Affronter les bouleversements alimentaires : L'altération du goût
Le manque de transparence des produits transformés mais aussi l’altération du goût des produits de base sont les défauts récurrents de notre chaîne alimentaire. La perte des repères organoleptiques est un des ressentis les plus troublants pour beaucoup de consommateurs. Ce désarroi concerne particulièrement le goût des fruits et légumes dont l’apparence extérieure est souvent déconnectée des qualités organoleptiques des produits (quelle bizarrerie de la sélection végétale effectuée par l’homme). Il ne s’agit pas seulement de la perte de goût par rapport à des repères récents mais bien d’une attente déçue par rapport à des critères organoleptiques sans doute fortement enracinés dans nos systèmes de perception. Ce type de désappointement, largement répandu vis-à-vis du goût des tomates, des pommes ou du pain de mauvaise qualité, est rassurant sur la capacité des populations à réagir face aux dérives des systèmes de production intensifs. Cependant, si le type d’offre alimentaire actuel persiste, il est probable que la normalité des goûts évolue, sous le poids des habitudes et du temps, vers les aliments standard omniprésents. Cette évolution n’est pas sûre, pour quelques groupes de population, des goûts typés pourraient demeurer fortement ancrés dans une sorte de patrimoine alimentaire. Ainsi, la quête de certaines caractéristiques organoleptiques pourrait longtemps encore être recherchée. L’exemple du retour du bon pain que les Français ont tant souhaité après plusieurs dizaines d’années de pain excessivement pétri, blanchi et si facilement rassis est rassurant quant à notre capacité de réaction positive. Le contre-exemple est celui d’une large couche d’Américains, devenus « accros » d’aliments totalement artificiels, de pains dopés d’additifs, de produits sucrés, de sauce tomate et de breuvages artificiels, de pseudo- charcuteries, d’œufs dénaturés, de glaces géantes et de fromages aseptisés.