgien opérateur doit impérativement guérir son patient. Cela devient très angoissant, car il n’y a plus aucune place pour l’aléa thérapeutique sans faute.
D’où une nouvelle peur de la chirurgie esthétique ! D’autant plus que des campagnes publicitaires éhontées avaient lieu pour prôner la chirurgie esthétique à bas prix, facile, sans risques, très douce, un peu comme l’homéopathie.
Ce passage de la chirurgie esthétique à une dimension soft, cool, paisible, sans risque constitue une aberration visant à lancer un prêt-à-opérer facile, s’opposant à l’image haute couture de la chirurgie esthétique, car déniant tout risque opératoire, ce qui est manifestement un mensonge éhonté.
Le seul moyen d’améliorer un peu cette image est donc de bien faire comprendre que la chirurgie esthétique n’est pas une démarche commerciale et d’ancrer de nouveau la chirurgie esthétique dans la chirurgie réparatrice.
À partir de cette conception anoblie, chacun trouvera son positionnement :
- le chirurgien plus ou moins obsédé par son art ;
- le médecin plus ou moins obsédé par la médecine esthétique ;
- le patient plus ou moins obsédé par son désir d’amélioration — et par l’idée de le faire au plus juste prix.
Vidéo : La chirurgie esthétique : Le charlatanisme chirurgical
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