Pourquoi a-t-on des coliques en voyage ?
Lorsqu’on voyage dans des contrées lointaines en s’accommodant des mets locaux, les conséquences sont immédiates: confronté à des types de nourriture qu’il n’a pas
l’habitude de « traiter », le système digestif déclare forfait. Survient la triste litanie de 3 à 10 selles quotidiennes, non moulées, et ce durant 5 à 10 jours ponctués de douleurs abdominales, de nausées, voire de malaises. Autrement dit, on éprouve la bonne vieille turista, celle qui laisse des souvenirs impérissables!
Si le déclenchement et la gravité de l’affection impliquent divers facteurs, comme les habitudes alimentaires de chacun, la fréquence des voyages, l’état de santé général (notamment celui du système digestif), mais aussi le niveau social, le déterminant en la matière est surtout le pays visité. Plus l’hygiène alimentaire y est faible, plus fort est le risque de passer ses vacances aux toilettes (quand il y en a). Le risque est maximal pour toute l’Afrique, l’Amérique centrale, l’Amérique du Sud (sauf la Patagonie, où il fait trop froid pour les germes !), l’Eurasie et la péninsule Arabique.
Dans 40 à 60 % des cas, c’est une bactérie très banale, baptisée Escherichia coli, qui est responsable de la « diarrhée du voyageur ». Fort bien connu des spécialistes, ce microbe au génome parfaitement séquencé vit pourtant naturellement dans notre système digestif, dont il facilite le fonctionnement. Il représente en fait près de 80 % de la flore microbienne de l’intestin. Mais il en existe des variétés pathogènes. Ces « pathovars » sont de la même espèce ; soit ils disposent de quelques gènes en plus, soit certains de leurs gènes ne fonctionnent pas tout à fait normalement.
Les pathovars des Escheridia coli représentent de sérieux concurrents pour leurs homologues « normaux » si, une fois ingérés, ils parviennent intacts jusqu’à l’intestin après avoir passé avec succès la barrière des enzymes de la salive (lysozymes [voir p. 123, 155], notamment), puis celle des macrophages (gros globules blancs) de l’œsophage et du bain acide de l’estomac. En plus d’une reproduction plus rapide, ils spossèdent des facilités morphologiques qui leur permettent de se fixer sur les microvillosités (reliefs) de l’intestin.
Certains en profitent pour émettre des toxines (c’est le cas des Escherichia coli entérotoxigéniques, ou ETEC), de telle façon que les cellules de la muqueuse sont gênées dans leurs échanges d’ions avec le liquide dans lequel elles baignent: elles se mettent alors à évacuer à la fois beaucoup trop d’eau et de sels. Les selles deviennent liquides, l’organisme perd de l’eau et son taux de sels, en particulier le sodium et le chlore, chute. Il y a dès lors péril: les cellules ne peuvent plus fonctionner correctement, car leur métabolisme dépend de ces échanges ioniques. Rien de grave, toutefois: une turista ne dure jamais longtemps, et il suffit pour se soigner de se remplir l’estomac, de riz par exemple, et de boire beaucoup.
Certaines infections à £ coli inspirent toutefois bien des craintes dans le monde médical. Celles dites « invasives » sont responsables de diarrhées sanglantes; elles surviennent lorsque des pathovars envahissent les cellules du côlon. La plupart de ces infections auraient des conséquences à long terme, et non des moindres! En effet, les £ coli pathogènes auraient la particularité de se repaître… d’ADN. Pas l’ADN des cellules, mais celui du milieu interstitiel.
Ces infections peuvent également produire une toxine particulière, la colibactine, spécifiquement dirigée contre l’ADN cellulaire. La colibactine modifierait en réalité le cycle cellulaire. La synthèse de cette toxine, également par les Escoli « normales », tendrait à induire son rôle probable dans la différenciation cellulaire au sein de la muqueuse intestinale. Un dérèglement de cette production, généré par exemple par l’arrivée dans le tube digestif de bactéries pathogènes également productrices, pourrait bouleverser la différenciation cellulaire au point de l’engager dans la voie de la cancérisation, qui n’est autre qu’une division cellulaire sans contrôle…
Vidéo : Pourquoi a-t-on des coliques en voyage ?
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