Le mental Anticancer : Le désir de vivre et les cellules immunitaires
Près de Washington, dans son laboratoire voisin de celui de Candace Pert, au National Cancer Institute, le même Ron Herberman avait aussi montré que parmi les femmes souffrant d’un cancer du sein, celles qui réussissaient à faire psychologiquement face à la maladie avaient des cellules NK beaucoup plus actives que celles qui sombraient dans la dépression et l’impuissance33. En 2005, le docteur Susan Lutgendorf, à l’université de l’Iowa, a confirmé ces résultats chez des femmes souffrant d’un cancer des ovaires. Celles qui se sentaient entourées et soutenues, qui gardaient le moral, avaient des cellules NK plus combatives que celles qui se sentaient seules ou abandonnées et émotionnellement perturbées.
Tout se passe comme si les globules blancs du système immunitaire – comme les cellules NK et les lymphocytes T et B – étaient sensibles au sentiment d’impuissance et à la perte du désir de vivre qui en découle. Chez les rats de Martin Seligman soumis à des chocs électriques qu’ils ne peuvent esquiver, l’impuissance se manifeste par des symptômes très proches de ceux qu’on observe chez les humains traumatisés : ils semblent avoir perdu toute confiance en eux et restent inertes face à toutes les autres situations difficiles ; en situation de compétition, ils se montrent soumis et passifs, ne se défendant même plus lorsqu’ils sont agressés. C’est précisément dans ces circonstances que leur système immunitaire, lui aussi, baisse les bras. Tout se passe comme si l’état émotionnel qu’on peut observer de l’extérieur à travers le comportement de l’individu se reflétait à l’identique dans le comportement interne des cellules immunitaires ! Quand le rat – ou la personne – abandonne, avec le sentiment que la vie ne vaut plus la peine d’être vécue, le système immunitaire rend les armes lui aussi. Comme l’a si bien décrit Candace Pert, ce sont deux aspects du même « cerveau »
À l’inverse, trouver en soi le désir de vivre signale un tournant décisif dans le cours de la maladie.
Helen avait 52 ans quand elle apprit qu’elle souffrait d’un lymphome très grave. Les six chimiothérapies de rigueur n’avaient pas donné d’effet satisfaisant. Et deux traitements supplémentaires n’avaient fait qu’augmenter la virulence des cellules cancéreuses. Le seul espoir qui restait était le recours à une intervention particulièrement dangereuse – l’autogreffe de moelle – qui fait appel à des substances chimiques si toxiques qu’elles entraînent la destruction totale du système immunitaire. Helen avait dû passer trois semaines en chambre d’isolation complète. Ses visiteurs n’y entraient qu’après une stricte procédure de stérilisation, corsetés dans une tenue qui leur donnait l’allure d’astronautes. Helen avait le sentiment pénible qu’elle ne vivait plus sur la même planète que ces étranges visiteurs, et qu’elle n’y reviendrait peut-être jamais.
Au bout des trois semaines, son état s’était tellement dégradé qu’elle n’avait pas pu sortir de l’isolement. En la voyant si maigre et fragile, ses visiteurs se demandaient s’ils ne la rencontraient pas pour la dernière fois. Et ils ne pouvaient ni
l’embrasser, ni lui prendre la main, ni même lui sourire puisque leur visage était caché par un masque stérile… Mais, au moment où l’espoir ne tenait plus qu’à un fil, où son corps semblait sur le point de lâcher, Helen s’accrocha à la seule chose qui avait toujours été là, comme un chien fidèle et affectueux – la sensation de son souffle dans sa poitrine. La signature même de la vie qui perdurait, malgré les doutes, les peurs, la nausée, malgré la douleur aussi. Accrochée à sa respiration, un souffle après l’autre, elle se connectait au fond d’elle-même à cette envie de vivre qui venait de chaque cellule et qui la reliait à tout ce qui était vivant autour d’elle : l’arbre et ses feuilles qu’elle pouvait voir par la fenêtre, les rires et les pleurs des enfants qui passaient dans le couloir, les étoiles parfois à la nuit tombée. Elle en retirait un sentiment étrange de paix. Comme si rien ne pouvait vraiment l’affecter puisque, quoi qu’il dût arriver, la vie qui passait au travers d’elle continuerait. Aujourd’hui, douze ans plus tard, elle a repris son travail et vit normalement. Elle s’émerveille encore de la force que lui a donnée cette connexion profonde, quasi animale, à l’élan vital qui nous unit tous.
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