Atteintes auditives de l'oreille interne:Maladie de Ménière
Vous pourriez être surpris que nous traitions de ce sujet dans le cadre des atteintes de l’« audition », puisque le vertige de la maladie de Ménière en est le symptôme le plus notoire pour la majorité des cliniciens. En fait, au tout début de la maladie, l’essentiel du processus pathologique se déroule seulement dans la cochlée. Cette maladie est caractérisée par quatre symptômes classiques : l’hypoacousie, les acouphènes, la sensation de plénitude de l’oreille et le vertige. Ces symptômes sont dus à l’hydrops endolymphatique, autre nom de cette atteinte et qui en est une description physiopathologique. Pour ajouter à la confusion, un autre nom, le syndrome de Lermoyez, désigne un stade plus précoce ou une forme moins sévère de la maladie dans laquelle seule la cochlée est atteinte par l’hydrops, le vertige étant absent et l’hypoacousie fluctuante.
Dans cette maladie, un trouble localisé de la circulation du liquide ou de l’équilibre hydroélectrolytique provoque un gonflement des canaux contenant l’endolymphe à l’intérieur de la cochlée et de l’appareil vestibulaire. On a proposé comme explication à ce problème des maladies sous-jacentes, métaboliques, allergiques, virales ou auto-immunes. Le début des symptômes survient habituellement à la trentaine ou la quarantaine sans prédominance liée au sexe. Dans 80 p. 100 des cas, la maladie est unilatérale, et si la seconde oreille est atteinte, elle l’est dans les quelques années qui suivent l’atteinte de la première.
Typiquement, le premier épisode consiste en une impression de pression dans une oreille accompagnée d’un grondement ou d’un souffle centré sur les fréquences graves. Une légère hypoacousie peut être notée. Cette phase peut durer des heures ou des jours, et dans certains cas disparaître mais pour réapparaître plus tard (syndrome de Lermoyez). Cependant, dans la maladie de Ménière « constituée », une violente crise de vertige habituellement associée à des nausées et des vomissements va apparaître un jour ou deux après l’installation des symptômes auditifs. Cela peut durer plusieurs heures puis s’atténuer progressivement. Le vertige cède habituellement le lendemain matin bien qu’une légère sensation de plénitude de l’oreille et un acouphène puissent subsister plus longtemps.
Dès lors, l’évolution clinique est extrêmement variable. Les récurrences peuvent être : fréquentes, peu fréquentes mais en salves de plusieurs crises rapprochées, ou sporadiques. Avec les années, la sévérité du vertige tend à diminuer ou il devient mieux toléré, mais l’audition montre souvent une tendance à la baisse. Au début, l’audition revient à la normale après chaque épisode pénible mais, par la suite, la baisse se prolonge et une hypoacousie sévère à profonde peut se voir tard dans l’évolution de la maladie. Certains individus n’ont jamais de symptômes vestibulaires sévères, et d’autres peuvent avoir le vertige pendant plus d’un jour entier lors d’une crise avec un déséquilibre qui s’éternise après.
À l’examen, le tympan est normal et les diapasons montrent une hypoacousie de perception unilatérale. L’intéressant phénomène qu’est la dyplacousie peut être constaté : une même note, disons par exemple le diapason 512, est perçue comme différente d’une oreille à l’autre. Cela est probablement dû au fait que l’hydrops « distend » la membrane basilaire et modifie l’accord tonal de l’oreille affectée. Quand le vertige est présent on peut voir un nystagmus dont la secousse rapide bat vers l’oreille malade en phase de crise aiguë.
L’audiologiste est ici un consultant précieux. L’audiométrie permet plusieurs constatations caractéristiques, au-delà de l’hypoacousie de perception à laquelle on s’attend. La perte auditive prédomine, souvent mais pas tou-9jours, sur les fréquences graves . Le recrutement mentionné dans l’exposé sur la presbyacousie est mis en évidence par un SISI test positif. La fonction vestibulaire du patient peut être évaluée par une électronysta- mographie (ENG) .
Il est de bonne pratique de faire un bilan clinique inventoriant les facteurs favorisants éventuels. Des problèmes métaboliques et allergiques, possibles, doivent être recherchés. Beaucoup d’auteurs recommandent un bilan de la fonction thyroïdienne et un test de tolérance au glucose. L’hypothyroïdie et le diabète ont pu être associés à cette maladie. Un bilan allergologique peut trouver une anomalie. En outre, une sérologie à la recherche de la syphilis s’impose pour éliminer cette infection qui « imite » de près la maladie de Ménière. Une sérologie à la recherche d’une maladie auto-immune de l’oreille, en l’occurrence l’antigène 68 kD , peut aussi être demandée. Un bilan lipidique peut révéler une hyperlipidémie, autre facteur favorisant.
Plusieurs modalités de traitement ont été utilisées dans cette maladie. Certaines ont pour but de lutter contre les symptômes immédiats, d’autres de soulager le patient dans une perspective de long terme. Citons certaines recommandations :
- un régime peu salé ;
- des diurétiques quotidiens (en prenant soin de prescrire un traitement substitutif en potassium si nécessaire) ;
- de la méclizine ou d’autres antihistaminiques pour le vertige aigu ;
- des corticoïdes à doses dégressives en cas de poussée dans le but de traiter une cause auto-immune ou allergique présumée ;
- des anxiolytiques comme le Xanax ou le Valium pour réprimer les activités labyrinthiques et vestibulaires centrales ;
- des vasodilatateurs comme la niacine utilisée empiriquement dans le but d’améliorer la circulation sanguine, et par conséquent les échanges liquidiens, dans l’oreille interne ;
- les bioflavonoïdes dans le but d’améliorer la circulation labyrinthique, en association avec des vitamines.Parmi ces traitements, ce sont les trois premiers qui sont le plus souvent recommandés. Dans les cas où la maladie échappe au traitement avec des vertiges qui ne cèdent pas, on peut avoir recours à la chirurgie. Des recherches récentes ont montré que le vertige pouvait être réduit par des injections de gentamycine dans la caisse du tympan, ce médicament vestibulo-toxique diffusant à travers le tympan secondaire de la fenêtre ronde. La décompression du sac endolymphatique peut se faire par voie d’abord mastoïdienne. Ces deux techniques font courir le risque d’une aggravation de l’hypoacousie mais sont efficaces contre les vertiges invalidants. Si l’audition est totalement perdue et que les vertiges continuent, des techniques de suppression qui détruisent le labyrinthe ou le nerf vestibulaire peuvent être mises en oeuvre.<>Résumé
<>Beaucoup de recherches ont été faites sur la cause et le traitement de la maladie de Ménière. L’identification clinique de cette entité repose sur les quatre symptômes qui doivent être présents pour affirmer le diagnostic : hypoacousie de perception, acouphène, sensation de plénitude de l’oreille et vertige. L’unilatéralité des symptômes liés à l’oreille lors d’une crise est une notion clinique clé. Un patient vertigineux ayant de vagues symptômes bilatéraux liés à l’oreille n’a probablement pas de maladie de Ménière. Le caractère fluctuant de l’hypoacousie cochléaire ainsi que la violence des vertiges est en faveur de ce diagnostic comme l’est la sensation de plénitude de l’oreille. L’hypoacousie est assez modérée dans les débuts de la maladie, mais s’aggrave avec le temps. Les périodes de vrai vertige durent habituellement de quelques heures à un jour. Leur sévérité tend à diminuer sur le long terme. Rarement, la seconde oreille peut être atteinte des mois ou des années plus tard, faisant alors envisager le diagnostic de maladie auto-immune de l’oreille, maladie que nous allons maintenant aborder.
<>Le généraliste au fait de cette pathologie et qui accepte de la prendre en charge peut en faire le diagnostic, traiter les crises et prescrire le bilan dont nous avons parlé, à la recherche de facteurs favorisants. Mais un ORL devrait tout de même être impliqué.
Vidéo : Atteintes auditives de l’oreille interne:Maladie de Ménière
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