Pourquoi ampute-t-on encore de nos jours ?
Dans les pays riches, l’amputation est devenue une opération très rare. On ne la pratique plus guère qu’en cas d’extrême nécessité. Le cancer des os en est une. La tumeur maligne de l’ostéosarcome se traduit, selon les cas, par une destruction ou bien une fabrication excessive de la matière osseuse. Dans les cas les plus graves, lorsque la tumeur atteint une taille trop importante pour être chirurgicalement ôtée, ou qu’elle récidive trop souvent au même endroit, il faut amputer le membre affecté.
Toutefois, la pathologie qui nécessite le plus souvent l’amputation reste le diabète. Sept mutilés du pied sur dix sont diabétiques! On recense 10 000 nouveaux cas chaque année en France. Une telle intervention peut surprendre, la gangrène du pied, qui exige son ablation, débutant le plus souvent par un simple ulcère. Mais les diabétiques finissent par perdre toute sensation dans leur pied. À long terme, en effet, les terminaisons nerveuses disparaissent à cet endroit en raison de la fermeture des capillaires sanguins qui alimentent le pied. Le sang se trouve bloqué dans les membres inférieurs, et parfois aussi dans les coronaires et le cerveau, l’hyperglycémie se traduisant par la formation de caillots sanguins (les thromboses). Or, quand le sang ne circule plus, l’oxygène n’alimente plus les organes et les tissus. Une ischémie s’installe. En aval des thromboses, nerfs et vaisseaux meurent par asphyxie, et le pied s’infecte. Il pourrit littéralement. La gangrène se propage. Il faut amputer.
On parvient au même diagnostic lorsqu’un pied gâté est traité trop tard. Dans les pays tropicaux, certaines infections par des champignons dégénèrent souvent en tuméfactions très douloureuses, suppurantes, et en atteintes osseuses. Parmi ces maladies, l’une des plus graves est le « pied de Madura », du nom de la ville indienne où un médecin militaire anglais la décrivit au xixe siècle.