Jeu de temps pour survivre : la précaution
Le phénomène de l’urgence:
Face à la perspective de survenue d’un événement capable de déclencher une mise en état d’urgence, la pré-caution est la mesure essentielle de préparation d’une réaction qui doit être adaptée, mais aussi rapide. La mesure de précaution est avant tout une manière de constituer un capital de durée. Elle n’a pas l’ambition de la prévention qui vise à éviter la survenue de l’événement.
S’abstenir du tabac, éviter la surcharge pondérale, pratiquer régulièrement l’exercice physique, fuir les émotions trop fortes sont des actions qui cherchent à éviter la survenue de l’insuffisance coronaire aiguë. Elles sont sans effet lorsque celle-ci surgit. Il faut alors réagir vite et seule la précaution prépare à cette célérité. Toute l’organisation des secours sanitaires individuels, en vue de la prise en charge des urgences médicales, est un vaste ensemble constitué de mesures de précaution de nature différente, mais qui toutes visent à permettre la constitution d’un capital de durée.
La première mesure est la mise à disposition d’un système d’alerte fondé sur un numéro d’appel téléphonique unique accessible en permanence. La seconde mesure est la mise à disposition des compétences nécessaires pour un premier tri des appels, permettant de discerner les durées limites qui s’attachent à chaque situation sous l’angle de la rapidité de la réaction et de définir les moyens de réaction à mettre en œuvre (incitation à consulter un médecin le lendemain, envoi d’un médecin, ou envoi d’une ambulance de réanimation). Une importante mesure de précaution est en effet de pouvoir mobiliser à tout moment des moyens de transport à la fois rapides et techniquement armés. En France, les ambulances de réanimation transportent un médecin urgentiste. Aux États- Unis, elles transportent des personnels paramédicaux spécialement formés à l’urgence. L’ambulance de réanimation transporte aussi des équipements nécessaires à diverses techniques de réanimation. Les plus modernes sont de véritables laboratoires ambulants. Les manœuvres les plus poussées de réanimation peuvent être mises en œuvre dès l’entrée dans l’ambulance. La mesure ultime est que la cellule de réception des appels et de coordination du transport en ambulance (le SAMU) a pu organiser la réception du malade ou du blessé en un lieu, les Urgences de l’hôpital, qui est préparé à cet accueil. En ce lieu, grâce à l’organisation de la garde ou de l’astreinte, des moyens humains et des machines sont en permanence disponibles. Ils permettent de confirmer, si besoin, le diagnostic et de mettre en route toutes les réactions adaptées du point de vue de la thérapeutique.
Ce dispositif de précaution n’a pas encore le niveau d’organisation ni la capacité de mise en forme de celui des pompiers, mais il s’en approche. Il est vrai que son champ est beaucoup plus divers et que la fréquence de survenue des événements auxquels il doit faire face est plus élevée que celle des événements auxquels sont confrontés les pompiers. L’atout principal de ce dispositif est de s’appuyer de manière croissante sur des professionnels de santé qui se sont spécialisés dans l’urgence.
Ils ont l’urgence pour thème permanent et visent ainsi à transformer leur objet en habitude. Pour le médecin urgentiste, l’urgence médicale est la médecine de tous les jours. Face à une médecine segmentée en spécialités selon les espaces du corps ou à une médecine à visée totalisante comme la médecine générale, la médecine de l’urgence émerge de plus en plus nettement comme celle dont l’objet est d’affronter l’événement que constitue l’accident de santé et qui doit prendre précisément en compte la durée dans la mise en œuvre de la réaction thérapeutique.
Cette médecine réagissante avance les atouts d’une médecine d’équipe prônant la coopération entre ses membres. Elle est encore jeune et, par ce fait, constitue bien une médecine de demain. L’organisation d’une formation spécifique et l’abord des problématiques de recherche qui caractérisent la médecine de l’urgence sont encore largement en devenir.
Il en est de même pour l’abord de toutes les questions éthiques qu’elle suscite. En urgence, rien n’est en effet jamais simple quant au devoir professionnel, tant du point de vue de la relation avec le malade, que de celui de la conduite de l’action thérapeutique.
En urgence, la volonté de protection de la vie du malade apparaît souvent contradictoire avec le respect de sa vie privée, c’est-à-dire de son autonomie. En effet, en urgence, tout incite le médecin à se mobiliser particulièrement pour la survie du malade. De ce fait, il est parfois difficile de bien informer le patient, de respecter son consentement et de protéger le secret médical.
La conduite de la réaction urgente est aussi source d’interrogations. Elle doit savoir se centrer sur le danger présent, mais aussi tenir compte de ce que l’avenir pré¬pare. Si la mesure du temps en est le principal guide, la qualité du temps qui passe, dans le cours de la relation entre soignants et soignés et entre les soignants eux- mêmes, en est un aspect important.
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