Le cancer du sein : Radiothérapie
Passons maintenant au troisième temps
de la stratégie thérapeutique. Quel va être le traitement locorégional complémentaire ?
Une radiothérapie. Elle doit être débutée dans les quatre semaines après la fin de la chimiothérapie ou les quatre semaines après la chirurgie s’il n’y a pas d’indication de chimiothérapie. On constate malheureusement aujourd’hui des retards, dus à l’encombrement et au manque de personnels techniques des services de radiothérapie. Ici encore, le plan Cancer a prévu de combler ces lacunes.
En quoi consiste cette radiothérapie pour les cancers du sein ?
Autrefois, on ne disposait que du cobalt, sous la forme d’une source radioactive permanente enfermée dans une boîte de plomb. Pour laisser échapper les rayons, on ouvrait un clapet ; l’irradiation n’était pas très précise et souvent à l’origine de complications locorégionales (brûlures, risques de débordement de la zone à irradier).
Aujourd’hui, on utilise des accélérateurs linéaires : on « fabrique » avec de l’électricité des rayons de haute énergie qui ont l’avantage de traverser la peau très vite, sans l’abîmer, avec des faisceaux très précis, permettant de cadrer en surface et en profondeur la zone à irradier. Le traitement s’étale sur plusieurs semaines, au rythme de quatre à cinq séances d’irradiation par semaine (chaque séance durant 2 à 3 minutes), de manière à délivrer 10 grays par semaine.
Quels territoires irradie-t-on et à quelles doses ?
Irradier la glande mammaire…
Dans les cas où la chirurgie a pu être conservatrice, le traitement dure six à sept semaines : 45 grays sont administrés dans le sein, et un complément de 15 grays est ensuite administré dans la zone cicatricielle, à l’endroit où se trouvait la
tumeur qui a été enlevée. En lieu et place de ce complément d’irradiation, dans certaines indications, on peut envisager une curiethérapie qui consiste à introduire ® un fil radioactif dans la zone cicatricielle correspondant au site de la tumeur qui a été enlevée. Cette curiethérapie nécessite vingt-quatre à quarante- huit heures d’hospitalisation dans une chambre protégée.
Quand la chirurgie a consisté en une mastectomie, on n’administre une radiothérapie que dans les cas où la tumeur mesurait plus de 3 cm ou pour certains plus de 4 cm, ou s’accompagnait de ganglions envahis ou d’atteinte cutanée ou pectorale. On délivre alors 45 grays sur la paroi thoracique, et le traitement dure quatre semaines et demie.
Irradie-t-on aussi les ganglions ?
…et les zones à risques
On n’irradie plus aujourd’hui, sauf très rare exception, l’aisselle. En effet, si le curage ganglionnaire de la chaîne axillaire a montré que les ganglions étaient normaux, il n’y a aucune raison de le faire, et si l’analyse du curage ganglionnaire a montré qu’un ou plusieurs ganglions étaient envahis, on estime que l’éradication des ganglions par l’acte chirurgical est suffisante. En revanche, dans ce dernier cas, on irradiait autrefois les autres aires ganglionnaires du côté où se trouvait le cancer et qui risquaient d’être contaminées : ganglions du creux sus-cla- viculaire et parfois de la chaîne mammaire interne (derrière le sternum). Mais aujourd’hui, on pense que ces pratiques destinées à être préventives comportent plus de risques que d’avantages et on tend à les abandonner.
Quels sont les risques d’effets secondaires de cette radiothérapie par accélérateurs linéaires ?
Les effet secondaires
Aujourd’hui, la sophistication des techniques de radiothérapie (radiothérapie conformationnelle…) a réduit très largement les complications.
Les réactions locales peuvent être très différentes d’une personne à l’autre.
Certaines femmes font une radiodermite du sein, ou de la paroi thoracique (quand le sein a été enlevé), qui se traduit par une peau rouge et douloureuse comme après un coup de LfiS effefs soleil. D’autres non. Durant la radiothérapie, il d’ailleurs fortement conseillé de s’abstenir de tout traitement photosensibilisant (par exemple certains antibiotiques et les anti-inflammatoires non stéroï- diens). Contre ces radiodermites, qui peuvent durer plusieurs semaines (voire des mois), il existe des pommades plus ou moins efficaces.
Une seconde réaction locale relativement fréquente est un œdème du sein, parfois minime, mais qui peut aussi être important et durer plusieurs mois.
Dans les mois ou les années suivant l’irradation, des remaniements tissulaires peuvent survenir dans le sein qui a été irradié, réalisant une « cyto-stéato-nécrose ». L’image mammogra- phique d’une cyto-stéato-nécrose peut simuler une récidive tumorale, et parfois seule une microbiopsie viendra lever le doute. Autre complication possible de la radiothérapie, même localisée comme elle l’est ici : elle peut faire baisser les globules sanguins, et la numération-formule sanguine doit être surveillée pendant la période d’irradiation.
Autrefois, l’irradiation axillaire, quand on la pratiquait, contribuait, après mastectomie-curage, à l’apparition d’un « gros bras » (lymphœdème). L’irradiation du creux sus-claviculaire exposait au risque de « plexite » (atteinte neurologique du membre supérieur). Enfin, l’irradiation de la chaîne mammaire interne, qui se trouve derrière le sternum, est susceptible d’endommager le cœur qui se trouve derrière, surtout si la patiente reçoit en même temps une chimiothérapie potentiellement toxique pour le cœur : c’est pourquoi, si une telle radiothérapie doit être envisagée dans certains cas spéciaux, elle ne peut être administrée qu’avec des précautions
extrêmes et une technologie sophistiquée (irradiation confor- mationnelle).
Finalement, le principal effet indésirable de la radiothérapie est qu’elle oblige à retarder la reconstruction mammaire d’au moins six mois. En effet, pendant les six à douze mois qui suivent une radiothérapie, les tissus irradiés continuent à « travailler » et une prothèse mise en place risquerait de se rétracteravec des conséquences esthétiques très préjudiciables.