L’ostéopathie moderne
Bases neurologiques : les propiocepteurs
L’ostéopathie a fait un bond en avant historique grâce à la contribution du physiologiste américain I.M. Korr. La publication de ses travaux de 1944 à 1975 a été la pierre angulaire sur laquelle la médecine ostéopathique s’est édifiée. Inspiré par ses illustres prédécesseurs, Korr a levé le mystère physiologique de cette fameuse « lésion ostéopathique ». J’ai eu l’opportunité de rencontrer I.M. Korr et il m’a convaincu, comme d’autres, que la lésion ostéopathique n’était pas une « simple erreur mécanique », qu’il fallait aussi chercher « ailleurs », plus loin, pour corriger le trouble de la fonction qu’elle impliquait. « Kim » Korr, si jovial, si chaleureux, si généreux, a été une étape importante dans mon initiation ostéopathique.
Korr a répondu aux questions que se posaient les ostéopathes. Comment s’organise la dysfonction articulaire ? Quels sont les mécanismes qui commandent d’autres pathologies? Comment s’établissent les changements de différents tissus et de la peau, les changements dans les fonctions viscérales, etc.
L’organisme est tenu informé, consciemment ou inconsciemment, des modifications du milieu extérieur par des récepteurs (capteurs) périphériques. Les messages cheminent par des voies intégrées dans le système nerveux cérébro-spinal.
veux reçoivent les informations, les traitent et élaborent une réponse appropriée vers les organes de réponses.
Au XIXe siècle, Sherrington a proposé une classification particu-lièrement claire de ces récepteurs :
- Les extérocepteurs, à la surface du corps, situés dans la peau et ses dépendances, transmettent le toucher, le chaud, le froid, la douleur.
- Les propriocepteurs, dans les muscles, les tendons, les capsules articulaires, les canaux semi-circulaires labyrinthiques, sont stimulés par les actions du corps, attitudes et mouvements. La réponse dans ce cas est musculaire.
- Les viscérocepteurs se trouvent dans tous les tissus et les organes où le système nerveux végétatif possède une fonction, et recueillent des informations dont les réponses auront pour cibles le muscle lisse et les glandes.
Les propriocepteurs sont au cœur de la doctrine ostéopathique. Les informations qu’ils recueillent, combinées à celles obtenues par les viscérocepteurs, sont traitées par le système nerveux cen¬tral (cerveau et moelle) et la réponse transmise à l’effecteur : muscle, lisse ou strié, ou glande. C’est au cours de ce processus que se forme la « lésion ostéopathique ». La moelle épinière reçoit les informations et, à force d’en recevoir, peut redistribuer les sti-mulations sous forme d’excitation ou d’inhibition excessive. Ce segment de moelle épinière devient donc hyperexcitable, et une véritable « facilitation » des neurones s’installe alors si bien que toute stimulation venue d’ailleurs fera « sonner» le segment vertébral correspondant au segment médullaire.
Imaginez une rivière dont le flot augmente brutalement. La petite brèche sur un bord, dans une courbe, sera responsable d’une inondation. Si la brèche n’est pas comblée, le même phénomène se reproduira. Plus encore, la cause du gonflement soudain de ce cours d’eau est à rechercher parmi une longue liste d’événements naturels ou non. Citons la pluie, la fonte des neiges, la rupture accidentelle d’un barrage de boue et de branches… Allons plus loin. Pourquoi cette boue et ces branches en ce lieu ?
D’où proviennent ces branches ?… Le phénomène peut ainsi se perpétuer, et la rivière débordera toujours par sa brèche.
Cette « sonnerie », nous en connaissons les caractéristiques :
- contraction des muscles de la colonne vertébrale, activité sur les muscles des vaisseaux (vasomotricité)
- effet sur la peau, sur la sécrétion des glandes sudoripares et sur la pilo-érection
- effets sur les viscères, dont les manifestations sont aussi des contractions ou des spasmes, des troubles de la sécrétion glandu¬laire et des modifications sensibles de l’activité vasomotrice.
La manipulation provoque une relaxation des muscles mais aussi brise le cercle vicieux entretenu par les propriocepteurs. Elle diminue ou interrompt pour un certain temps le « véritable bombardement d’informations » qui arrive à la moelle épinière. Mais, plus encore, c’est grâce au rééquilibrage de l’appareil loco-moteur par la manipulation, à une normalisation de la posture, que les tensions excessives des muscles, des tendons, des ligaments, des capsules articulaires, sont vaincues et que la guérison peut s’installer… avec la complicité du système nerveux central, grand organisateur de l’ensemble.
A partir de ces considérations neurophysiologiques, de références philosophiques et conceptuelles à l’œuvre de A.T. Still, et d’innombrables travaux, Korr a proposé un cadre à la fois écolo-gique (recherche de la cause et de l’origine), diagnostique et théra-peutique, pour la pratique d’une médecine ostéopathique moderne.
Tout en marquant quelques réticences à accepter les conclusions de Korr, les chercheurs, plus particulièrement les neurophysiolo-gistes, ont multiplié les travaux et les publications sur le système nerveux autonome et les perturbations de son tonus sympathique ou parasympathique (sympathicotonie ou vagotonie), sur ses implications directes ou indirectes dans la maladie.
Depuis le début, les ostéopathes ont leur idée sur ce sujet. Les interactions entre le psychisme, le système nerveux central, le système nerveux autonome et la réponse immunitaire son! main-tenant acceptées par tous. Les ostéopathes proposent que le système musculo-squelettal
devienne membre du club des respon¬sables de la maladie. Il est scientifiquement prouvé que ce système est celui qui fournit le plus d’informations sensorielles au centre supérieur, mais aussi celui qui reçoit le plus d’informations en provenance du cerveau. L’intégrité de son fonctionnement comme facteur nécessaire à la préservation d’une bonne santé est une notion que les ostéopathes manient depuis toujours. Seront- ils enfin entendus ?
Appareil musculo-squelettal et posture sont indissociables. Depuis plusieurs décennies, des scientifiques se sont intéressés à la posture, thème central de l’acquisition de la bipédie et de ses effets sur le rachis. Il est acquis que notre lente évolution vers la station debout n’est pas achevée. On comprend mieux certaines imperfections évidentes de notre schéma corporel et les défauts d’adaptation de notre corps à de nombreuses contraintes. Fondamentalistes et cliniciens se sont associés pour créer une nouvelle discipline, la posturologie. Elle étudie les problèmes que posent le système postural, les syndromes cliniques qui affectent nos contemporains et tente de trouver des solutions thérapeutiques scientifiquement contrôlables.
Charles Bell, célèbre physiologiste britannique de la première moitié du xixe siècle, a été le premier à poser la question : « Comment l’homme se tient-il debout ? » Aujourd’hui, certains scientifiques répondent : « Grâce à une organisation en système de plusieurs entrées. » Le terme système est pris ici comme on l’entend dans la théorie des systèmes c’est-à-dire comprenant « entrées et sorties ». Ce système postural comporte trois entrées : l’œil, l’oreille interne et le pied. Ce sont de véritables capteurs d’informations de l’environnement et des mouvements du corps. Le système reçoit aussi des informations du rachis et en particulier de ses deux segments les plus mobiles, la partie cervicale et la partie lombaire, ainsi que des articulations périphériques portantes. Il existe une fonction spécifique du système nerveux : le système postural fin. C’est un réseau neurologique uniquement conçu pour la stabilité posturale.
La mise au point d’une plate-forme dite de stabilométrie a per¬mis de démontrer que le contrôle de la posture s’effectue d’une manière bien plus fine que le simple maintien de la ligne de gra¬vité à l’intérieur du fameux polygone de sustentation que tout le monde connaît.
Cette découverte a conduit ceux que l’appareil locomoteur intéresse dans sa globalité à s’interroger sur « l’équilibre, la stabilisation et la déstabilisation ». Parmi eux, de nombreux ostéopathes, séduits par cette approche plus technique de leur concept. Ils ont intégré une clinique plus novatrice et scienti-fiquement établie, où l’exploration du tonus musculaire, des asymétries posturales, la répartition des équilibres et l’empreinte podale restent essentielles à l’élaboration du diagnostic.
Nous évoquerons plus loin le rôle des propriocepteurs et de la biomécanique dans l’organisation de l’appareil locomoteur.
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Une réponse pour "L’ostéopathie moderne"
J’aime beaucoup votre texte… puis-je me permettre de vous suggérer de le passer rapidement au correcteur car il comporte plusieurs petites coquilles qui seront facilement corrigées par celui-ci. CE commentaire se veut positif afin que votre texte garde toute sa valeur.
Salutations,