Anticancer : Apprendre à changer
La transformation du docteur Fair
Spécialiste du cancer de la prostate et des reins, le docteur Fair était le chef du prestigieux service d’urologie à l’hôpital Memorial Sloan-Kettering de New York – un des principaux centres de cancérologie américains – lorsqu’on lui annonça qu’il avait un cancer du côlon très avancé. Après deux opérations et un an de chimiothérapie intraveineuse (qui ne l’empêcha pas d’opérer plusieurs fois par jour…), sa tumeur réapparut, plus agressive encore. Au point que ses médecins, choisis parmi ses collègues de l’hôpital, lui annoncèrent avec tristesse que son cancer était désormais « incurable ». Selon eux, il n’avait plus que quelques mois à vivre. Le docteur Fair était trop dévasté pour réagir. C’est sa femme, une ancienne infirmière militaire, qui prit les choses en main : elle lui dit que le moment était venu de s’occuper de son terrain ! Sous son impulsion, ce forcené du travail qui était sur le pont sept jours sur sept et souvent trente-six heures d’affilée se mit à la méditation et au yoga. Au lieu d’avaler ses repas sur le pouce au fast food des cafétérias d’hôpital, il s’initia aux bienfaits du régime végétarien. Et lui qui, en bon mandarin, ne s’était jamais intéressé aux apports des médecines traditionnelles demanda finalement à rencontrer des praticiens de médecine chinoise qui venaient d’entamer un programme de recherches au National Institute of Health à Washington. Cette mutation fut tout sauf aisée. Avec son esprit acide et son arrogance typique des chirurgiens, Bill Fair avait longtemps nourri un profond dédain pour toutes ces approches « parallèles » qu’il qualifiait de « foutaises californiennes à l’eau de rose ».
S’armant de patience et de beaucoup de bienveillance, sa femme finit par le convaincre qu’il n’avait rien à perdre à expérimenter d’autres façons de goûter la vie. Qu’il pouvait les aborder avec son esprit de chercheur : prendre ce qui marcherait pour lui et laisser le reste. Il pouvait à la fois garder son esprit critique et écouter son instinct d’explorateur. Bill Fair se prêta progressivement au jeu. Très progressivement. Par exemple, à la fin d’un stage de relaxation auquel il était allé participer – en Californie ! -, il n’hésita pas rentrer à New York le soir même, par un éprouvant vol de nuit, parce qu’il voulait reprendre le travail très tôt le lendemain matin… Mais petit à petit, à travers le yoga, la méditation, l’attention portée à sa nourriture, Bill Fair se transforma. De chirurgien tonitruant, de chercheur autoritaire et sûr de lui, auteur de plus de 300 articles publiés dans les revues internationales de cancérologie, il devint un homme plus doux, plus posé, plus accueillant. Il apprit à choisir avec soin les personnes avec lesquelles il passerait un moment, et à leur donner ensuite toute son attention. Impressionné par ce qu’il apprenait sur lui- même à la lumière de ce nouveau rapport avec son corps, son esprit, et les personnes qui l’entouraient, Bill Fair devint en quelques années la personne qu’au fond il aurait toujours préféré être… Quand on lui demanda, trois ans plus tard, ce qu’il pensait des bienfaits de cette approche par le terrain, il répondit avec bienveillance : « J’ai déjà dépassé de plusieurs années les pronostics de mes confrères. En tant que scientifique, je sais que cela ne prouve rien, qu’il s’agit peut-être d’un coup de chance. Mais il y a une chose dont je suis certain : si tout ce que j’ai fait pour m’aider moi-même ne me fait pas vivre plus longtemps, cela m’aura certainement fait vivre plus profondément. »
Toute sa vie, il avait été sous pression pour briller parmi les plus brillants, et tenir sa place, durement gagnée, au sommet des plus grandes institutions de médecine et de recherche. Il avait aimé son métier, mais, au fond, il n’avait pas aimé cette manière brutale et intense de le pratiquer – si fréquente chez les chirurgiens de son niveau. Il s’était construit une sorte de carapace pour fonctionner dans un monde où les jugements catégoriques sont assénés comme des coups, qu’on apprend à donner autant qu’à recevoir.
Sa maladie lui avait permis de découvrir des approches qu’il avait longtemps méprisées et qui lui apportaient une douceur et un bien-être qui lui importaient beaucoup maintenant. Il avait le sentiment de se délester de pans entiers de son ancienne personnalité. Il apprenait, comme beaucoup d’autres patients, à prêter plus d’attention à ce qui comptait vraiment pour lui, indépendamment du jugement d’autrui. Il n’était plus contraint à jouer le rôle de « premier de la classe » qui lui était si familier depuis l’enfance. Bill Fair ne renia jamais sa passion de médecin et ses exigences de scientifique. Il continua toujours de souligner l’importance des traitements conventionnels du cancer, et insista pour que les approches complémentaires soient soumises à une évaluation stricte. Mais, au fil des mois, il se fit plus authentique, plus pleinement humain. Plus patient, plus doux, plus ouvert au mystère et à la richesse de la vie.
Bill Fair devint peu à peu le défenseur de ces approches nouvelles qu’il voulait voir intégrées aux programmes d’enseignement et de soin. Il convia ainsi à dîner plusieurs doyens de facultés de médecine de New York et les principaux cancérologues, afin de leur faire rencontrer un des militants américains les plus respectés, Ralph W. Moss, journaliste scientifique et ardent promoteur des méthodes complémentaires en cancérologie. Au cours du dîner, Fair se pencha vers l’oreille de Moss : « J’imagine qu’il y a dix ans vous n’auriez jamais pensé qu’un jour vous vous retrouveriez à dîner avec ces gens- là… » Et le militant de lui répondre : « Il y a dix ans, je n’aurais jamais pensé que je me retrouverais à dîner avec vous, Bill1. » Bill Fair avait, effectivement, beaucoup changé.
Le chemin parcouru par le docteur Fair, chacun peut décider de s’y engager. Corseté comme il l’était dans une culture qui dénigrait systématiquement cette quête personnelle, cette évolution était plus difficile pour lui que pour quiconque. Si Bill Fair a pu transformer si radicalement son attitude face à la vie, nous devons tous pouvoir suivre son exemple.
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