Examens de laboratoire : Bilans systématiques , intérêts et limites
Aujourd’hui, en France, les «bilans de santé» destinés au grand public, dans le cadre du travail ou de l’école, se multi- plient. Pourtant, dans d’autres pays très avancés sur le plan médical (États-Unis, pays nordiques, Royaume-Uni), l’intérêt de ces bilans systématiques est contesté, non sans arguments. Le dosage du cholestérol est un exemple très démonstratif. Le cholestérol, pensait-on depuis plus de 30 ans, est un facteur de risque d’athérosclérose (dépôts contenant des graisses et du calcium, qui «encrassent» les artères, leur font perdre leur élasticité et favorisent leur occlusion). Faire baisser le cholestérol semblait donc un objectif raisonnable. Par ailleurs, la sophistication des techniques biochimiques a permis de faire des dosages de plus en plus précis des lipides sanguins. On a ainsi pu identifier différentes fractions du cholestérol, dont l’élévation ou la baisse s’accompagne, selon le cas, d’une augmentation ou d’une diminution du risque d’accident cardio-vasculaire (infarctus du myocarde). De cette découverte (qui n’est que le résultat d’un travail statistique,rappelonsle) sont nées les notions de «bon» et de «mauvais» cholestérol. Ce qui a donné lieu à une véritable inflation d’examens et de bilans.
Des résultats expérimentaux sont cependant venus, peu à peu, tempérer ce bel enthousiasme. D’une part, le cholestérol n’est pas le facteur le plus important de l’athérosclérose : le tabagisme est infiniment plus déterminant, l’obésité et l’existence d’une hypertension artérielle sont également ** très importantes. P » Le cholestérol ne vient qu’ensuite. D’autre part, les grandes expérimentations américaines, effectuées sur des milliers de patients, visant à prévenir l’apparition des infarctus chez les hommes présentant un cholestérol élevé, ont montré que la baisse du cholestérol réduit un peu (mais pas énormément) le nombre d’infarctus, mais ne diminue pas la mortalité : les hommes traités meurent d’autre chose !
D’autres notions, encore peu connues, incitent à ne généraliser ni le dosage du cholestérol, ni le traitement systématique des hypercholestérolémies modérées : les femmes ne présentent pas du tout les mêmes risques que les hommes en matière d’athérosclérose ; le fonctionnement hormonal féminin semble bien prévenir l’athérosclérose pendant toute la période d’activité génitale.
Un cholestérol trop bas semble accompagné d’une augmentation de la fréquence de certains cancers.
Enfin, les phénomènes d’athérosclérose observés dans la population américaine (toujours prise comme référence en matière de santé, en raison de l’importance des travaux effectués aux États-Unis) ne sont pas semblables à ceux de la population française, beaucoup moins touchée malgré une alimentation fort riche.
Cet exemple montre que l’apparition de méthodes de dosage n’est pas forcément synonyme de meilleure prévention ou de meilleur dépistage des maladies