LES CIRRHOSES:LA CLINIQUE ET LES EXAMENS COMPLEMENTAIRES
La clinique et les examens complémentaires
les manifestations cliniques de la cirrhose sont essentiellement sous la dépendance de deux grands mécanismes : l’hypertension
portale et l’insuffisance hépato-cellulaire (14). Selon l’importance prise par l’une et l’autre de ces phénomènes, on distingue classiquement deux stades dans l’évolution de la cirrhose : un stade compensé et un stade décompensé.
La cirrhose compensée
La cirrhose est dite « compensée » lorsqu’elle est fonctionnellement latente.
Les circonstances de découverte
La maladie est reconnue lors d’un examen clinique ou biologique systématique, ou encore au cours d’une intervention chirurgicale pratiquée pour une autre raison.
L’examen clinique
A ce stade, l’examen peut déjà montrer une hépatomégalie ferme, accompagnée
d’une splénomégalie. Les signes d’hypertension portale et d’insuffisance népato-cellulaire sont, pour leur part, généralement encore très réduits. On peut parfois observer quelques angiomes stellaires et une érythrose palmaire. Il est rare que l’endoscopie objective des varices œsophagiennes.
La biologie
Elle peut être totalement normale. Parfois, les transaminases et les gamma-GT sont discrètement élevées. Parfois, la seule anomalie retrouvée est une perturbation de l’élimination de la BSP. L’hypergammaglobulinémie est également un signe biologique précoce de cirrhose. Enfin, la macrocytose (VGM supérieur à 100M 3) est précocement constatée au cours de l’intoxication alcoolique, avant même qu’une cirrhose ne se constitue. C’est la biopsie hépatique qui permet d’affirmer le diagnostic.
L’évolution
Elle est marquée par l’apparition des signes liés à l’hypertension portale et à l’insuffisance hépato-cellulaire. Ces deux éléments peuvent être présents simultanément de façon équilibrée ou avec une franche prédominance de l’un sur l’autre. Ainsi, une hypertension portale sévère est possible en l’absence de tout signe d’insuffisance hépato- cellulaire. A l’opposé, chez certains patients, la cirrhose reste compensée pendant des années, et ils peuvent même mourir d’une cause totalement indépendante. Il est donc en définitive très difficile de prédire l’évolution de la cirrhose pour un malade donné.
La cirrhose décompensée
La décompensation est en général marquée par l’apparition d’un ictère ou d’une ascite.
A ce stade sont généralement associés une asthénie, un amaigrissement et une amyotrophie.
L’examen clinique
L’ictère, plus ou moins intense, est cutanéo-muqueux et souvent associé à une pigmentation cutanée. Il existe de nombreux angiomes stellaires, une érythrose palmaire, des ongles blancs et un hippocratisme digital. Un purpura pétéchial ou ecchymotique est fréquemment observé. La tension artérielle est basse. On note une raréfaction du système pileux et des signes d’atrophie gonadique.
Souvent, une ascite est présente, dont l’installation a été précédée d’un météorisme abdominal (classique « vent précédant la pluie »). Cette ascite s’accompagne volontiers d’un œdème bilatéral des membres inférieurs. Elle est parfois si volumineuse qu’elle empêche de palper le foie. Lorsque l’examen de ce dernier est possible, on trouve souvent une hépatomégalie à bord inférieur tranchant, ce caractère tranchant étant un signe clinique important de cirrhose. Il existe souvent une splénomégalie. Une circulation veineuse collatérale abdominale est fréquente.
Les examens biologiques
La bilirubine est élevée, l’augmentation étant fonction de l’intensité de l’ictère. Il existe une hypo-albuminémie, avec une hypergamma-globulinémie. Les transaminases et les phosphatases alcalines sont normales ou peu augmentées.
On trouve très souvent une anémie, qui est en général du type normochrome, normocytaire. Elle s’accompagne souvent d’une chute du chiffre des globules blancs et des plaquettes, liée en général à un hypersplénisme.
Le taux de prothrombine est normal ou diminué. En cas de diminution, il existe également une baisse du facteur V, et l’injection parentérale de vitamine K ne le ramène pas à la normale (test de Koller négatif).
L’excrétion sodée urinaire est en général très réduite.
La biopsie hépatique est pratiquée en l’absence de contre-indications, en particulier après vérification de l’hémostase et en l’absence d’ascite. L’analyse histologique d’une part permet d’affirmer le diagnostic de cirrhose, et d’autre part, elle peut donner des indications précieuses sur l’étiologie de cette dernière. Parfois existent des difficultés d’interprétation ; en effet, le fragment recueilli peut être morcelé et de lecture difficile. La répétition des biopsies hépatiques permettrait de suivre l’évolution de la cirrhose.
Le pronostic
Le pronostic d’une cirrhose est toujours très difficile à poser, et dépend pour une part de l’étiologie. Mais, pour une même étio- logie, certains patients connaissent une évolution rapide, précocement compliquée d’insuffisance hépato-cellulaire et/ou d’hypertension portale, alors que d’autres restent stables pendant des années. Par ailleurs, certaines complications peuvent venir à tout moment aggraver le pronostic, par exemple une rupture de varices œsophagiennes ou la constitution d’un carcinome hépato- cellulaire.
Il existe cependant des éléments dont l’apparition est en général l’indice certain d’un pronostic fâcheux. Ainsi :
une encéphalopathie hépatique
— survenant sans cause déclenchante apparente ;
— une ascite résistant à un traitement diurétique correct associé à une restriction hydrosodée. Cette ascite résistante est de signification encore plus fâcheuse lorsqu’il apparaît un syndrome hépato-rénal, marqué par une hyponatrémie franche associée à une insuffisance rénale et à des troubles variables de la kaliémie ;
— la survenue d’une hémorragie digestive chez un patient ayant déjà une ascite et un ictère ;
— le développement d’un carcinome hépato-cellulaire ;
— une infection générale (septicémie) et/ou une infection du liquide d’ascite (couramment appelée actuellement péritonite bactérienne spontanée) ;
— le caractère atrophique de la cirrhose ;
— la poursuite de l’intoxication, en cas de cirrhose alcoolique.
Les manifestations extra-hépatiques et les associations pathologiques
Les manifestations digestives
En dehors des varices œsophagiennes et de leur risque de rupture, il faut connaître la fréquence ae l’ulcère gastro-duodénal chez le cirrhotique. En cas créthylisme, l’association d’une pancréatite chronique et d’une cirrhose alcoolique est possible, encore que
classiquement rare. Une stéatorrhée peut également être observée en l’absence de pan- créatite ; elle serait liée à une diminution de la sécrétion des sels biliaires.
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La lithiase biliaire
La lithiase vésiculaire est fréquemment associée à la cirrhose. Sa fréquence est supérieure à celle qui est observée dans la population générale. Les calculs sont souvent de type pigmentaire. La cholécystectomie ne doit être pratiquée qu’en cas d’absolue nécessité, car l’intervention est généralement mal tolérée.
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Les hernies de la paroi abdominale
Il s’agit essentiellement de hernies ombilicales, dont la survenue est favorisée par l’ascite. Leur réparation chirurgicale ne saurait être envisagée qu’après assèchement de l’ascite. En cas de menace de rupture, la mesure d’urgence à prendre est représentée par une ponction d’ascite évacuatrice d’un à deux litres.
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Les manifestations cardio-vasculaires
Les signes cardiovasculaires, comme il a été signalé ailleurs (15), associent un débit cardiaque augmenté et des résistances périphériques abaissées ; il faut ajouter ici que l’incidence de la maladie athéromateuse est basse chez le cirrhotique. Il y a probablement un lien entre la tension artérielle généralement basse et cette incidence réduite ; d’autres facteurs sont probablement également en cause.
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