Carmat s'inspire de l'homme pour son coeur artificiel
Carmat s’inspire de l’homme pour son coeur artificiel
La faune et la flore ne sont pas les seules sources d’inspiration dans la nature. L’homme peut, lui aussi, servir de modèle, notamment lorsqu’il s’agit de reproduire la complexité d’un organe. C’est le cas Carmat qui développe le cœur artificiel le plus proche du cœur biologique.
Sur le campus de Vélizy-Villacoublay (Yvelines), entouré de géants de l’aéronautique, de l’informatique et des télécommunications, un bâtiment se démarque par sa discrétion. Il héberge essentiellement des jeunes pousses. L’une d’elles, Carmat, a une activité plutôt originale puisqu’elle fabrique…des cœurs humains ! On s’attend alors à visiter un énorme laboratoire de culture cellulaire, ou encore une chaîne de production automatise d’organes.
Une réplique biologique et anatomique
La première ressemblance avec le cœur est d’ordre anatomique. La réplique bionique comporte en effet deux cavités à la place des ventricules, ces pompes qui acheminent le sang dans tout l’organisme. Non seulement les poches ont une forme et un volume réaliste, mais elles imitent fidèlement les contractions cycliques et l’élasticité cardiaque. Cela est dû en partie à l’utilisation, en surface des ventricules et des parties en contact avec le sang du patient, de péricarde bovin. Le tissu s’étire et se resserre comme une peau sur laquelle les globules rouges glissent sans adhérer. Et élimine du même coup le risque de formation de caillots, désastreuse pour le porteur de l’implant.
En termes de fonctionnement physiologique aussi, le cœur Carmat mime le cœur humain. Sur ce point, les médecins n’ont fait aucune concession aux ingénieurs. A l’instar d’un cœur artificiel concurrent, les ventricules auraient par exemple pu être commandés par un seul actionneur appliquant une pression similaire sur les deux poches. Un tel mécanisme, simple à concevoir, aurait néanmoins aboutit à une destruction rapide des valves qui contrôlent l’entrée et l’éjection de sang dans le cœur. Du coup la prothèse comporte deux pompes qui actionnent indépendamment les ventricules, à la manière des muscles qui compriment les cavités cardiaques gauche et droite.
Un cerveau embarqué
La miniaturisation, indispensable pour alléger l’implant, ne s’est pas faite sans contraintes. Les techniciens souhaitaient dans un premier temps réduire le volume des ventricules. Mais, ce faisant, le rythme cardiaque du porteur aurait été constamment accéléré, augmentant au passage les risques d’accidents cardio-vasculaires.
Une des conséquences de cette absence de compromis est que le cœur artificiel est bien plus lourd que son modèle. Car outre la partie biologique et les pompes magnétiques, la prothèse abrite aussi une batterie de capteurs et un microprocesseur. Ce deuxième « cerveau » est indispensable pour compenser les connexions nerveuses perdues lors de la transplantation : différentes situations physiologiques (repos, effort…) sont programmées sous la forme d’algorithmes dans la puce, et les capteurs surveillent en continu plusieurs paramètres.
« Après plusieurs années de recherche et de conception, des tests ont été menés sur les animaux pour valider le modèle numérique. La première implantation sur l’homme du cœur artificiel complet développé par la société Carmat devrait être effectuée d’ici six mois, à condition d’avoir obtenu les autorisations nécessaires, notamment de l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) ».