Glucides et santé,des progrès majeurs a realiser
Glucides et santé,des progrès majeurs a réaliser: la difficile quête des guildes chez les chasseurs-cueilleurs
Le développement humain a sans doute été fortement lié à celui des ressources en glucides. Longtemps cette disponibilité fut insuffisante, et paradoxalement les problèmes nutritionnels actuels concernant les apports glucidiques ne sont toujours pas résolus. Pourtant, il n’existe plus d’obstacles scientifiques, technologiques, économiques notables à la résolution de ces problèmes.
L’homme a, en effet, un besoin particulièrement élevé en glucose pour satisfaire ses dépenses énergétiques. Son cerveau en consomme environ 120 g par jour. Cest aussi le carburant énergétique de nombreux tissus : cellules sanguines, intestin, cœur, poumons, muscles, peau. Même si les acides gras issus des lipides peuvent être utilisés par les muscles dans les efforts de longue durée, le glucose reste une source essentielle d’énergie pour l’effort musculaire et pour l’ensemble de l’organisme. Le besoin en glucose est si impérieux qu’il est souvent ressenti physiquement par chacun d’entre nous, lorsque la glycémie s’abaisse au-dessous de 0,8 g/l. Heureusement, l’organisme peut éventuellement pallier les irrégularités des apports digestifs en fabriquant du glucose à partir du glycogène, ou à partir d’autres composés tels que les acides aminés. Le besoin en glucides est donc plus proche de 60 % de l’énergie totale ingérée que du chiffre de 50 % souvent cité. Cela représente, pour une dépense calorique moyenne, une ingestion de glucides (en équivalent glucose) de plus de 300 g par jour.
Actuellement, il est bien facile de se procurer le pain, les pâtes, le riz, les lentilles, les pommes de terre, les bananes et le sucre pour satisfaire pleinement ce type de besoins en glucides. Il n’en a pas toujours été ainsi. Le monde végétal dans lequel ont évolué nos ancêtres chasseurs-cueilleurs était sûrement bien pauvre en glucides assimilables. Les espèces animales, même herbivores, n’ont jamais su digérer en glucides simples les parois cellulosiques des végétaux. Les feuilles, les baies, les racines, les tiges, consommées par les chasseurs-cueilleurs, contenaient quelques sucres solubles, mais leur teneur en glucides assimilables était bien insuffisante pour nourrir nos ancêtres primates et répondre à un besoin accru de glucose au fur et à mesure que la taille du cerveau s’élevait. Il existait sûrement quelques graines ou d’autres organes végétaux qui contenaient de l’amidon, mais ce polymère de glucose, le seul que l’on sache digérer, le glucide le plus adapté à la physiologie humaine, était bien rare avant le développement de l’agriculture. Il est probable que certains amidons n’étaient même pas digestibles, comme les tubercules de l’ancêtre de la pomme de terre que les premiers habitants d’Amérique du Sud ont pu déterrer. Paradoxalement, nos chasseurs- cueilleurs avaient donc la plus grande difficulté à nourrir leur cerveau à partir des énormes ressources végétales environnantes. Un statut végétarien strict n’aurait pas permis aux primates d’évoluer, de disposer d’une pléthore suffisante de glucose, d’acides aminés et d’acides gras nécessaires au développement de la taille du cerveau. La pratique de la chasse et de la pêche a joué un rôle déterminant pour augmenter la fourniture des acides gras essentiels (à très longue chaîne), indispensables à l’élaboration du tissu cérébral bien que ces acides gras du cerveau puissent aussi être synthétisés à partir d’acides gras précurseurs d’origine végétale. Cependant, la disponibilité en glucides assimilables a dû longtemps être un frein à l’évolution des ancêtres de l’homme. Dans ces conditions, les hommes préhistoriques avaient un régime très riche en protéines, et le glucose provenait de la conversion des acides aminés par un processus qui est mieux gérer la santé par l’alimentation appelé la néoglucogenèse. Cette situation de carnivore forcée correspond à des adaptations métaboliques proches du jeûne et accélère fortement le vieillissement des organismes.
les progrès de l’agriculture
Le passage à l’agriculture, qui a commencé quelque dix mille ans avant J.-C., a permis de disposer de ressources glucidi- ques, principalement de l’amidon, totalement inhabituelles pour l’organisme humain. En théorie, la disponibilité de nouvelles sources de glucose fut un grand avantage pour la nutrition cérébrale mais aussi pour ralentir la néoglucogenèse à partir des acides aminés, diminuer les besoins de viande et placer l’organisme dans un mode de fonctionnement plus satisfaisant et plus favorable à la longévité. En réalité, la stabilisation de l’habitat, la réduction du territoire de vie contribuèrent sans doute à créer des problèmes nutritionnels nouveaux en diminuant la diversité des ressources disponibles.
La disponibilité en aliments glucidiques, à la suite de la culture des céréales, a été la préoccupation de tous les peuples pour leur survie. Les produits céréaliers permettent une bonne couverture des besoins nutritionnels de l’homme, si bien qu’une large majorité des peuples a bâti son développement agricole et agroalimentaire sur cette ressource. Longtemps les récoltes furent irrégulières, les famines fréquentes et les ressources en céréales, une source de spéculations. Ces dernières sont encore une arme géopolitique déterminante. Dans les populations européennes, le fait de ne disposer principalement que de céréales comme source de glucides constituait un système bien fragile. En France, les habitants se nourrissaient principalement de pain, et son manque récurrent fut à l’origine de nombreuses famines et de révoltes dont la plus célèbre est la Révolution française.
Notre Parmentier comprit le bénéfice évident de disposer d’une autre source de glucides pour s’affranchir des aléas des récoltes céréalières. Dans certains pays, la pomme de terre en vint même à supplanter les céréales pour assurer la nourriture des populations, mais les très mauvaises récoltes de ce tubercule, atteint de brunissure au milieu du xrxesiècle en Irlande, provoquèrent une famine terrible et l’émigration d’un million et demi d’irlandais vers le continent américain. D’autres populations, dans le pourtour de la Méditerranée, ont bénéficié de la culture des légumes secs ou des châtaigniers pour pallier les insuffisances des récoltes de céréales ou de pommes de terre.
Au cours des deux cents dernières années, l’autre bouleversement dans l’approvisionnement en glucides fut provoqué par le développement de l’industrie sucrière à partir de la betterave à la suite du blocus continental destiné à maîtriser l’expansionnisme napoléonien. Rien ensuite n’arrêtera l’homme dans cette recherche effrénée d’une forte disponibilité en glucides. La sélection variétale, les progrès de l’agronomie, un usage intensif d’engrais et de pesticides permirent d’accroître de façon considérable les rendements en céréales, en pommes de terre, en betteraves sucrières.
la double dévalorisation des aliments glucidiques
Au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, alors que les problèmes d’approvisionnement étaient enfin résolus pour une partie de l’humanité, un double processus de dévalorisation des aliments glucidiques, dont nous payons encore les conséquences, survint : le premier par le raffinage ou la purification trop poussés des produits végétaux, le second par une dépréciation du pain et des divers féculents parés d’une image d’aliments triviaux, de faible intérêt nutritionnel. Ainsi, à l’aube du xxf siècle, la problématique apparemment bien simple d’une bonne nutrition glucidique n’est toujours pas résolue. Bien que stabilisée, la consommation de sucre raffiné visible et caché (dépourvu de toute trace de minéraux et micronutriments) atteint des proportions irraisonnables de 10 à 20 % des apports énergétiques totaux, diminuant d’autant la densité nutritionnelle des régimes. À ce vide nutritionnel occasionné par le sucre, il faut ajouter la perte des trois-quarts de minéraux et de vitamines dans le raffinage des céréales. Cela signifie que 30 à 50% de notre alimentation est artificiellement appauvrie en micronutriments et que les glucides n’apportent plus les composés nutritionnels qui leur étaient naturellement associés.
La situation est devenue encore plus caricaturale à la suite du développement d’une nouvelle industrie de transformation des céréales en amidon ou en sucres simples. En effet, il est possible de produire du glucose et du fructose à partir de l’amidon extrait des céréales, d’où l’abondance de ces sucres dans beaucoup d’aliments et de boissons. De plus, la production d’amidon à partir des céréales est devenue une industrie florissante, si bien que l’on retrouve ce glucide purifié dans beaucoup de préparations alimentaires.
Nous consommons une quantité insuffisante de glucides, et, selon certains avis, il serait même utile, dans ces conditions où l’offre est de piètre qualité nutritionnelle, d’en consommer encore moins pour prévenir les maladies métaboliques. On connaît le succès populaire aux États-Unis de la méthode du docteur Atkins qui préconise une forte réduction des apports de glucides. Une telle stratégie aboutit nécessairement à une impasse, à une quasi- impossibilité de gérer correctement la santé par l’alimentation. La limitation des apports en glucides, au-dessous de 45 % des apports énergétiques, impose des contraintes alimentaires et métaboliques anormales à l’organisme. Évidemment, il faut interrompre ce cercle vicieux, redonner une juste place aux aliments glucidiques pour bénéficier d’un approvisionnement en glucose avec un environnement nutritionnel (apport de micronutriments) qui facilite les régulations physiologiques et favorise un état de bonne forme et de bien-être.
Si notre alimentation en glucides est si mal gérée, si vin développement aberrant de la production de glucides purifiés (des sucres simples jusqu’à l’amidon), de boissons et d’aliments sucrés a pu se produire, c’est à l’évidence dû à un manque de prise de conscience par les pouvoirs publics, les professionnels et les consommateurs, au caractère anormal de notre chaîne d’approvisionnement en glucides.
Compte tenu de la puissance de l’outil de production agricole et de transformation industrielle des denrées, une mauvaise perception des besoins nutritionnels provoque des conséquences insoupçonnées sur l’équilibre énergétique et nutritionnel des populations.
Le consommateur lui-même a cédé aux sirènes du plaisir sucré et s’est laissé persuadé du caractère trivial de la pomme de terre, du pain, des légumes secs, des pâtes et du riz. Moins il satisfait ses besoins en glucides par ces aliments de base riches en amidon (mais aussi en d’autres composés nutritionnels complémentaires lorsque la complexité des produits végétaux est préservée), plus il sera amené à chercher des produits de substitution souvent sucrés et associés à des matières grasses, ce qui contribue à déréguler sa prise alimentaire.
Alors qu’il a fallu des milliers d’années pour maîtriser les apports de glucides dont la valeur inestimable était représentée par la symbolique du pain, il aura suffi de moins de cinquante ans pour dégrader leur image, leur qualité et altérer leur consommation. Évidemment, il faut maintenant entreprendre un effort de valorisation de ces aliments de base dans la chaîne alimentaire et auprès du consommateur. Pour cela, il est nécessaire que la problématique des apports alimentaires en glucides, les spécificités de leur métabolisme soient beaucoup mieux comprises.
Des critères de qualité trop imprécis
plémentaires lorsque la complexité des produits végétaux est préservée), plus il sera amené à chercher des produits de substitution souvent sucrés et associés à des matières grasses, ce qui contribue à déréguler sa prise alimentaire.
Alors qu’il a fallu des milliers d’années pour maîtriser les apports de glucides dont la valeur inestimable était représentée par la symbolique du pain, il aura suffi de moins de cinquante ans pour dégrader leur image, leur qualité et altérer leur consommation. Évidemment, il faut maintenant entreprendre un effort de valorisation de ces aliments de base dans la chaîne alimentaire et auprès du consommateur. Pour cela, il est nécessaire que la problématique des apports alimentaires en glucides, les spécificités de leur métabolisme soient beaucoup mieux comprises.
Des critères de qualité trop imprécis
La qualité des glucides est souvent assimilée à leur vitesse de digestion, si bien qu’ils sont classés et perçus principalement comme des glucides lents ou rapides. Cette caractéristique ne suffit pas à exprimer la valeur nutritionnelle des diverses sources de glucides qui est mieux définie par leur composition et par un ensemble de propriétés physiologiques : rôle dans le fonctionnement du tube digestif, effet sur la satiété, efficacité hypocholesté- rolémiante des fibres, impact sur le métabolisme hépatique ou sur la sécrétion d’insuline. Sans être un puits de science, on peut savoir que des apports trop élevés de fructose peuvent augmenter les triglycérides du sang ou bien que la pomme ou les légumes secs contribuent à diminuer le cholestérol sanguin.
À la différence des autres composés énergétiques Qipides et protéines), il n’existe pas de réserves notables de glucides dans l’organisme, seulement deux à trois cents grammes de glycogène. Les réserves de glucose constituées par le glycogène sont rarement épuisées, et les glucides ingérés sont destinés majoritairement à être brûlés pour assurer le fonctionnement du cerveau et de la plupart des tissus. Notre organisme a donc besoin d’un apport en glucides étalé dans le temps, grâce à l’ingestion d’aliments dits de faible index glycémique. En effet, il faut éviter d’élever trop fortement la glycémie, ce qui augmente la sécrétion d’insuline avec le risque d’une diminution, à la longue, de la sensibilité des tissus à cette hormone. La notion d’index glycérique définit en fait la capacité d’un aliment à augmenter la concentration de glucose dans la circulation générale au cours des heures qui suivent le repas. L’index leucémique permet de comparer le degré d’hyperglycémie induit par un aliment par référence à un apport glucidique standard de même grandeur. Cela a permis de mettre en évidence l’abondance des aliments de fort index glycémique dans la chaîne alimentaire actuelle.
Attention ,sucres purifiés!:Du glucose lentement et surement
Dans l’ensemble, la consommation de sucres simples (glucose, saccharose et fructose) sous des formes très diverses est beaucoup trop élevée. Ces sucres simples ont été qualifiés de sucres rapides. Cette qualification est imprécise. Le saccharose et le glucose sont effectivement très vite absorbés, alors que l’absorption du fructose seul est plus lente et celle du lactose variable selon les sujets. Au niveau métabolique, la consommation de glucose est très hypergly- cémiante alors que celle du saccharose, du fructose et du lactose élève plus faiblement la glycémie. Les sucres simples sont donc plus ou moins rapidement absorbés et ont un pouvoir hyperglycémiant très différent en fonction de leur métabolisme hépatique ; leur qualification de glucides rapides est donc approximative. En fait, ce qui différencie le plus les diverses sources de glucides simples provient de leur environnement en fibres, minéraux et micronutriments. Cela explique que les glucides simples des fruits n’ont pas d’effets pro-oxydants (aboutissant à la production de molécules délétères telles que les radicaux libres à la différence du saccharose ou du fructose consommés sous forme purifiée. Pour ne pas compliquer la perception du consommateur, et surtout pour faciliter ses choix, il est important de mettre l’accent sur le concept de glucides purifiés ou non, plutôt que sur le qualificatif rapide ou lent.
Il peut cependant être intéressant de comparer la vitesse de digestion des produits riches en amidon. En effet, cette réserve naturelle de glucides, commune à une très grande diversité
d’espèces végétales, est stockée sous forme de granules de taille et de structure différentes et elle présente de très grandes différences de digestibilité. La cuisson est parfois indispensable pour favoriser la digestion de l’amidon, pour rendre, par exemple, la pomme de terre ou les légumes secs comestibles. Lorsque l’amidon est bien protégé par un réseau protéique (dans le cas des pâtes alimentaires) ou par un réseau de fibres (légumes secs), il est moins vite absorbé que lorsque le granule d’amidon est éclaté (dans le pain par exemple). La structure moléculaire de l’amidon peut également influencer sa digestibilité, de même que les traitements technologiques ou les procédés de cuisson. Il est donc intéressant de comparer l’index glycémique des produits céréaliers, des légumes secs ou de divers féculents. Cela a permis de mettre en évidence que les pâtes alimentaires, haricots, pois chiches, lentilles étaient des aliments parfaitement adaptés à la physiologie humaine, alors que le pain blanc très aéré était trop vite absorbé, de même que de nombreuses préparations de céréales de petit déjeuner. Dans une optique de bonne nutrition, il importe de ne pas exposer l’organisme à une charge glycémique trop élevée. Celle-ci est le résultat du produit de l’index glycémique par les quantités de glucides ingérées. Les sujets exposés à des charges glycémiques élevées ont tendance à mal réguler leur prise alimentaire, et, de plus, la synthèse de graisse est stimulée dans les tissus adipeux. Diverses enquêtes épidémiologiques indiquent également que les populations habituées à ces régimes hyperglycémiants ont une plus forte prédisposition au diabète et aux maladies cardio-vasculaires, et, selon de nombreux experts, le développement de certains cancers (côlon) pourrait en être favorisé.
Malgré l’importance de ces données, toute l’information sur les glucides ne doit pas seulement être centrée sur la valeur de l’index glycémique ; la densité nutritionnelle globale doit être aussi considérée et satisfaisante. Par exemple, un biscuit de faible index glycémique demeure une source de calories vides s’il est majoritairement confectionné avec de la farine blanche, du sucre et des matières grasses ! H ne suffit pas de parvenir à réduire l’index glycémique d’un aliment pour garantir sa qualité, c’est l’ensemble du profil nutritionnel de l’aliment qui doit être équilibré.
Préserver la complexité alimentaire
L’effet santé des glucides a été relié trop schématiquement à leur index glycémique alors que leur densité nutritionnelle est une de leurs qualités primordiales. La plupart des sources de glucides comprennent une très grande diversité d’autres composés qui jouent un rôle dans leur impact physiologique. La compréhension du rôle de ces autres constituants aurait dû mettre un frein à la production de glucides purifiés, ce qui n’a pas été le cas. Pour que l’absorption et le métabolisme du glucose ou du fructose soient optimisés, il faut que les glucides soient accompagnés d’éléments complémentaires ou synergiques tels que les protéines, les fibres alimentaires, les minéraux et les micronutriments. En fait, ces éléments sont tous apportés par les céréales complètes, les légumes secs et la plupart des fruits et légumes, et sont perdus dans les glucides purifiés ou retrouvés en quantité insuffisante dans les produits raffinés. Il existe en particulier une complémentarité essentielle entre glucides et protéines : les glucides ont un moindre effet hyperglycémiant lorsqu’ils sont accompagnés d’un taux normal de protéines, et réciproquement l’apport glucidique facilite la synthèse protéique à partir des acides aminés.
De même que les glucides doivent être environnés de protéines, il est important qu’ils soient inclus dans une matrice alimentaire constituée par les fibres non digérées dans l’intestin grêle. Cela permet d’étaler l’absorption des glucides notamment lorsque les fibres enchâssent les grains d’amidon ou ont une viscosité suffisante pour ralentir la vitesse d’absorption du glucose. La présence de fibres permet également d’entretenir des fermentations symbiotiques dans le côlon, de régulariser le transit digestif et de favoriser l’état de satiété.
L’apport de glucides doit être également accompagné d’une teneur suffisante en minéraux, en potassium, en magnésium dont l’alimentation de type occidental est bien mal pourvue. On sait à quel point la consommation excessive de glucides purifiés s’effectue sans la présence de potassium, or ce minéral accompagne toujours les sucres des fruits.
Les glucides ont tellement eu une place centrale dans l’alimentation humaine que les procédés alimentaires ou les usages individuels ont conduit à les déconnecter des autres composés nutritionnels auxquels ils doivent être obligatoirement associés, si bien, par exemple, que l’apport en fibres alimentaires est devenu en moyenne très insuffisant. De plus, des travaux récents ont bien mis en évidence le caractère pro-oxydant des glucides isolés de leur matrice naturelle (en particulier du saccharose et du fructose). On comprend tout l’intérêt de l’environnement désoxydation potentiellement présent dans de nombreux produits végétaux. La vitamine C et les caroténoïdes, ainsi qu’une très grande diversité de polyphénols, participent à la protection de l’organisme face aux risques liés au métabolisme des glucides. De ce point de vue, il est difficile de mettre sur le même plan le sucre purifié ou les sucres présents dans les fruits et légumes ou le miel. Il est évident que, si le développement des transformations agroalimentaires, à l’origine de la « transition nutritionnelle » que nous avons connue, se mettait en place aujourd’hui, il y aurait une forte incitation à purifier le moins possible les sources de glucides.
Le métabolisme pour pallier les aléas de l’alimentation
Un des buts d’une bonne nutrition préventive* est de faciliter la régulation de la glycémie. Lorsque l’organisme ne dispose pas de cet approvisionnement optimal, il s’adapte, mais cela a souvent des conséquences négatives à long terme. Le glucose a en effet un rôle central pour le fonctionnement de l’organisme. Cependant, en cas de manque de glucides alimentaires, le foie a la capacité d’en synthétiser à partir des acides aminés provenant de la digestion intestinale ou du métabolisme corporel. Le seul métabolisme que ne sait pas faire l’organisme est de transformer les acides gras des lipides en glucose. Au niveau des tissus, le glucose peut même être épargné, recyclé sous forme de lactate, que le foie pourra convertir à nouveau en glucose. Si le repas est pauvre en glucides et riche en viande, la néoglucogenèse à partir des acides aminés est particulièrement importante. En fin de compte, le fait de réduire largement les glucides (pain, pâtes, riz) de la ration alimentaire quotidienne oblige l’organisme à en syn-thétiser. Cette erreur, reproduite à lechelle de centaines de millions d’hommes, en particulier dans les pays occidentaux, aboutit à une très mauvaise gestion des productions agricoles, avec une utilisation de plus en plus élevée de céréales en nutrition animale et une consommation peu diversifiée et peu adaptée des céréales par l’homme. La production alimentaire doit mieux assurer, en les valorisant, en garantissant leur qualité nutritionnelle, la couverture des aliments glucidiques. En bout de chaîne, c’est au consommateur d’adapter ses modes alimentaires pour fournir à son organisme l’approvisionnement suffisant en glucose avec un environnement en nutriments et micronutriments adéquat.
Dans les périodes où l’absorption digestive est achevée, le cerveau, à lui seul, consomme la moitié du glucose, et les acides gras ne peuvent pas servir de carburant de substitution. Cela explique à quel point nos facultés d’attention sont tributaires d’une bonne régulation de la glycémie. Combien de milliers d’enfants ou d’adultes se retrouvent, en état d’hypoglycémie, dans l’incapacité d’être attentifs, à la suite d’une mauvaise gestion de la nature et du rythme de leurs repas ? Un petit déjeuner de pain blanc, accommodé de confiture, est suffisamment hyperglycémiant pour stimuler une forte sécrétion d’insuline, ce qui va réduire prématurément la production hépatique du glucose alors que le repas a été trop insuffisant pour fournir ce carburant jusqu’en fin de matinée. Parfois, c’est la prise d’alcool à jeun qui provoque une hypoglycémie sévère, bien néfaste lorsqu’il s’agit d’assurer certains réflexes comme la conduite automobile. Prise en même temps que le repas, la consommation modérée d’alcool, de vin ou de bière perturbe beaucoup moins la glycémie et donc le comportement du buveur.
Pour assurer un approvisionnement régulier de glucose à l’organisme, il est nécessaire de consommer des sources de glucides au cours des trois repas quotidiens, mais, selon les besoins physiologiques de chaque individu, les quantités à ingérer peuvent être extrêmement variables.
Le declin de la consommation de glucides
L’homme occidental du début du xxi* siècle consomme beaucoup moins d’aliments glucidiques complexes que ses grands- parents ou arrière-grands-parents nés au début du XXesiècle, mais davantage de produits sucrés. Il ne semble pas que la consommation du glucose par le cerveau humain ait pu bien changer. Deux raisons principales expliquent la forte réduction de consommation de pain, de pommes de terre ou de légumes secs chez nos contemporains. La première origine de ce changement a résulté de la surabondance en produits sucrés, en matières grasses et en produits animaux de l’offre alimentaire, ce qui a poussé le consommateur à délaisser les produits végétaux traditionnels. La seconde explication est liée au développement actuel de la sédentarité. Le travail manuel comme tout exercice physique augmentent fortement la consommation du glucose par les muscles, même si les matières grasses via les acides gras jouent un rôle important dans l’entretien de l’effort physique de longue durée. D’ailleurs, si la glycémie chute trop fortement, la capacité d’effort physique s’effondre. Heureusement, l’entraînement physique peut contribuer à réduire très fortement l’utilisation du glucose, au profit des acides gras ; grâce à cette mobilisation lipidique, l’effort est plus durable, moins épuisant, moins générateur d’espèces oxygénées réactives et de radicaux Ubres. Les travailleurs manuels qui nous ont précédés auraient pu bénéficier d’une meilleure nutrition lipidique, mais les huiles végétales étaient bien peu disponibles, et même les sources de graisses saturées animales étaient limitées. Il est compréhensible qu’ils aient eu besoin de manger jusqu’à un kilo de pain pour soutenir l’immensité et la permanence de leur effort physique, mais cette alimentation monotone était peu adaptée à leurs besoins.
Les pièges de la sédentarité
L’implication des gluides dans la surcharge pondérale
Puisque le glucose sanguin est notre substrat énergétique majeur, il convient de bien assurer l’approvisionnement en glucides en évitant les excès comme les manques, en contrôlant leur impact par un bon environnement en protéines, en lipides ou en micronutriments. Dans un régime complexe comportant une proportion souvent élevée de lipides, toute surconsommation de glucides participe à la prise de poids. Si l’apport de matières grasses est très limité, les glucides sont peu efficaces pour stimuler la synthèse de graisses au sein de l’organisme. Pourtant on sait à quel point le pain est perçu par un large public comme un aliment redoutable qui fait grossir. Certes, le pain comme divers produits céréaliers ou féculents peuvent participer à l’excès calorique d’un repas bien arrosé de lipides. Dans ces conditions, les aliments glucidiques facilitent la mise en réserve des lipides du repas par le biais de la sécrétion de l’insuline qui est une hormone fortement lipogénique. L’association glucides-lipides, bien que naturelle et nécessaire, facilite grandement la prise de poids. Il est évident qu’il faut, avant de diminuer la consommation de pain, réduire surtout les quantités de matières grasses et souvent les deux produits à la fois.
En fait, pour être équilibrante, une nourriture doit être abondante et légère (sur le plan calorique), d’où le rôle irremplaçable de la diversité des produits végétaux, des produits céréaliers ou des pommes de terre riches en amidon jusqu’aux légumes très pauvres en glucides. Il revient à chacun d’adapter la proportion des divers féculents ainsi que celle des fruits pour obtenir une densité en glucides appropriée aux besoins corporels et aux modes de vie. L’ensemble de ces produits végétaux, par leur richesse en fibres, ont un effet satiétogène et favorisent la régularité des prises alimentaires. Ainsi, une réduction volontaire des apports glucidiques, sans une consommation abondante de fruits et légumes, met l’organisme en grande difficulté. D’ailleurs, la réduction de la consommation de pain, de pâtes, de riz ou d’autres féculents est souvent remplacée par des sucres visibles ou cachés dans des produits transformés divers (boissons, biscuits, etc.). Ces glucides souvent très vite absorbés gardent toute leur efficacité pour faciliter le stockage des graisses alimentaires. En revanche, une alimentation pauvre en lipides et riche en produits céréaliers et en légumes, comme les régimes de nombreuses populations asiatiques ou bien les diètes pratiquées par les sportifs de haut niveau, induit très difficilement des surcharges pondérales et de plus permet d’éviter le développement du diabète de type 2.
Pourquoi l’alimentation actuelle augmente-t-elle le daibèle
L’homme occidental, devenu sédentaire, a réduit fortement sa consommation de glucides complexes, et cela a paradoxalement favorisé une augmentation considérable des situations d’intolérance au glucose, caractéristique du diabète de type 2. Cette maladie métabolique diffère du diabète classique dont l’origine est la destruction précoce des cellules du pancréas chargé de sécréter l’insuline. Cette hormone a un rôle indispensable pour favoriser l’utilisation du glucose, principalement dans deux grands territoires, les muscles et le tissu adipeux. Ainsi, après un repas, il est nécessaire de stimuler l’utilisation du glucose pour normaliser la glycémie, et l’insuline joue un rôle clé dans cette régulation. L’effet de cette hormone est facilité si les glucides sont lentement absorbés et ne sont pas accompagnés d’une trop grande quantité de lipides. C’est pourquoi le développement du diabète de type 2 est favorisé par une mauvaise gestion de la qualité des glucides et de leur accompagnement en lipides. Le simple fait de remplacer systématiquement et à long terme une partie des lipides de la ration alimentaire par des aliments glucidiques complexes de bonne qualité nutritionnelle peut avoir des effets favorables dans la prévention du diabète de type 2, le plus fréquent, celui qui survient chez les sujets âgés. Ce mode alimentaire permet aussi d’éviter la surcharge pondérale qui joue elle-même un rôle clé dans le développement de ce type de diabète.
La prévalence du diabète de type 2 est en très forte augmentation dans le monde (de 100 millions actuellement, elle pourrait atteindre 300 millions dans dix ans). En France, cette pathologie atteint 3 % de la population, soit environ 1,8 million de personnes, et nous sommes loin d’être le pays le plus touché. Ce type de diabète correspond schématiquement à un état de résistance à l’insuline souvent compliqué de désordres dans la sécrétion pancréatique de cette hormone. L’insuline devient moins efficace pour contrôler la glycémie, en particulier parce que les acides gras provenant de l’excès lipidique environnant, celui du régime alimentaire ou celui des graisses corporelles, perturbent l’action de l’insuline.
Dans 75 % des cas, c’est au surpoids et à l’obésité que l’on attribue le diabète de type 2, qui est devenu, et de beaucoup, le plus fréquent (neuf cas sur dix). Ce diabète touche maintenant des sujets de plus en plus jeunes (moins de vingt ans), alors que l’on pensait qu’il fallait plusieurs dizaines d’années de déviation métabolique pour l’induire. Pour qualifier cette nouvelle épidémie, les scientifiques ont inventé le mot de diabésité pour associer les deux syndromes de diabète et d’obésité. La brusque augmentation du diabète dans un très grand nombre de pays, et surtout chez des populations migrantes habituées à des nourritures rustiques, est
fortement liée à l’occidentalisation des modes de vie, à l’industrialisation alimentaire et à la sédentarité. Il est surprenant que le bouleversement des facteurs environnementaux aboutisse à des déviations cellulaires et moléculaires aussi spécifiques que celles du diabète.
Dans ce syndrome, la liaison de l’insuline à son récepteur perd de son efficacité, elle ne parvient plus à stimuler l’utilisation du glucose dans les tissus sensibles tels que les muscles ou les tissus adipeux. De plus, cette hormone n’est plus capable de moduler la synthèse de glucose par le foie qui se met à produire trop de glucose, même lorsque les apports digestifs pourraient suffire à l’organisme. Le mauvais contrôle de la glycémie, après le repas et même à jeun, maintient une imprégnation trop forte des tissus par le glucose, entretient un processus de glucotoxicité aboutissant ainsi à une glucosylation anormale de nombreuses protéines et à une production excessive de radicaux libres.
Beaucoup de personnes ignorent qu’elles sont diabétiques ou prédiabétiques parce que la présence d’une quantité légèrement trop importante de glucose dans le sang ne provoque pas de symptôme évident. Les personnes en surpoids, avec un tour de taille très élevé, une forte répartition des graisses au niveau du ventre, sont, pour la plupart, prédisposées à un diabète de type 2. À titre d’exemple, les hommes qui ont un tour de taille supérieur à 1 mètre présentent un risque majeur de développer, à plus ou moins long terme, cette maladie insidieuse. L’élévation de la glycémie semble toxique pour les vaisseaux et les microvaisseaux ; ainsi, le diabète s’accompagne de complications vasculaires au niveau des reins, des yeux, du système nerveux et cardio-vasculaire. Cette pathologie est la première cause de cécité et de troubles visuels, d’amputation d’un pied ou d’une jambe et même de l’impuissance masculine. Avec un diabète, le risque d’avoir un infarctus du myocarde, un accident vasculaire cérébral ou une insuffisance rénale devient très élevé. Changer de mode de vie, d’alimentation, accroître les dépenses physiques ne doit pas rester des vœux pieux et concerne une large partie de la population.
Compte tenu de la susceptibilité particulière de certaines populations, les biologistes ont recherché les gènes de sensibilité
Mieux gérer la santé par l’alimentation • 95
pouvant rendre compte de l’expression d’un phénotype diabétique chez certains sujets. En fait, pour le diabète, comme pour l’obésité, il existe principalement un profil multigénique de prédisposition et non une origine génétique unique du diabète. Tout se passe comme si les bouleversements des facteurs environnementaux, des habitudes alimentaires permettaient de mettre en évidence les populations ou les sujets les moins adaptés aux nouvelles conditions de vie ou, réciproquement, les plus adaptés à des modes de vie traditionnels. Avec une activité physique élevée et des aliments naturels peu transformés, les chances de développer un diabète deviennent infimes.
Pourquoi l’alimentation actuelle est-elle devenue diabéto- gène ? Sûrement à la suite d’un apport trop élevé de matières grasses visibles ou cachées (40 % de l’énergie totale), de sucres purifiés ou de céréales fortement raffinées, une consommation insuffisante de glucides complexes lentement digérés (pâtes, légumes secs, riz et pain complet) et de fruits et légumes. Dans ces conditions, l’offre en produits transformés fournit ainsi une énergie parfaitement assimilable trop faiblement accompagnée de micronutriments.
Les excès d’apport lipidique créent une forte compétition entre glucose et acides gras pour leur utilisation énergétique. Cette compétition est d’autant plus grave que l’absorption gluci- dique est rapide, nécessitant une intervention très puissante de l’insuline pour assurer le maintien de la glycémie. L’effet bénéfique de l’exercice physique est largement lié à la stimulation de l’utilisation des acides gras par les muscles, ce qui évite qu’ils soient en compétition avec le glucose.
Il existe aussi un lien très fort entre le développement du diabète et la mauvaise densité nutritionnelle des régimes en minéraux et micronutriments, d’où le rôle extrêmement néfaste des sucres purifiés, des produits raffinés et de tous les aliments riches en calories vides. Les rôles protecteurs de la fraction non énergétique des produits végétaux pour la prévention du diabète sont de nature très diverse et bien peu pris en considération : effet de la matrice des aliments pour ralentir la vitesse d’absorption du glucose, effet des antioxydants pour prévenir les altérations cellulaires et moléculaires provoquées par les radicaux libres et une imprégnation trop élevée de glucose, effet des vitamines pour faciliter l’utilisation énergétique du glucose et des acides gras, effet des minéraux et des micronutriments pour assurer une protection vasculaire.
Il existe donc un lien de cause à effet entre la sédentarité, l’offre des supermarchés en aliments énergétiques de faible valeur nutritionnelle et le développement du diabète de type 2, entre des modifications environnementales apparemment très générales et des événements cellulaires et moléculaires très précis et très sophistiqués. Cela signifie tout simplement que notre organisme n’est pas adapté à des conditions environnementales si particulières par rapport à l’histoire de l’humanité.
Connais-toi-meme
Puisque nos dépenses individuelles, notre environnement et nos modes de vie varient fortement, il revient à chaque individu, diabétique ou non, d’adapter la charge glycémique de son alimentation à son mode de vie, à ses besoins nutritionnels en ajustant les proportions des aliments pourvoyeurs d’amidon et des produits végétaux bien moins riches en glucides tels que les fruits et légumes. Il peut sembler paradoxal, pour les sujets diabétiques, de se sentir encouragés à consommer en relative abondance des produits végétaux de bonne qualité nutritionnelle, cependant ils doivent faire preuve de plus de rigueur dans leurs choix alimentaires.
Les quantités de produits riches en amidon à consommer augmentent théoriquement avec le niveau des dépenses physiques. Pour ceux ou celles qui fonctionnent avec des apports caloriques alimentaires très faibles, il est important de réduire très fortement les calories inutiles (le sucre, les matières grasses cachées), avant de diminuer le pain, le riz, les légumes secs. Pour tous, la consommation de fruits et légumes doit être le plus élevée possible avec un strict minimum de 300 g de fruits et de 300 g de légumes par jour.
Le pain, les féculents, tout ce qui évoque l’amidon revêt, pour une bonne partie du public, un caractère trivial, de lourdeur, de fadeur, à l’inverse de beaucoup d’autres mets parés d’une image plus noble, voire festive. Il est important de corriger cette vision générale. Les sources d’amidon ne sont pas des aliments d’accompagnement secondaire (du pain pour déguster le fromage, des pommes de terre pour accompagner la viande, des lentilles pour servir la saucisse), ils constituent la base de notre alimentation. Par contre, les produits céréaliers et les divers féculents ont effectivement besoin pour équilibrer leurs qualités orga- noleptiques ou nutritionnelles d’être associés, relevés, enrichis par des produits complémentaires : viandes, fruits et légumes, matières grasses, herbes, épices, aromates. Si l’accompagnement en viandes ou matières grasses gagne à être plutôt modéré, l’association avec les fruits et légumes devrait être le plus généreuse possible. Cela est nécessaire pour disposer d’une panoplie suffisante de phytomicronutriments, beaucoup moins abondants dans les produits amylacés que dans les autres produits végétaux.
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