la paralysie du sommeil
Les mouvements oculaires et les ondes cérébrales ne sont pas les seuls indicateurs du sommeil REM. D’autres modifications, non moins bizarres, surviennent aussi. Comme on l’a dit, les muscles ¿u squelette se relâchent pendant la phase de l’endormissement, et ce relâchement atteint son apogée au stade 4 du sommeil, le stade le plus profond. Or, on remarque un changement supplémentaire du tonus musculaire qui survient dans le sommeil REM : il disparait entièrement. Dans ce type de sommeil, en effet, nous sommes ans un état de totale paralysie musculaire, et il s’agit là, aussi, d un phénomène provoqué par une variation spontanée de l’activité cérébrale. De même qu’il existe un mécanisme qui inhibe les impulsions nerveuses envoyées par les récepteurs sensoriels vers le cortex, il existe un mécanisme inhibiteur inverse, qui opère du cerveau en direction des muscles. Il empêche la transmission des impulsions nerveuses du cortex cérébral moteur — des différentes zones liées au contrôle musculaire — à la colonne vertébrale. Cette inhibition des impulsions nerveuses est effectuée par la transmission de signaux spécifiques de la zone du cerveau connue sous le nom de tronc cérébral en direction de la colonne vertébrale, et ce sont ces signaux qui modifient les caractéristiques de l’activité des cilles nerveuses dans la colonne vertébrale, provoquant une paralysie. Pourquoi, dès lors, y a-t-il des mouvements oculaires rapides ? Parce que le contrôle des muscles oculaires n’est pas opéré via la colonne vertébrale, mais à travers des fibres nerveuses spécifiques qui sortent du tronc cérébral, et ces fibres ne sont pas affectées par la paralysie. Il apparaît que certaines personnes sont parfaitement conscientes de cette paralysie motrice qui accompagne le sommeil REM, et il ne s’agit certes pas d’une expérience plaisante. Dans ces cas-là, le dormeur se réveille avec un sentiment de paralysie aigu, il est incapable de mouvoir ses mains ou ses pieds, il a du mal à ressentir ses propres mouvements respiratoires, et c’est pourquoi il redoute de ne plus respirer et même de s’étouffer. Seuls ses yeux lui obéissent, parcourant la chambre avec effroi, comme pour appeler au secours. Beaucoup de patients qui décrivent ces « paralysies du sommeil » s’en souviennent comme d’expériences suscitant une véritable panique. Tandis qu’ils s’efforcent d’appeler à l’aide, ils sont incapables de produire le moindre son, et la peur de s’étouffer est succinctement décrite comme une « peur de mourir » dans son sens le plus fort. Bien que, dans la plupart des cas, il s’agisse là d’un événement unique ou rare, dans quelques cas, c’est un phénomène récurrent, se produisant parfois plusieurs fois par semaine. Quand on enregistre le sommeil de personnes souffrant de ce trouble, on découvre que la paralysie se produit toujours après un réveil du sommeil REM. Nous pouvons comprendre, à partir de ces expériences, que le mécanisme qui inhibe les signaux nerveux sur leur trajet depuis le cortex cérébral moteur vers la colonne vertébrale n’est pas levé après l’éveil du dormeur, et que la commande des muscles continue à être inhibée pendant l’état de veille. Même sans intervention extérieure, une attaque de paralysie du sommeil se dissipe après quelques minutes, mais le fait de toucher le patient paralysé, ou même de l’appeler par son nom, y met immédiatement un terme. Il existe un autre exemple remarquable de paralysie musculaire, où le patient s’assoupit aussitôt que sa tête se pose sur l’oreiller et sombre immédiatement dans le sommeil REM, sans passer à travers les quatre premiers stades : ces patients peuvent tomber dans le sommeil REM directement, qu’ils soient debout, assis, ou même au volant d’une voiture. L’attaque du sommeil leur fait perdre le contrôle de leurs muscles, ce qui peut être évidemment extrêmement dangereux. On appelle ce trouble « nar- colepsie » : il sera décrit plus en détail au chapitre xx. Quand nous passons en revue les découvertes de l’histoire de la recherche sur le sommeil, il semble que nous ayons affaire à une sorte de puzzle géant, où de nouvelles pièces, régulièrement, prennent la place qui est la leur. De nombreuses pièces n’ont été posées que très récemment. Il est devenu évident, par exemple, que la grande régularité du rythme respiratoire et du pouls qui caractérise les stades du sommeil profond est remplacée par une certaine irrégularité. Dans le sommeil REM, les rythmes respiratoire et cardiaque subissent d’importantes fluctuations, comme si le dormeur riait aux prises avec un fort bouleversement émotionnel. Une autre découverte a été effectuée quatre ans environ avant la découverte du sommeil REM, mais n’a été introduite dans le du sommeil REM que quelques années plus tard. Des cher- : heurs allemands ont mis en évidence le fait que le sommeil de l’homme était caractérisé par un certain nombre d’érections du pénis se succédant toutes les quatre-vingt-dix minutes. Les chercheurs pensaient que ces érections étaient probablement la cause ¿e certains rêves, mais ils ignoraient tout du sommeil REM. C’est seulement dans les années soixante qu’il est devenu clair qu’une érection accompagne, en effet, le sommeil REM. stade 3, intermédiaire entre le sommeil léger du stade 2 et le sommeil profond du stade 4. Comme pour le stade 1, la transition la veille au sommeil, le stade 3 est de courte durée. Quand apparaît le stade 4, en quelques instants les seules ondes que l’on peut remarquer sur l’enregistrement sont les ondes delta. Ici intervient une certaine stabilisation de l’activité cérébrale, et, pendant les rente ou quarante minutes qui vont suivre, il n’y aura pas de changements dans les ondes du cerveau, ni de mouvements importants du tronc ou des membres, et il sera très difficile de réveiller le sujet. C’est en général le moment où le chercheur peut quitter son poste, aller se dégourdir les jambes, et profiter d’un bon café. Un ou plusieurs mouvements du corps sont l’indice qu’un autre changement est sur le point d’intervenir dans la séquence du sommeil. Le dormeur change de position, se retourne dans le lit. Le stade 4 a été interrompu. Ces importants mouvements du corps entraînent souvent des enregistrements plus erratiques, qui tendent à montrer que le sujet est revenu non pas au sommeil profond, mais a un sommeil plus superficiel — stade 3 ou même 2. De nouveaux mouvements corporels vont se produire cinq ou six minutes plus Urd, attestant exactement ce que le chercheur attend avec impatience : l’apparition du sommeil REM. Les complexes K et les épingles du sommeil vont soudain disparaître, en même temps que le tonus musculaire. La piste d’enregistrement des mouvements : cula ires va entamer une « danse » frénétique, et les yeux eux- mêmes vont se mettre à se mouvoir alternativement de haut en bas pendant quelques minutes. La durée de la première période de rêve est généralement brève — pas plus de cinq à dix minutes —, et, comme pour le stade 4, sa fin coïncide avec d’importants mouvements corporels. Leur apparition à la fin de certains stades du sommeil agit comme une sorte de signe de ponctuation — ou, plus précisément, un point d’exclamation —, que le cerveau a introduit dans cette « phrase
» particulière. Les mouvements corporels marquent le passage d’un stade à 1 autre du sommeil ; le sommeil REM est passé, et le stade 1, le stade transitionnel, va réapparaître pendant une minute ou deux, immédiatement suivi par le stade 2, celui du sommeil superficiel : un nouveau cycle vient de débuter. Le dormeur va passer de nouveau à travers les stades 2, 3 et 4, à la fin desquels le sommeil REM réapparaîtra une fois encore. Il y a, cependant, quelques différences entre ce deuxième cycle et le premier, différences qui seront marquées de nouveau dans les cycles suivants. La durée du sommeil profond dans les stades 3 et 4 diminue tandis qu’augmente la durée du sommeil superficiel du stade 2, et la durée du deuxième sommeil REM est plus longue que celle du premier. Au lieu de s’étendre sur cinq à sept minutes, il va durer de douze à quinze minutes. À l’exception des variations concernant la durée des différents stades, le second cycle ne présente aucun changement par rapport au premier, ni du point de vue de l’électro-encéphale- logeâmes, ni en ce qui concerne l’apparition de mouvements corporels importants. Le premier cycle, qui s’étend de l’endormissement jusqu’à l’apparition du premier sommeil REM, est aussi appelé « latence REM » (.REM latency), et dure approximativement une heure et demie. Les cycles suivants du sommeil, qui s’étendent du début d’une période de sommeil REM au début de la période suivante, durent aussi environ quatre-vingt-dix minutes. Cette remarque n’est pas sans conséquences, puisque, dans certains types de troubles du sommeil, la latence REM se trouve raccourcie, ce qui en facilite le diagnostic. REM est à peu près la même que celle du troisième, supérieure à vingt minutes ou peut-être même un peu plus. Puisque les cycles durent chaque fois environ quatre-vingt-dix minutes, leur nombre par nuit dépend de la durée du sommeil ; le sommeil d’une personne jeune est constitué, en général, de quatre à cinq cycles ; celui d’une personne plus âgée en compte généralement moins. Le troisième cycle du sommeil, qui commence quand s’achève la deuxième période de sommeil REM, comprend encore moins de sommeil profond et une période plus longue de sommeil léger. La troisième période REM est relativement longue — environ vingt à vingt-cinq minutes. Le quatrième cycle contient une proportion encore plus faible de sommeil profond, sa partie principale étant constituée par le sommeil stade 2. La durée du quatrième sommeil REM est à peu près la même que celle du troisième, supérieure à vingt minutes ou peut-être même un peu plus. Puisque les cycles durent chaque fois environ quatre-vingt-dix minutes, leur nombre par nuit dépend de la durée du sommeil ; le sommeil d’une personne jeune est constitué, en général, de quatre à cinq cycles ; celui d une personne plus âgée en compte généralement moins.