Le cancer du sein invasifs : Les traitements
Selon quels paramètres allez-vous traiter ces cancers de moins de 2 cm avec envahissement ganglionnaire ?
Tout d’abord, le traitement sera beaucoup plus maximaliste pour les cancers avec plusieurs ganglions envahis que pour ceux où seul un ganglion aura été atteint. Pourquoi <?• Parce que dans ce dernier cas, il est probable que le flux des cellules malignes aura été beaucoup moins important et prolongé que dans celui d’un envahissement de quatre, cinq ou dix ganglions.
Lorsque cinq à dix ganglions sont touchés, on soupçonne fortement qu’il y ait malheureusement déjà des micrométastases dans l’organisme. En effet, cet envahissement massif des ganglions témoigne de l’agressivité des cellules tumorales et du fait qu’elles ont été capables de se frayer un chemin pour sortir du sein. Vous comprendrez pourquoi, dans ces cas, on est obligé d’administrer un traitement de chimiothérapie particulièrement lourd. (L’agressivité des cellules tumorales est plus importante que la taille de la tumeur.)
Après avoir déterminé le nombre des ganglions envahis et l’agressivité des cellules il faut prendre en compte pour choisir le meilleur pronostic de la présence ou non de récepteurs hormonaux à la surface des cellules cancéreuses et l’âge de la patiente. Bien sûr, pour combattre au mieux l’adversaire, je fais dès le départ « l’état des lieux » : un bilan complet d’examens (analyse de sang, scintigraphie osseuse, échographie du foie, radio du poumon). Les résultats doivent me renseigner non seulement sur l’extension du mal, mais aussi sur l’état de santé de cette femme qui va entrer pendant plusieurs mois dans une lutte difficile contre le cancer. Il faut absolument savoir quels risques thérapeutiques peuvent être pris pour sauver sa vie.
Quels traitements allez-vous administrer aux femmes ménopausées dont les tumeurs expriment des récepteurs hormonaux ?
Cancer hormonodépendant
Chez les femmes de moins de 70 ans, après l’ablation de la tumeur et le curage ganglionnaire, qui ont donc démontré un envahissement des ganglions de l’aisselle, j’administre une chimiothérapie durant quatre à six mois : les drogues et les doses seront adaptées au cas par cas, selon les paramètres de la tumeur. Ensuite, je prescris un traitement de radiothérapie classique de six semaines, habituellement, mais là le sein ne sera pas le seul organe à être irradié : le radiothérapeute irradiera aussi les ganglions de l’aisselle ainsi que derrière le sternum et au-dessus de la clavicule. En même temps qu’elle recevra cette radiothérapie, la patiente sera soumise à un traitement d’hormonothérapie qui se prolongera cinq ans. Au moins certains résultats récents sont en faveur d’une prolongation à dix ans (au lieu de cinq) du traitement hormonal en faisant appel pour la deuxième période du traitement à une anti-œstrogène d’une famille différente de celle utilisée pendant les cinq premières années ; par exemple le tamoxifène puis une antiaromatase.
Et en ce qui concerne les femmes atteintes de ce même type de cancers mais qui ont plus de 70 ans ?
Je tiens d’abord à dire que, d’une manière générale, on ne décide pas du traitement en regardant l’extrait de naissance de la femme, mais en procédant à une évaluation préalable de son état de santé. Dans mon service, à l’hôpital Paul-Brousse, toutes les patientes âgées de plus de 70 ans bénéficient d’une évaluation très complète qui nous renseigne sur leurs capacités physiques et le fonctionnement de leurs organes. L’évaluation inclut également le fonctionnement cérébral et moteur ; bref, nous voulons connaître le degré d’autonomie de la patiente. Enfin, j’intègre aussi les aspects familiaux et sociaux de cette patiente.
La chirurgie, la radiothérapie et l’hormonothérapie, si la tumeur est sensible à ce traitement, ne posent pas de problèmes particuliers pour l’immense majorité des femmes âgées.
Pour les tumeurs qui ne peuvent bénéficier de l’hormonothérapie parce que les cellules tumorales n’expriment pas de récepteurs hormonaux, l’indication de la chimiothérapie dépend de l’évaluation des risques de rechute et de l’espérance de vie de la patiente. Il n’y a plus de tabou, comme ce fut le cas pendant longtemps à les traiter comme les femmes plus jeunes si l’évaluation de leur état de santé est satisfaisant.
Et en ce qui concerne les femmes atteintes de ce même type de cancers mais qui ont plus de 70 ans ?
Je tiens d’abord à dire que, d’une manière générale, on ne décide pas du traitement en regardant l’extrait de naissance de la femme, mais en procédant à une évaluation préalable de son état de santé. Dans mon service, à l’hôpital Paul-Brousse, toutes les patientes âgées de plus de 70 ans bénéficient d’une évaluation très complète
qui nous renseigne sur leurs capacités physiques et le fonctionnement de leurs organes. L’évaluation inclut également le fonctionnement cérébral et moteur ; bref, nous voulons connaître le degré d’autonomie de la patiente. Enfin, j’intègre aussi les aspects familiaux et sociaux de cette patiente.
La chirurgie, la radiothérapie et l’hormonothérapie, si la tumeur est sensible à ce traitement, ne posent pas de problèmes particuliers pour l’immense majorité des femmes âgées.
Pour les tumeurs qui ne peuvent bénéficier de l’hormonothérapie parce que les cellules tumorales n’expriment pas de récepteurs hormonaux, l’indication de la chimiothérapie dépend de l’évaluation des risques de rechute et de l’espérance de vie de la patiente. Il n’y a plus de tabou, comme ce fut le cas pendant longtemps à les traiter comme les femmes plus jeunes si l’évaluation de leur état de santé est satisfaisant
Abordons à présent une nouvelle catégorie de patientes : celles de moins de 70 ans, qui présentent un cancer sans récepteurs hormonaux. Là, quelle va être la prise en charge ?
Cancer non hormonodépendant
Chez ces femmes, il est impératif d’administrer un traitement dechimiothérapie faisant appel au médicament le plus actif pendant quatre à six mois. Après cette chimiothérapie, la patiente sera soumise à un traitement de radiothérapie pendant cinq à six semaines (le même que celui prescrit aux patientes précédentes, porteuses de récepteurs hormonaux). L’intensité de ces traitements est proportionnelle aux risques évalués, notamment en fonction de la gravité de l’atteinte ganglionnaire. Ce n’est pas la même chose d’avoir un ou dix ganglions envahis. L’évaluation au microscope de l’agressivité de la tumeur, notamment de sa capacité à dépasser les frontières physiologiques telles que la capsule (l’enveloppe) des ganglions, influera sur le choix de la chimiothérapie. Si les cellules tumorales expriment l’antigène HER-2, on pourrait proposer d’utiliser l’immunothérapie par l’herceptine seul ou associé à la chimiothérapie. Mais cette démarche n’est pas encore complètement scientifiquement validée, même si elle semble prometteuse, rappelons que les tumeurs HER-2 positives sont peu fréquentes.
Et quand ces femmes qui ont des tumeurs sans récepteurs hormonaux et qui ont plus de 70 ans, modifiez-vous ce dernier traitement ?
Une surveillance médicale très stricte
de radiothérapie pendant cinq à six semaines (le même que celui prescrit aux patientes précédentes, porteuses de récepteurs hormonaux). L’intensité de ces traitements est proportionnelle aux risques évalués, notamment en fonction de la gravité de l’atteinte ganglionnaire. Ce n’est pas la même chose d’avoir un ou dix ganglions envahis. L’évaluation au microscope de l’agressivité de la tumeur, notamment de sa capacité à dépasser les frontières physiologiques telles que la capsule (l’enveloppe) des ganglions, influera sur le choix de la chimiothérapie. Si les cellules tumorales expriment l’antigène HER-2, on pourrait proposer d’utiliser l’immunothérapie par l’herceptine seul ou associé à la chimiothérapie. Mais cette démarche n’est pas encore complètement scientifiquement validée, même si elle semble prometteuse, rappelons que les tumeurs HER-2 positives sont peu fréquentes.
Et quand ces femmes qui ont des tumeurs sans récepteurs hormonaux et qui ont plus de 70 ans, modifiez-vous ce dernier traitement ?
Si, avec les résultats du bilan complet d’examen de santé, on a la démonstration que l’organisme est capable de supporter une chimiothérapie, on administre le même protocole qui utilisé chez les femmes plus jeunes (mais avec quelques ajustements des doses, si nécessaire, après évaluation des principales fonctions de l’organisme). Lorsque la patiente présente un problème, par exemple cardiaque ou rénal, on sélectionnera des drogues non toxiques pour le cœur ou le rein, et on commencera prudemment, avec des doses faibles.
Durant ces différents traitements, comment se déroule la surveillance ?
Ces femmes à risques sont soumises à une surveillance très stricte. Quand elles suivent une chimiothérapie, elles font effectuer un examen de sang avant chaque perfusion, afin que l’on puisse vérifier comment la moelle osseuse a supporté le traitement (si les globules rouges et blancs, les plaquettes sanguines n’ont pas trop baissé et aussi comment ils remontent). On est très attentif aussi à la fonction cardiaque : on surveille régulièrement le cœur de ces patientes au moyen d’une écho- cardiographie lorsque des médicaments toxiques pour le cœur sont utilisés. Les mêmes précautions seront prises vis-à-vis du fonctionnement rénal. Pour la chute éventuelle des cheveux, on propose un casque de refroidissement du cuir chevelu, mais cela n’est pas très bien supporté et l’efficacité en est partielle et inconstante. Mais les cheveux finissent par repousser et sont de bonne qualité. Il y a aussi les nausées et vomissements avec certaines chimiothérapies que l’on combat et atténue par des médicaments antivomitifs. Les femmes se plaignent aussi beaucoup d’une prise de poids qui les gêne énormément et qui peut persister. Celle-ci peut être accentuée par l’hormonothérapie, qui, de plus, peut s’accompagner de bouffées de chaleur. Pour toutes ces misères qui s’ajoutent au stress de la découverte de la maladie, un soutien médical et psychologique est très utile. En général, ce sont les premiers cycles de traitement qui sont les plus difficiles.
Ensuite, toutes ces femmes sont, chaque année, soumises à une mammographie, une radio du thorax, un examen de sang très spécifique destiné à vérifier le taux des « marqueurs » et souvent d’autres contrôles de leurs organes. Ainsi, en cas d’irradiation du médiastin, on surveillera les fonctions cardiaques et respiratoires à très long terme.
Pouvez-vous nous expliquer ce que sont les « marqueurs » tumoraux ?
Il s’agit de substances qui existent naturellement mais en très petite quantité dans le sang de sujets normaux, et dont le taux monte lorsqu’elles sont fabriquées parles cellules cancéreuses.
On les identifie parfaitement par une simple analyse de sang, mais toutes les tumeurs du sein ne fabriquent pas ces marqueurs. C’est pour cette raison que chez ces patientes, je fais doser les marqueurs dans le sang avant même qu’on ait enlevé la tumeur. Si les dosages sont positifs, je sais déjà que j’aurai là un moyen simple de suivre l’efficacité du traitement.
Avec ces différents protocoles thérapeutiques, quels résultats obtient-on aujourd’hui chez les femmes atteintes de ce cancer de moins de 2 cm avec envahissement ganglionnaire ?
Actuellement, on estime qu’on est parvenu à un taux de 65 à 75 % de guérison définitive. On peut dire que les traitements actuels ont permis, au cours des dix dernières années, de sauver 20 % de patientes en plus.