A quoi sert le cérumen ?
N’en déplaise à Shrek, le cérumen ne sert pas à fabriquer des bougies ! Le cérumen est une sécrétion naturelle qui protège le conduit interne de l’oreille. C’est par ce conduit que le pavillon fait remonter les sons jusqu’au tympan. Sur cette matière collante s’accrochent les poussières, les bactéries, les champignons, des poils et des particules de peau qui, sinon, viendraient embarrasser l’oreille. Il possède également une autre fonction : lubrifier le conduit. Cette fonction est si efficace que certains s’appliquent le cérumen sur les lèvres! Même si on n’a guère de certitudes en la matière, il n’est pas impossible que le pH relativement acide du cérumen et la présence dans sa composition du lysozyme [voir p. 20, 123] (une enzyme également présente dans les larmes, la salive, le liquide céphalorachidien) participent aussi d’une action antimicrobienne directe.
Tous ces bienfaits sont dus à la composition très grasse du cérumen. Près de 2 000 glandes sébacées (elles produisent du sébum) et apocrines (sueur et odeurs corporelles) concourant à le fabriquer, le cérumen est un mélange hétéroclite de glycérides (des lipides simples) et de lipides complexes (dont le cholestérol). On y trouve aussi des sucres, des acides aminés (les briques élémentaires des protéines), des hydrocarbures aromatiques (pour l’odeur), du collagène (la peau) et de la kératine (cheveux).
Avec tant d’éléments divers, rien détonnant que la couleur et la texture du cérumen varient au fil du temps,
d’autant que les sécrétions des glandes en question sont sous commande hormonale, elle-même intimement liée à la commande nerveuse de l’organisme. Ainsi, l’humeur, le stress ou la joie influencent la qualité du cérumen. L’hygiène, aussi : moins on se nettoie le pavillon des oreilles, plus de poils et de peaux vont s’accumuler à l’entrée puis dans le conduit auditif, où le train régulier du cérumen les agglomérera en une masse sombre. Car le cérumen bouge. Les petits poils tapissant le conduit auditif, le font avancer à un train de sénateur, comme des milliers de bras soulevant une masse. Les mouvements de la mâchoire, répercutés sur le conduit, accélèrent le transit. Mal utilisé, le coton-tige peut y contrevenir: il faut élargir le conduit en tirant sur le pavillon de l’oreille afin de pouvoir faire tourner le coton, et surtout pas l’enfoncer!
Les généticiens ont sans doute fait usage de nombreux paquets de coton-tige, car ils ont beaucoup travaillé sur le cérumen. Non pas tant pour savoir quel(s) gène(s) s’occupe(nt) de la production de la cire, mais pour tenter de comprendre pourquoi certaines populations humaines fabriquent du cérumen sec, et d’autres, du cérumen humide. Les premières sont originaires de la région orientale de l’Asie; les secondes, des aires européennes et africaines.
En 2002, une équipe japonaise a peut-être soulevé un coin du voile. Après avoir identifié une famille au sein de laquelle certains individus produisaient un cérumen liquide, elle est parvenue à isoler un gène particulier. Baptisé ABCC11, ce gène est localisé sur le chromosome 16, plus exactement, « entre les loci D16S3093 et D16S3080 au niveau de la région péricentromérique 16pll.3-16ql2.1 ». Les publications scientifiques sont précises! Chez les sujets « normaux » de la famille étudiée, ceux qui fabriquent – comme tous les Asiatiques – du cérumen sec, ce gène était muté. Chez les autres, non. Cela signifie que la différence de la texture du cérumen entre peuples d’Asie, d’Europe et d’Afrique repose sur une mutation qui a, chez les premiers, été « validée » par l’évolution. Certains analysent déjà ces résultats comme la preuve de l’existence des races. Comme quoi, même un amas de cérumen suffit à ranimer de vieilles lubies…
Vidéo : A quoi sert le cérumen ?
Vidéo démonstrative pour tout savoir sur : A quoi sert le cérumen ?
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